Vivian Maier. On dit d’elle qu’elle est l’une des plus grandes photographes du XXe siècle. À l’occasion d’un déplacement pour photographier le concert d’une artiste islandaise pour laquelle j’ai une grande admiration (la lumineuse Sóley, qui porte bien son nom), j’ai fait un détour par les jardins du Luxembourg et son musée éponyme. L’occasion de voir de près les tirages de la nounou la plus célèbre de l’histoire, après Mary Poppins évidemment. C’était un lundi, j’espérais une affluence modeste, d’autant que l’expo est en place depuis le 15 septembre et qu’elle y reste jusqu’au 15 janvier 2022. Las ! Malgré des créneaux horaires à réserver, c’était l’affluence des grands jours. Dès l’entrée, dès les premiers clichés, l’expo est une vraie DeLorean, un voyage dans le temps. Un flashback dans les US des années cinquante, New York, Chicago. Son Rolleiflex autour du cou, Vivian arpente les rues et capture des moments, en toute simplicité.
Vivian Maier. Le plaisir de photographier.
Ce qui touche, dans le travail photographique de Vivian Maier, c’est d’abord naturellement la naïveté et la beauté, la candeur de son regard. Mais avant tout, ce que je ressens à la lecture de ses photos, c’est le plaisir que Vivian prend à chaque déclenchement. Il y a une grande dose d’humour et d’amusement dans ses clichés, qui sont des témoignages d’une valeur historique inestimable. On dit de Vivian Maier qu’elle a inventé la street photography. Ce qui rend son travail si pertinent et d’une très grande valeur à mes yeux, c’est qu’à aucun moment Vivian n’a imaginé qu’un jour son travail serait reconnu au niveau planétaire. Mieux encore. Que son nom serait associé aux plus grands photographes du vingtième siècle. Non. Vivian Maier faisait des photos parce que c’était son hobby, son passe-temps, sa véritable passion dans laquelle elle devait engloutir toutes ses économies !
• Rolleiflex et Leica IIIc
Car pour mémoire, Vivian Maier n’utilisait pas n’importe quel matériel. En moyen format, elle photographiait en noir et blanc avec un Rolleiflex et lorsqu’elle s’est mise au 35mm et au film en couleurs, elle avait opté pour un Leica IIIc. Autant dire que Vivian était une femme de goût et qu’elle connaissait parfaitement l’importance de la qualité du matériel. Dans la salle de bains, qui était mise à sa disposition, Vivian développait elle-même ses films en noir et blanc. En revanche ses films couleurs ne furent ni développés, ni tirés de son vivant.
• Les photos de Vivian sont notre héritage
Restent les images, le témoignage posthume. Des images d’une force et d’une pertinence inouïes. L’expo au musée du Luxembourg permet de découvrir toute l’étendue du travail de la photographe à travers les retirages grands formats, les planches contact. Un bémol cependant sur la qualité des tirages qui ont été réalisés à partir de scans numériques. Il est intéressant de comparer les tirages vintages (d’époque donc) avec les retirages numériques aux contrastes des plus violents. Mais le cheminement à travers les images est splendide et on sort ébloui de cette expo.
Pour ma part, ce qui m’a touché, bouleversé même, c’est le ressenti à chaque image, cette véritable passion pour la photographie. Vivian était gourmande de chaque instant, elle s’amusait, elle explorait, elle mettait en scène. La rue, les gens, la ville, c’était son décor, c’était sa vie, sa joie de vivre. D’ailleurs, ne le disait-elle pas elle-même ? Toute ma vie est dans ces cartons. Ses négatifs en noir et blanc, ses films couleurs qui ne furent développés qu’après sa disparition.
Finalement, en ressortant de l’expo, je me suis dit que tous les photographes passionnés doivent voir cette expo. Parce qu’au fond, le travail de Vivian Maier, c’est une leçon de photographie. Un regard, un talent et surtout beaucoup d’humilité et de simplicité.
Laurent dit
Merci Hervé pour cet article!