Pour parler de Nikon D4, il y a deux approches. La première, qui consiste à noyer le poisson en abreuvant ses lecteurs de graphiques aux couleurs immondes, en leur expliquant, par a plus b puissance cosinus de mes deux que le facteur anti aliasing est nettement plus performant grâce à la puce de seconde génération embarquée et le traitement… bla bla bla. Si vous cherchez une review comme celle-là, vous allez être très déçu, parce que c’est pas vraiment le genre de la maison. Non, ici, on privilégie plutôt les tests sur le terrain, c’est à dire les endroits qui sentent sous les aisselles, la bière et l’animal. Alors que je venais de recevoir un Nikon D4 tout neuf dans son carton, je bouillais d’impatience de l’amener avec moi, sur mon terrain de jeu de prédilection, les salles obscures avec de bien jolies lumières. Et ça tombait bien puisque hier soir c’était le retour du festival « Les femmes s’en mêlent » à La Carène, un festival a la particularité de proposer une programmation chic et raffinée. Une accréditation plus tard (god bless ya K.) et me voici sur le port de co à Brest même, mon D4 sous le bras. Pour l’occase j’ai embarqué mes deux cailloux de prédilection, Nikkor 70-200 f2,8II et bien entendu mon cher Nikkor 24-120 f4 (en vente partout). La Carène, sa salle club et son plan de feux classieux, j’étais prêt.
• Réglages de base et premières impressions
Avant le début du concert, je checke vite fait les réglages du reflex sur un principe assez simple : toutes les fonctions de traitement lié au boîtier qui pourraient améliorer l’image, de type réduction du bruit et consorts sont positionnés sur OFF. Côté sensibilité, je suis là pour voir, donc aucu, aucu, aucune hésitation, je vais naviguer entre 3200 et 6400 iso. Étant propriétaire, je vous le rappelle, d’un D3s qui étale proprement à 3200iso, j’imagine qu’avec ce D4 on doit pouvoir faire au moins aussi bien, voire un poil mieux, inutile de vous faire un dessin. Pouvoir évoluer à 6400iso et sortir une image proprette, ça le fait non ? Autre chose, je règle la qualité d’image sur RAW + fine. Habituellement je ne travaille qu’en RAW, mais pour ce premier test, je ne veux pas avoir à me prendre le chou à dérusher dans CNX et encore moins dans Lightroom. Pour savoir ce que ce Nikon D4 a dans le bide, rien ne vaut une bonne image brute de fonderie, sans traitement ou bidouillage de post prod. Non. Ce test, c’est Nikon D4 et moi, dans le plus simple appareil, si j’ose dire. Premier concert, on prend la mer comme disait Baudelaire. Première impression, Nikon D4 est extrêmement véloce, mais ça, on va y revenir. Parlons d’abord du boîtier et du chapitre ergonomie.
• Ergonomie. Nikon D4 soigne les détails.
Finalement on pourrait se dire que rien n’a changé ? Des boutons ont disparu, comme les boutons de sélection de zone autofocus, de mesure d’expo, qu’on active désormais directement dans le viseur ou sur l’écran de contrôle. Une fois passée la période d’acclimatation, une fois que l’info est enregistrée, c’est comme si les choses avaient toujours été comme ça, finalement. Non, les deux fonctionnalités épatantes, les deux petits trucs que j’avais immédiatement repérés à la présentation de D4 chez Nikon en début d’année, c’est le réglage du collimateur et le rétro-éclairage des boutons de commande. Un vrai bonheur. Le rétro éclairage de la face arrière, c’est typiquement le genre d’accessoire qui va ravir tous les photographes de terrain, c’est super discret et pour tout dire indispensable. Parce qu’un peu de lumière dans la nuit, ça rassure et ça change tout. Quant aux joysticks de sélection de collimateur, disponible en paysage comme en mode portrait, ça rappellera sûrement quelques bons souvenirs aux anciens possesseurs de reflex EOS, une fonctionnalité indispensable, même si (vous allez rire) je ne les ai pratiquement pas utilisés, privilégiant à leur place le gros bouton de sélection, mais ça c’est la force de l’habitude. Voilà ce qui change avec D4. Sinon, physiquement, c’est la même dégaine qu’un D3s à peu de choses près et c’est très bien comme ça. Côté poids, on est toujours dans la catégorie lourd léger, lourd au début du concert, léger à la fin, surtout quand le concert est bon comme hier soir. Quant à la batterie, après une soirée de travail, elle n’avait pas bougé d’un iota, les barres étaient calées au max. Voilà pour les apparences, mais vous le savez, les apparences ici, c’est pas notre tasse de thé. Comme disait la pub de ces chers Ben & Jerry’s, Nikon D4 c’est comme Chocolate fudge brownie : le meilleur est à l’intérieur.
• Nikon D4 en deux mots : véloce et efficace.
On me la raconte pas. C’est comme ça, je sais immédiatement si c’est bon ou si c’est pas bon. Vieille habitude. Je n’avais pas tapé dix clichés que déjà la messe était dite. C’est marrant parce que dès que j’ai vu les images sur l’écran LCD (qui me semble par ailleurs bien optimisé par rapport à celui qui équipe le D3s), j’ai immédiatement compris que je venais de passer un cran au dessus, one step beyond. Une image cristalline, furieusement piquée, un beau contraste, une image profonde, un beau relief. Si Nikon D4 voulait me draguer, c’était exactement comme ça qu’il fallait qu’il s’y prenne, le bougre. Et je n’avais encore rien vu. Premier set, comme un tour de chauffe. Je me fais la main (si j’ose dire) sur la sémillante chanteuse Beth Jeans Houghton & The Hooves of Destiny et premier constat, ça claque mais pas que. On sent que Nikon D4 a une capacité à aller chercher le focus dans des zones d’ombre, au delà des limites habituellement imposées par D3s. Impressionnant. L’impression de puissance, de vélocité, d’efficacité est nettement palpable. Couplée à la prise de vue en rafale, c’est encore meilleur. Attention cependant à ne pas laisser le doigt sur le déclencheur trop longtemps ! À un rythme infernal de 11fps, on aurait vite fait de bouffer une carte Sandisk extreme de 32Go. Pour info, l’autonomie de Nikon D4 en RAW+fine sur une carte de 32Go est de 608 clichés, puisque rappelons-le, le capteur affiche 16 mégapixels (contre 12 pour le D3s). J’ai shooté Shara du groupe My brightest diamond au 70-200 sous à peu près tous les angles, autant en bord de scène que du fond de la salle, voire dans le public. À chaque prise de vue, la même sensation d’aisance, le même sentiment de se sentiri à l’aise, confortable. Les photographes qui possèdent un boîtier Nikon, je pense aux propriétaires de séries D3, vont se sentir immédiatement bien. Pour la petite histoire, Nikon France n’a pas livré de manuel avec le boîtier (c’est normal, il n’y a jamais de manuel avec les boîtiers de prêt). Et surtout, il n’y a aucun besoin d’un manuel. Si vous avez déjà roulé en Nikon, l’apprentissage du D4 est immédiat.
• Et puis il y a l’image…
Quand je suis rentré, il n’était évidemment pas question d’aller sagement se coucher, il fallait que je sache. Dans la quiétude et le silence de la nuit, j’ai visualisé mes clichés sur l’écran de mon Mac avec un simple utilitaire de visionnage, toutes fonctions d’aliasing désactivées, évidemment. Et là, j’en ai pris plein les yeux et plein la gueule. Bizarrement, je n’ai pas pensé à moi, en visionnant les clichés. Non. J’ai pensé à tous les photographes de terrain, les photo-reporters, les photographes animaliers, les photographes sportifs qui vont bientôt avoir l’immense privilège de toucher ce boîtier dans le cadre de leur activité. J’ai pensé aux photographes qui vont couvrir les J.O.de Londres, ceux qui ne peuvent pas se payer le luxe de passer trois plombes à dérusher chaque cliché NEF dans Capture NX ou à triturer l’image dans Lightroom pour en faire quelque chose de potable. Non. j’ai pensé à ces gens qui bossent dans l’urgence de l’image, qui doivent compter sur leur boîtier et pouvoir sélectionner le bon jpeg qui va bien, là, tout de suite, maintenant, pour un envoi immédiat à l’agence de presse. Voilà. Nikon D4 est fait pour ces gens-là. Difficile de ne pas tomber dans le lyrisme débridé quand on parle d’un reflex comme le D4 mais voulez-vous que je vous dise ? Nul besoin d’en faire des tonnes. On regarde l’image tapée à 6400iso, on voit un niveau de bruit relativement faible, optimisé par rapport à D3s, on se dit que c’est très bon, qu’on a bien fait son boulot, que l’image est chouette, propre, intense, bien cadrée. On se dit que si on veut, on peut cropper un poil pour enlever un détail disgracieux, parce qu’avec 16mp on a plus de marge qu’avec 12mp. C’est un détail mais ça compte. Mais au fond, le seul truc vraiment important, c’est l’image qu’on a ramenée.
• Nikon D4 se conjuque au plus que parfait.
« Ça serait bien que tu testes le D4. » Celui qui m’a dit ça se reconnaîtra. Ce que j’ai découvert sur le terrain délicat de la photo de concert, toutes les qualités intrinsèques de Nikon D4, lui, il le savait déjà. C’est d’ailleurs sans doute ce qui caractérise le positionnement produit (terme affreux mais il n’en n’existe pas d’autre) de la gamme reflex Nikon aujourd’hui. Petit détail, je n’ai pas testé la vidéo, mais je vais le faire, par curiosité, puisqu’entre autres choses Nikon D4 embarque du full HD. Pour le reste, soyons clair. Là ou Nikon D3s est un reflex parfait, son successeur se conjugue quant à lui au plus que parfait. À le voir comme ça, on dirait un D3 mais à l’intérieur on joue sur un autre registre, un autre tempo. Tout semble avoir été revu, optimisé, pour permettre aux photographes de repousser les limites, encore. Il y a du génie dans la technologie embarquée de Nikon D4. Comment ont-ils fait ? Un spécialiste pourrait sans aucun doute nous pondre un joli graphique avec plein de cosinus et de courbes alpa machin pour nous prouver que D4 est encore meilleur, bla bla bla… On s’en cogne. Ce qui intéresse la clientèle de Nikon D4, c’est de répondre à cette question. Est-ce que Nikon D4 me permet de ramener d’excellentes images dans toutes les conditions de prises de vue, d’être bon, là, tout de suite ? La réponse est oui, plutôt deux fois qu’une. Et le reste, mes chers amis, c’est de la littérature.
• merci à La Carène SMAC de Brest et à Nikon Pro pour leur soutien.
• My brightest diamond, la Carène Brest. Nikon D4, Nikkor 70-200 f2,8II (EXIFS : mode priorité ouverture, f4, 1/125, 200mm, 6400iso, fichier jpeg brut de capteur).
[…] Si vous êtes à la recherche de conseils plus pointus sur la photographie de concert, je vous invite à consulter l’excellent site photo : shot.fr, vous apprendrez des choses essentielles notamment sur le Nikon D4. […]