Je viens de voir passer une info à propos de l’incident qui a opposé Nadine Morano et un photographe de l’Est Républicain. Allez ! Je suis dans un jour de bonté, je vous fais un résumé du spectacle. Donc, à ma droite (si j’ose dire), Nadine Morano, ministre. Madame est en visite dans son fief de Toul pour une énième cérémonie de vœux. À cette occasion, l’Est Républicain publie un article titré « le SAV des élections à Toul » et illustre son article d’une photo de Philippe Briqueleur qui travaille pour le quotidien. Aïe ! La photo déplaît à Madame Morano pour des raisons qui lui appartiennent. J’ai lu sur Rue89 que les mauvaises langues chuchotent en coulisse que la photo laisse apparaître un double menton, bref, la photo ne plaît pas à Madame Morano, dont acte. Shit happens. L’incident pourrait s’arrêter là. Ou pas. À la parution du quotidien, Nadine Morano a déclaré le boycott du photo reporter dans ces termes : « J’exerce mon droit à l’image. Plus jamais vous ne me prendrez en photo, c’est fini ! » Je vous épargne la suite, l’épisode où Nadine Morano empêche le photographe de la prendre en photo, où elle sélectionne des groupes de photographes, les uns ayant le droit de la photographier, les autres non. Ou le moment où un officier de sécurité intervient et se dirige vers le photographe pour lui interdire d’exercer son métier. Comme à son habitude (souvenez-vous de l’affaire qui l’avait opposée à une internaute), Madame Morano a souhaiter dédramatiser en affirmant qu’il n’y a pas de quoi en faire une affaire d’état. Eh bien si, justement. Il y a de quoi.
Au nom de quoi une personnalité politique française, ministre de surcroît, peut-elle insulter un photographe, publiquement, sans que personne ne s’en émeuve peu ou prou ? Au nom de quelle autorité pourrait-on accorder à un ministre le droit, tel un privilège, de choisir qui peut et qui ne peut pas la photographier ? Et finalement l’interpeler sur son action ? Il y a beaucoup plus qu’un simple incident dans cette façon de se comporter, il y a une attitude qui, pour ma part, en temps que photographe, me révolte. La période actuelle est de plus en plus propre, clean, policée, politiquement correcte et paradoxalement Stéphane Hessel fait un carton en librairie avec son ouvrage Indignez-vous ! Alors, oui, je veux bien en vérité suivre les conseils du vieux sage et m’indigner, Madame Morano, de votre attitude. Je vous le dis tout net, Madame. Votre visage et votre blondeur qui n’ont rien de candide ne passeront jamais à travers mes collimateurs. Je veux bien rejoindre les rangs de ceux à qui vous interdisez de faire leur travail, solidaire devant l’insulte. Non Madame. Je ne vous prendrai jamais en photo. C’est fini.
Je suis Spartacus !
DarkSchneider dit
La résistance n’est elle pas le refus de soumettre ?
Au contraire, moi je continuerais à la photographier qu’elle le veuille ou non, juste pour pouvoir exprimer le fait que, en tant que personnage publique s’exposant dans un meeting, elle s’expose à être photographier et que son image soit interprétée, a partir du moment où l’image ne porte en rien atteinte à sa dignité.
A partir du moment où la photo n’est pas une photo insultante, mais uniquement informative, il ne devrait pas y avoir de limite. Donc, si madame Morano ne souhaite pas se laisser photographier par mes soins, grand bien lui fasse, mais dans un cadre de meeting, je la photographierais tout de même. Qu’elle soit d’accord ou non.
Sommes nous en Tunisie ? En Chine ? Sous l’occupation en 40 ? Madame Morano a choisi un métier publique, et d’exposer sa propre image de manière publique.
Qu’elle en assume les conséquences et qu’elle respecte les lois de la République qu’elle est censée représentée, et le travail des photographes.
L’information, ce n’est pas de la publicité, ou de la propagande, n’en déplaise à madame Morano.
joe dit
Bientôt la mise en place d’une police de l’image, le bon modèle des bonnes photos produites par de bons photographes est déjà en place : celui des microstocks « libre de droits » où les gens sont tous joyeux au pays de « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil » heu heu … !
al dit
C’est très énervant en effet; attitude grossière !
Mais bon, dans quelques années qui se rappellera de Nadine M. ?
Jean-Luc Kokel dit
Qui a le plus à perdre, imaginons qu’aucun photographe n’accepte plus de la photographier, qui serait le perdant ?
Où sont les textes législatifs sur le droit à l’image ?
harvey dit
Créer c’est résister comme disait mon pote Kwal. Il y a deux options. La shooter ou refuser de la shooter, les deux choix sont bons. Pour ma part, je me sens solidaire du photographe à qui on interdit de shooter Madame Morano, donc je choisis l’option de ne plus laisser l’image de Madame Morano passer dans mon viseur. J’imagine que si tous les photographes avaient cette attitude de solidarité, que Madame Morano ne soit plus du tout photographiée, alors oui, le perdant ne serait pas celui qu’on croit. Et finalement, j’aime bien en conclusion le message de Al : « qui se souviendra de Nadine M. dans quelques années ? »
David dit
Je ne photographie que les gens que j’apprécie, donc pas de danger que je gâche de la pellicule pour elle…
harvey dit
@David pas mieux !
Simon dit
Même Voici s’est moqué d’elle !!!
Je pense que la profession n’en a rien à foutre de ce qu’elle a dit et surtout de cette histoire.
Belle hommage à ce photographe !
Perso, je serais à sa place, je continuerai à la shooter. Je serais dans le droit de le faire, je respecterai alors les lois républicaines. Les mêmes lois qu’elle est sensée défendre en tant que ministre
didier dit
le droit à l’image vise principalement à protéger la dignité de la personne ainsi que le respect de la vie privée.
de plus, le droit à l’image n’est pas absolu et cède devant le droit à l’information.
Bref, en tant que personnalité publique (ministre) dans l’exercice de ses fonctions, seul le droit à l’information prévaut.
harvey dit
@Simon ouaip ça se tient.
Buffalaurent dit
Il me semblait que dans le cadre d’exploitation commerciale des photos, il fallait demander l’autorisation des sujets, c’est pas le cas en France? (sans parler de la dame dont il est question ici)
PhilippeF dit
Personnellement, je peux la comprendre, car en voyant sa photo, je ne la shooterai pas non plus… mais à tout point de vue !
harvey dit
@PhilippeF tiens c’est marrant, je me disais ce matin ah c’est bizarre Philippe n’a rien dit. Et en même temps j’attendais le photographe qui allait balancer un truc du genre « en voyant sa tête on n’a pas vraiment envie de la shooter ». C’est ce qui s’appelle faire d’une pierre deux coups. Bien vu !
(l'autre) David dit
Le droit à l’image existe bel et bien et si le photographe est le propriétaire de sa création, la diffusion doit être faite avec l’accord du sujet.
Bien sûr cela n’est pas possible pour un quotidien d’avoir toutes ses autorisations, c’est en partie pour cela que les personnalités acceptent de se faire prendre en photos durant les manifestations publiques, c’est un « accord » tacite.
Le fond ne me dérange pas plus que cela …. mais la forme c’est une autre histoire. Sélectionner les photographes est une atteinte à la liberté de la presse, demander à un agent des forces de l’ordre d’officier pour ses propres intérêts est formellement interdit par la loi (détournements de ressources publiques).
Les gens sont devenu méfiant car il n’auront pas de contrôle sur leurs images qui peuvent être diffusez partout (facebook, blog, …) et sans restrictions.
Il y a des excès dans les deux camps tout n’est pas blanc ou noir.
Jojomigrateur dit
Si cette dame aussi « ministre » soit-elle vient à passer dans le champ de mon appareil photo, c’est à coup sur la photo la plus laide, la plus disgracieuse, la plus caricaturale que je publierai… Peut-être même que je ferai un peu de retouche « à l’envers », histoire d’accentuer une « défaut » ou une particularité physique de la dame…
En réaction à son attitude, j’incite d’ailleurs tous les photographes à en faire autant !