Quand j’ai commencé la photographie, la question ne se posait pas comme aujourd’hui. Quand on voulait faire des photos, on parlait de photographie argentique et de rien d’autre. À l’époque, d’ailleurs, on disait qu’on faisait « de la photo ». Une pellicule, un appareil photo. Et dans la foulée, direction le labo photo, pour voir le résultat. Les débuts étaient d’ailleurs plus souvent chaotiques au labo qu’à la prise de vue. Pour faire des photos, la première difficulté était d’abord de charger le film correctement dans le boîtier. Ensuite, lorsque les photos étaient faites, il fallait rembobiner la pellicule, délicatement et en souplesse, en essayant de conserver l’amorce en dehors de la bobine. Sinon c’était un peu la galère assurée, dans l’obscurité totale, pour retrouver le début du film.
Finalement, pour le néophyte, la photographie argentique ressemblait un peu à un parcours du combattant, même si les choses sont plus simples qu’il n’y parait. Aucun doute, cependant. Le timing n’était pas celui d’aujourd’hui, le rythme et la respiration non plus. Il n’y avait pas d’instantanéité dans l’acte photographique. On devait attendre, apprendre la patience. Cela induit-il qu’on faisait des photos différemment hier qu’aujourd’hui ? Sans aucun doute.
Je suis convaincu que la photographie argentique demeure un passage obligé pour tout photographe. C’est une école d’exigence qui ne laisse rien au hasard. J’ai souvent comparé la photographie argentique à la pâtisserie. Car en pâtisserie, le moindre écart ne se rattrape pas. C’est de la chimie, un monde où l’interaction entre les éléments est essentielle. En photo c’est pareil. Peut-être avez-vous envie, vous aussi, d’y aller, de tenter le coup. D’acheter une pellicule, de cramer 24 ou 36 poses, franchir le pas. De la genèse de l’image à sa révélation il n’y a qu’un pas et croyez-moi. Vous pouvez le faire. Il suffit simplement d’en avoir envie. Suivez le guide, on va s’amuser…
Photographie argentique, ça rime avec magique !
• Un reflex, une pellicule
Je vais vous faire une confidence. La semaine dernière, j’ai passé un merveilleux week-end. J’ai ressorti les bouteilles, préparé les chimies pour développer des pellicules qui trainaient dans mon armoire depuis des années. Depuis cinq ans, comme le temps passe, je n’avais plus développé de pellicule argentique. Mes sachets de produits étaient officiellement périmés depuis quatre ans, mais conservés à l’abri de l’humidité et de la lumière, ils ne demandaient qu’à reprendre du service. Pourquoi maintenant ? Sans doute à cause, ou plutôt grâce à l’arrivée d’un Nikon F6 entre mes mains, ce fabuleux boîtier, dernier représentant de la famille photographie argentique, sorti des ateliers Nikon en 2003. Un reflex argentique certes, mais carrossé comme un numérique moderne et capable de gérer les optiques Nikkor. C’est la première chose dont vous allez avoir besoin. Un appareil photo reflex 24×36. Vous avez le choix ! En occasion, ce n’est pas ce qui manque, pour des budgets modestes. Nikon, Canon, Asahi Pentax, Yashica, Minolta, Praktica, Fujica, Zenit, Olympus, … Sur les sites de ventes aux enchères, on trouve de très bons reflex argentiques à partir de… 10€ ! Privilégiez une optique standard, comme un 35mm ou un 50mm. Pour la pellicule, c’est idem, pas de vagues. Optez pour un grand classique, comme la TriX 400 (ma préférée, très souple d’utilisation) ou la T-Max 400 (très renommée, un grain d’une finesse exemplaire). Ces pellicules noir et blanc de grande qualité sont toutes les deux estampillées Kodak. Un reflex et une optique, une pellicule. Vous voilà fin prêt pour le grand voyage.
• Premiers déclenchements
Première étape, charger le film dans l’appareil. Si vous avez opté pour un appareil relativement récent, c’est le cas du Nikon F6 par exemple, il est probable que le chargement soit automatique. On ouvre la trappe arrière, on loge la pellicule dans la partie gauche du boîtier, on déroule la pellicule jusqu’à la partie droite du reflex. On ferme le capot et la pellicule se charge toute seule. Pour les reflex plus anciens, il faut amorcer la pellicule en la faisant passer dans le rouleau de droite, puis en armant le levier du déclencheur. Quand la pellicule est bien en place, on referme le capot arrière et on tourne la molette permettant le resserrage de la pellicule. Un ou deux déclenchements plus tard, votre appareil est prêt, c’est à vous de jouer.
La plupart du temps, les reflex, surtout ceux de première génération, étaient souvent entièrement manuels, ce qui peut en décontenancer plus d’un ! Idem pour l’autofocus. Ici pas de mise au point automatique, sauf si votre appareil est moderne. Pour votre première séance, ne vous compliquez pas la vie. Je vous conseille de choisir une prise de vue en extérieur, par temps clair. Prenez votre temps, soignez votre cadrage, votre composition, réfléchissez avant d’appuyer sur le déclencheur. Mise au point, choix de la vitesse en harmonie avec le diaphragme. Plusieurs options s’offrent à vous. Si votre appareil est assez récent et qu’il vous permet d’accéder au mode semi automatique ou automatique, ne vous prenez pas la tête. Utilisez le mode priorité ouverture voire le mode automatique et faites-vous plaisir en soignant vos cadrages et la composition. Si vous utilisez un reflex plus ancien, à vous les joies du tout manuel. En extérieur, par temps clair à 400iso, vous aurez beaucoup de latitude.
• Prêt pour la révélation !
Une fois la pellicule complètement exposée, il est temps de la rembobiner. Si votre appareil est contemporain, il est probable que la pellicule va se rembobiner toute seule. Dans ce cas, veillez à bien indiquer dans les paramètres de conserver l’amorce. Sur Nikon F6, c’est une fonctionnalité possible. Pour le rembobinage manuel, prenez votre temps. Activez le bouton de débrayage, il se situe parfois sous le boîtier, comme sur les reflex Canon (Ftb, EF, F1, …) puis tournez la molette pour ramener le film dans son logement d’origine, sans forcer. À la fin vous entendrez un petit clac, c’est le signe que la pellicule s’est détachée du rouleau de droite. Si vous avez complètement rembobiné et que vous n’avez plus accès à l’amorce, pas de panique. Il y a un accessoire pour ça, le fameux Film picker, je vous en reparlerai bientôt au chapitre des accessoires indispensables. Lorsque vous avez votre pellicule en main, deux solutions. La faire développer à la boutique photo la plus proche ou le faire vous-même. Naturellement, développer soi-même ses pellicules photo est la continuation logique du processus. N’ayez pas peur ! C’est beaucoup plus simple qu’il n’y paraît, il suffit juste d’un peu de rigueur. Le résultat, lui, tient de la magie, de l’alchimie. Ça vous tente ? Rendez-vous la semaine prochaine pour la suite de l’aventure et en attendant… Faites des photos !
• Les bons plans
Pour trouver un appareil photo d’occasion, il y a bien sûr les sites de ventes aux enchères comme eBay ou Le bon coin. Pour ma part, je vous conseille plutôt de rejoindre des groupes de photographes passionnés, comme la page Facebook Vente, échange matériel photograhique argentique.
Pour les pellicules, ce ne sont pas les boutiques en ligne qui manquent, mais… Pour obtenir des prix raisonnables, il faut souvent acheter en lot, avec le risque de ne pas tout utiliser (attention aux dates de péremption). Pour ma part, je privilégie l’achat à l’unité sur Amazon, particulièrement attractif, surtout si vous êtes comme moi membre Premium (la livraison en 1 jour ouvré est gratuite). On y trouve de la Kodak Tri-X 400 36 poses ou Kodak TMAX 400 36 poses
(5,90€ TTC environ à l’unité), de la Ilford HP5 Plus 400 36 poses (5,60€ TTC l’unité).
Merci pour ce super article !
J’ai jamais vraiment fait de photo argentique mis à part sur un vieux reflex de mes parents sans rien comprendre. Mais la photos m’a toujours fasciné.
Je crois que le jour ou j’aurai un peu de temps, il faudra que je trouve un boitier mes belles optiques Nikon pour cramer de la peloch, faire des erreurs et tout simplement apprendre et démystifier ce monde que je ne connais pas vraiment 🙂
J’attends avec impatience le prochain article sur la chimie, ou pour le coût je ne connais absolument rien. Autant la prise de vue, je pense arrivé à faire quelque chose de potable autant les mystères du développement me laisse dans le noir total !