Dans Capture One Pro, il y a pro.
• Jour 1. Une ou deux bonnes raisons de choisir C1Pro.
Cette fois, c’est décidé. Je laisse complètement tomber Lightroom. Bon, en même temps, je n’ai jamais vraiment été très fan du logiciel d’Adobe que j’utilisais surtout pour le catalogage et plus rarement pour le dématriçage. Mais de temps en temps, quand même, par commodité ou par manque de temps, il m’est arrivé de dérawtiser avec Lightroom. Toujours à reculons. Je lui préférais Capture NX2 pour une raison assez simple. Quand Lightroom interprète mes fichiers NEF, Capture NX2 les lit et les comprend. Atout maître d’un logiciel qui a les clés de la maison. Car il faut voir les choses en face. Quand Lightroom ouvre un fichier NEF (c’est aussi valable pour les fichiers RAW des autres marques), il commence (excusez par avance pour l’image un peu triviale) par le foutre à poil et n’en conserver que la structure de base. En clair, tous les réglages fins spécifiques à Nikon comme D-Lighting ou le picture control (pour ne citer que ces deux-là), sont purement et simplement ignorés. Ensuite Lightroom va interpréter le fichier à sa sauce. Et moi, no offense, mais je trouve que cette sauce est absolument imbouffable. Pour s’en convaincre, c’est très simple. Il suffit de comparer un fichier jpg généré par mon reflex (ou dans le cas de Nikon par CNX2) et celui interprété par Lightroom. Il y aurait de quoi rire, mais mes clichés ne sont pas un truc avec lequel je plaisante… Seulement voilà. Capture NX2 vient de mourir et pas de la plus belle mort qui soit. Un peu la faute à Google qui a racheté Nik Software. Partant de là, la collaboration entre la firme de Mountain View et Nikon corp. n’était plus possible, Google récupérant, comme à son habitude et à son seul profit certaines technologies comme les U-Points qui étaient le principal atout de CNX2. D’ailleurs il suffit de regarder la nouvelle mouture de Capture NX-D, c’est un Canada Dry de la version précédente. Une version post perestroïka de Capture NX2, sans les U-points, mais toujours avec cette interface imaginée dans le goulag par des prisonniers de l’époque soviétique. Non, la messe est dite. Cette fois, de toutes façons je n’ai plus le choix. Même si Capture NX2 gère encore les NEF de mon nouveau reflex, Nikon D4s, il est temps de changer de crèmerie. J’ai choisi Capture One Pro et c’est mon dernier mot Jean-Pierre.
• Jour 2. Capture One pro est fait pour les photographes.
Je lance Capture One Pro version 8.2. Ce logiciel n’est pas un inconnu pour moi, j’avais déjà testé la version 7 et je connais ses nombreuses qualités, ses éventuels travers aussi. Je crois que ce qui définit le mieux Capture One Pro, c’est le mot pro, justement. Ce soft a été imaginé et créé par les développeurs de chez Phase One, la boîte qui conçoit et réalise la gamme d’appareils photo moyen format que l’on sait. On est donc en droit de s’attendre à des fonctionnalités assez cossues. Quand il s’agit de parler d’image, il ne fait pas de doute que les gens de Phase One maîtrisent leur sujet. Je n’avais pas opté pour Capture One Pro à l’époque, il y a plus de deux ans, pour une raison assez simple. Tant que Capture NX2 était là, fidèle au poste, je n’avais aucune raison de m’inquiéter, mais depuis l’épisode Google, les choses ont changé. Et puis ce que j’avais vu de Capture One Pro, notamment en matière d’interface, ne m’incitait pas à pousser mon exploration beaucoup plus loin et c’est exactement le sentiment qui s’est dégagé quand j’ai découvert l’interface de la version 8.2. Comme quand on découvre un plat au restaurant et qu’on le trouve un peu sec, qu’on se dit qu’avec un peu de sauce ça passerait sans doute un peu mieux. Si je peux vous donner un bon conseil, c’est de ne surtout pas vous contenter des apparences, car C1Pro cache bien son jeu. Faites ce que j’ai fait, allez au-delà des apparences, justement, car je vous le dis tout net. Capture One Pro 8.2 est sans aucun doute le meilleur logiciel de dématriçage du marché. Mieux encore. Une fois certaines fonctionnalités de CaptureOne Pro 8.2 découvertes, la question se pose, brutale. Comment peut-on encore accepter de travailler sur Lightroom ? Comment peut-on accepter de travestir la réalité, de laisser ce logiciel interpréter les images n’importe comment ? C’est à ce moment-là que se produit la rupture. Si vous êtes un fervent adepte de la bidouille, d’un post traitement qui pousse l’image dans ses derniers retranchements et même au-delà, alors vous n’avez aucune raison de quitter Lightroom. Si au contraire vous pensez que la photographie doit refléter la réalité, votre réalité, alors pas d’hésitation. Capture One Pro est fait pour vous, photographe. Est-ce que ça sera simple ? Non. Comme moi, la première fois que vous allez lancer Capture One Pro, vous allez sans doute vous dire, venant de Lightroom, que vous n’allez jamais vous y retrouver, que vous préférez aller élever des chèvres en Ouzbékistan que d’utiliser un bouzin pareil. Vous vous trompez. Faites moi confiance. Je suis passé par là.
Capture One Pro 8 à ma façon. Le volet navigation est masqué, j’ai créé un menu personnalisé avec les outils de mon choix dans l’ordre où je les utilise.
• Jour 3. Découverte de l’interface, du catalogue, des mots-clés.
Cette fois, j’y suis. J’observe l’interface qui me rappelle vaguement celle de Capture NX2, en moins arride. En même temps, difficile de faire moins user friendly que le soft maison de Nikon, mais arrêtons là les comparaisons. L’écran est constitué de deux grands blocs. À gauche, le bloc des commandes qui réunit tous les outils de traitement applicables à vos images. Ces outils sont nombreux, précis et d’une redoutable efficacité. Vous pouvez configurer l’interface comme vous l’entendez, ajouter ou supprimer des outils. En fait il faut imaginer Capture One Pro comme une grosse boîte à outils, vous prenez ce que vous voulez et vous les déposez sur votre plan de travail de manière à traiter vos images suivant votre logique, votre façon à vous de voir les choses. C’est une approche qui privilégie l’utilisateur, on peut à tout moment enregistrer sa façon de faire et l’appliquer sur une autre image ou en ensemble d’images. À droite, il y a vos images, que vous pouvez présenter comme bon vous semble. Le schéma un peu classique c’est l’image principale (visualisation) avec en dessous les autres images en taille réduite (navigation). Encore une fois, tout est paramétrable, les tailles, la présence d’infos de prise de vue dans le volet visualisation, particulièrement pratiques pour retrouver les conditions de la prise de vue. Notez cependant plusieurs choses. D’abord, on peut faire la part belle à l’image, à savoir l’afficher plein écran, ensuite on dispose d’une large palette d’outils, comme le compte-fil (un genre de loupe) pour zoomer ponctuellement sur une détail de l’image, ou d’une loupe. Sur un grand écran bien calibré, ça ne déçoit pas. Les heureux propriétaires de systèmes multi-écrans peuvent affichier Capture One Pro en multi-fenêtrage, sur un écran la navigation, sur un autre la visualisation, de quoi optimiser les flux de production. Évidemment, le premier choc avec Capture One Pro est visuel. La première fois que j’ai ouvert une session avec ce logiciel, dès la première image ma première réaction a été de murmurer : « Ah d’accord… » tant l’interprétation de Capture One Pro est proche, très proche de celle du soft propriétaire. On est à des années lumière de l’interprétation souvent chaotique de Lightroom, mieux encore. Sur mes images, j’ai le sentiment que Capture One Pro apporte une plus-value sensible, une meilleure appréhension de certains zones, en particulier sur les tons chairs. On sent que les développeurs de Phase One ont imaginé et mis en œuvre toute une palette d’outils et déployé leur expertise pour coller au plus près de la réalité des fichiers NEF. Le résultat est là, il est probant, enthousiasmant même. Vous savez maintenant pourquoi j’ai décidé de délaisser Lightroom et sa carosserie deluxe. Parce que ce qui fait la pertinence d’un outil ce n’est pas son interface mais bien son moteur. La scission se produit là. D’un côté ceux qui, de toutes façons, n’accordent qu’une importance toute relative au traitement du pixel. De l’autre, les autres qui pensent d’abord au respect de leurs images. Je fais partie de ceux-là.
Le premier truc que j’ai cherché à faire, c’est d’identifier mes images, phase essentielle du référencement dans le catalogue. En parlant de catalogue, Capture One Pro permet de travailler en deux modes, soit en catalogue, soit en session. La session est un mode de travail ponctuel, pour le photographe travaillant chez un client par exemple, en dehors de son catalogue standard. Notez que quelque soit votre choix, vous pouvez évidemment passer très facilement de catalogue à session et vice versa. Dès l’import des fichiers, Capture One Pro récupère toutes les informations sur la date de prise de vue, le matériel, le propriétaire et bien sûr l’ensemble des EXIFS. Autant de paramètres qui vont pouvoir servir ultérieurement à faire des recherches pointues, du style « je voudrais voir toutes les photos prises à Brest avec un Nikon D4s et telle focale, notées 5 étoiles, en mars 2015, avec tel ou tel mot-clé et utilisant le label de couleur mauve ». On peut identifier ses images un peu quand on veut, une par une ou en lot, leur affecter des mots-clés, utiliser des hiérarchies de mots-clés et aussi affecter des codes couleurs. Les notes de 0 à 5 étoiles s’appliquent facilement avec le pavé numérique (d’où l’intérêt d’avoir un clavier avec un pavé numérique). C’est rapide et une fois l’affectation des notes réalisées, on peut travailler exclusivement sur les images notées selon son choix. Une fois que je m’étais imprégné de l’interface, que j’avais repéré mes outils, validé la façon d’affecter des mots-clés et la façon de noter mes images, je savais que j’avais déjà fait un pas en avant. Il me restait maintenant à découvrir les outils. Le meilleur de Capture One Pro était à venir…
• à lire demain sur SHOTS, la suite de notre dossier consacré à Capture One Pro
• voir Capture One Pro sur le site de Phase One
• découvrez le tutoriel vidéo dédié à C1Pro sur le site video2brain
Julien dit
Bon je télécharge la version d’essai et je test… Le truc chiant je trouve c’est les plugins LR pour mon flux de production que je ne vais pas retrouver…
De toute manière j’attendrai de voir LR 6 avant de migrer définitivement si ça doit se faire…
Bertrand dit
C’est bien la 1ère fois que l’on se distancie.
J’ai testé C1 depuis des années et à chaque version. La catastrophe. Comme tu dis, on ne sait rien « bidouiller ». Quoique je dirais plutôt « développer ». J’ai tellement de confort à tous niveaux avec Lr qu’après 2 jours je jète C1…
Avec C1 tu sors ton négatif, un peu de balance, contraste….
Avec Lr, tu dessines, tu fais de la peinture, tu fais ta cuisine.
Si c’est pour sortir un bon jpg comme mes boîtiers Fuji le font du RAF (NEF, Raw), alors pas besoin de C1.
A chacun son truc. Mais je te comprends. Tu es photographe de concert. Ta religion c’est ton boîtier pas le développement. En paysage, portraits… C1 est trop court en terme de réglages et affinages.
Ah oui. Avec Fuji, C1 c’est horrible. La gestion des hauts iso n’est pas du tout à mon goût. Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé. Mais Fuji est redoutable, j’avoue.
harvey dit
@bertrand il faudrait que je te montre C1Pro, en 5 minutes tu serais tellement sur le cul que tu changerais d’avis. Voilà sinon je suis photographe 😉
Bertrand dit
Je l’ai encore testé. Je compare en Lr et C1. Avec Fuji le traitement est complètement plastique. Il ne connaît même que le X100. C’est te dire. J’ai un pote dans ton style photographe qui a tenté de m’en convaincre. Sans succès. Et ça fait plus de 5 ans qu’il s’y emploie 😀
J’ai un résultat catastrophique en terme de piqué. Les JPG boîtiers sont bien au dessus. J’ai trop mes marques chez Adobe. Et pourtant, je teste tout, crois-moi 🙂
harvey dit
@bertrand je suis étonné de lire des trucs comme « résultat catastrophique en terme de piqué » même si je pense que le piqué tu l’as à la prise de vue ou tu l’as pas. Mais je ne cherche pas à te convaincre, l’important pour chacun est de trouver chaussure à son pied et pour moi Lightroom était comme un caillou dans ma chaussure, justement. J’ai l’impression avec C1Pro d’avoir retrouvé une certaine sérénité et une performance aussi dans le workflow.
Là où tu as raison, c’est que mon travail m’oriente plutôt vers un aspect réaliste de mes clichés, naturel. Je ne cherche pas la post prod jusqu’au boutiste.
Bertrand dit
Ben oui. De la marmelade. A l’écran de C1 c’est bon et après export une vraie catastrophe. J’avoue que les RAF de Fuji sont capricieux mais bon, Lr le fait donc…
Et pourtant, j’ai encore tenté suite à ton article. Comme quoi, je ne suis pas fermé comme une huître.
Je vais encore m’y atteler ce soir car j’ai l’impression de mal conduire le carrosse.
Effectivement, je post prod a gogo. Et le couple Lr/Ps distance le reste. Avec C1 c’est export puis récup…
Si c’est quelques ajustement puis export (en trouvant les bons réglages), C1 est à conseiller. Dommage qu’ils n’ont plus une version light moins onéreuse.
Si je savais obtenir la bonne « accentuation » (comme le nomme C1), je serais ravi.
Fred P. dit
Très bon article merci. Cela fait plaisir d’en trouver un en Français 😉
Cela fait 2 semaines que je lorgne des videos sur Youtube de C1 et je pense télécharger la version d’essai.
Je suis très satisfait de l’ergonomie de Lightroom (je suis amateur) cependant je suis très déçu de son rendu avec les fichiers RAW des derniers boitiers Fujifilm, notamment ceux qui ont le fameux capteur X-TRANS 2.
Cela me motive à essayer d’autres alternative comme C1.
@ Bertrand:
J’aurais justement pensé qu’en terme de piqué, C1 écraserait LR sur les fichiers Fuji. Certains (sur les sites américains) disent même qu’il faut d’emblée baisser la netteté avec C1. Ce n’est pas le cas pour toi?
Sur LR tu retouches les JPEG ou les RAF? (pour ma part, je n’arrive pas à égaler la qualité de Jpeg Fuji par conséquent, je shoote toujours en RAW + JPEG)
Merci
Yves dit
Comme vous, je ne jure que par C1 pour le traitement de mes fichiers RAW. En revanche, je trouve que Ligthroom reste encore inégalé pour ce qui concerne le catalogage des images. Espérons que C1 fasse quelques progrès dans sa prochaine mouture.
Autrement, il me semble que l’on écrit « dématriçage » (et non « dématrissage »), probablement parce qu’on parle de « matrice » de Bayer (et non « matrisse »).
harvey dit
@yves vous avez raison, on dit bien dématriçage, je corrige de ce pas.
Bertrand dit
@Fred :
Bon alors, je suis sur C1 depuis 2 heures (ce truc me chipote depuis des lustres. Merci Harvey de réveiller la bête en moi) et je remarque qu’il faut y aller très prudemment avec l’accentuation.
J’avais une netteté nickel en aperçu sur C1 et après export (jpg, tiff ou autre), c’était plat et sans aucun relief. Mais… J’ai découvert que lors de l’export, je devais décocher l’option « Désactiver Accentuation » qui était cochée par défaut. Alors là, effectivement, la netteté est bien là. Je dirais même trop là. Il faut donc y aller doucement, à tâtons malheureusement.
Je regrette vraiment que l’aperçu de C1 n’est absolument pas fidèle au rendu de l’export. Et ça c’est mon problème. Je dois exporter pour vérifier si mes paramètres Accentuation (Valeur, Rayon et Seuil) sont bons.
Harvey nous en dira probablement plus sur cet étrange phénomène.
Donc oui, je sais enfin avoir ma netteté (trop même comme diraient certains américains selon vous) mais il me faut attendre l’export pour vérifier… Perte de temps.
Je n’arrive pas à gérer le bruit comme dans Lr. Là je cherche encore si je passe à côté d’un paramètre.
On me parle souvent de la qualité des jpg Fuji qui seraient supérieure au RAF. Il suffit de mettre côte à côte les RAF et JPG à hauts iso pour se rendre compte que les jpg sont bons pour le musée Grévin. C’est plastifié à mort. Il faut donc absolument jouer avec les réglages boîtiers (de nombreux sites d’ambassadeurs Fuji en parlent mieux que moi) au niveau de la netteté et réduction de bruit pour avoir un JPG (à hauts iso, je le répète) au niveau du RAF qui est bien brut par excellence.
Moi qui était JPG Fuji, j’en reviens au RAF malgré la longueur de l’import et traitement.
@ Yves :
C1 a laissé tomber le catalogage depuis l’abandon d’Iview Medio Pro. Par contre, pour le catalogage, je conseille vraiment Photo Mecanic. Ses paramètres XMP sont lus aussi bien par Lr que C1. C’est le digne successeur d’Iview.