Vous sentez ? On entre dans un moment unique de l’année, ce moment où on a envie de se retrouver au coin du feu avec ses potes ou sa famille, échanger des p’tites preuves d’amour au pied du sapin. C’est Noël, la trêve des confiseurs et vous vous demandez comment vous allez vous faire plaisir, cette année. C’est simple. Offrez vous le summum de la photographie argentique incarnée dans un petit boîtier dont l’évocation seule de son nom suscite encore l’émerveillement dans les yeux de tout ceux qui un jour ont approché le monde merveilleux de la photographie : Leica. Ah ! S’offrir un Leica M, c’est un peu graver son nom dans la lignée des géants, c’est entrer de plain pied dans la légende. Mais vous voilà déjà en proie au doute, est-ce vraiment raisonnable, de nos jours, de mettre tant d’argent dans un boîtier argentique ? Pour vous Shots déblaie le terrain et propose d’alimenter à la fois le moulin de vos arguments et de son contraire (avec humour, si possible). Voici donc cinq bonnes raisons de s’offrir un boîtier Leica à Noël. Ou pas.
• S’offrir un Leica M à Noël ? Entrez dans la légende !
1- Parce que Leica, c’est une valeur sûre
Rendez-vous compte. Un Leica M3 de 1955 (l’un des premiers modèles de cette gamme, donc), ça vaut encore près de 700€. Un M6 se négocie autour de 1000€. Au bas mot quatre à cinq fois plus que n’importe lequel des numériques haut de gamme d’il y a cinq ans ! Et encore, je ne vous parle même pas des optiques. Un Summilux 35mm se négocie à prix d’or comme un Grand cru classé. En clair, Leica est un investissement pérenne. Il est probable que le boîtier que vous achèterez d’occasion aujourd’hui, vous pourrez le revendre le même prix dans deux ans. Idem pour les optiques.
2- Parce que Leica c’est l’école de l’exigence
Avec un Leica entre les mains, pas d’états d’âme sur la qualité de l’autofocus et autres billevesées digne des reflex numériques. Ici on ne se demande pas avant la prise de vue le mode qu’on va adopter. Leica c’est du 100% manuel, du cadrage à la mise au point. Leica, c’est le pouvoir du photographe qui est à bord le seul maître après Dieu. Si avec votre Leica M5 vous ratez une photo, ici pas question de faire porter le chapeau à un autofocus qui patine ou à un défaut d’exposition. Si la photo est ratée, vous êtes le seul et unique responsable. Mais… dans le cas contraire, ce que vous avez entre les mains peut s’avérer définitivement unique. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien si vous reconnaissez au premier coup d’oeil un cliché réalisé avec un Leica.
3- Parce que rien, finalement, ne vaudra jamais l’argentique
Éternel débat entre l’argentique et le numérique. L’argentique, c’est physique, c’est palpable, c’est intemporel. Rien à voir (dans tous les sens du terme) avec le numérique qui par nature est dématérialisé. À partir d’un film argentique de qualité, conservé dans de bonnes conditions, on fait ce qu’on veut, dans tous les formats, dans toutes les qualités de papier. On peut même, avec un bon scanner, transformer les clichés argentiques en documents numériques. Et puis l’argentique, c’est une chaîne de traitements qu’on peut faire soit-même et qui s’avèrent souvent aussi passionnants que la prise de vue elle-même. C’est le développement du film, le tirage de planches-contact, d’épreuves, d’agrandissements. C’est le prolongement du plaisir en laboratoire. En fait l’argentique, c’est un autre rythme, un rythme imposé par la photographie elle-même. Pas l’inverse…
4- Parce que la photographie, c’est Leica
Oui, Leica a indubitablement marqué l’histoire de la photographie. D’abord en inventant le format 24*36, ensuite en proposant au fil du temps des boîtiers toujours de plus en plus perfectionnés. Et puis bien sûr l’histoire de la marque se confond elle-même avec l’histoire de la photographie moderne. L’histoire de Leica est jalonnée de photographes mythiques et pour n’en citer qu’un, on retiendra Henri Cartier-Bresson, bien sûr. Le père de l’instant décisif, photographe génial au caractère entier, était un utilisateur intransigeant de la marque Leica. On imagine que nombre de photographes qui utilisent Leica aujourd’hui gardent toujours en mémoire cette prestigieuse filiation.
5- Parce que Leica, c’est intemporel
Le temps n’a pas de prise sur l’acte photographique, surtout quand il est réalisé avec un boîtier Leica. Une ballade dans Paris, un Leica M3 et son Summilux 35mm en main. Le boîtier discret par excellence, ici pas de miroir qui fait un boucan d’enfer, non juste un rideau qui s’ouvre et impressionne la pellicule. On est en 2010 et alors ? Les règles n’ont pas changé. La photo que vous faites aujourd’hui, vous auriez pu la faire il y a cinquante ans, le modus operandi est strictement le même. Rien n’a changé, finalement. Tant que la pellicule argentique existera, vous pourrez prolonger le rêve imaginé par Oskar Barnack, il y a plus d’un siècle…
• S’offrir un Leica M à Noël ? Et pourquoi pas un gramophone ?
1- Parce que Leica ça coûte un bras.
Bon, soyons sérieux. Vous envisagez vraiment d’acquérir un boîtier Leica, vous devez savoir dans quel monde vous mettez les pieds. Le boîtier d’abord. Vous allez probablement vous orienter vers un modèle M. Vous aurez sans doute envie (comme tout le monde) d’un M3, l’appareil mythique des années 60 par excellence. Vous aurez le sentiment de vous frotter aux légendes qui l’ont utilisé, sans perdre de vue que l’œil de Cartier-Bresson n’est pas livré en kit, dans la jolie boîte rouge. Et puis quand vous regarderez la gamme d’un peu plus près, vous vous direz que tout compte fait (si j’ose dire) un M6 un peu plus contemporain, des années 2000, pourquoi pas en version TTL, conviendrait sans doute mieux à vos envies. D’un budget de 600€ pour un vieux M3, vous ferez un bond à 1000€ et plus pour un M6 TTL. Encore un effort et vous aurez un M7 qui intègre une notion d’automatisme qui fait hurler les esthètes et Dieu sait s’ils sont nombreux dans ce petit monde prêts à vous traiter d’hérétique si vous n’utilisez pas le mode manuel. Et puis il vous faudra acquérir une optique et c’est là que le bât vous blessera, plutôt deux fois qu’une. À vous les joies du Summicron 35mm f2 à 2000€. Rassurez-vous. Vous pourrez vous rabattre sur un Nokton SC 35mm f1,4 qui ne vous coûtera « que » 500€. Mais à ce prix-là, vous éviterez de croiser un puriste du Leica qui en a brûlé pour moins que ça. Bref, votre Leica M et son optique d’occasion, c’est au bas mot 2000€. Cher pour du matos photo que vous n’utiliserez sans doute pas. Ou si peu.
2- Parce que l’argentique coûte très cher.
Cher petit monde Leica ! Cher, doux euphémisme. Ça y est, vous avez votre Leica M entre les mains. Vous foncez chez votre revendeur en priant le bon Dieu pour qu’il y ait encore des pelloches à vendre. Vous payez une Kodak Tri X 36 poses à 5 ou six euro. Oui, vous n’allez quand même pas coller une pellicule couleur Fuji dans votre Leica M, grands dieux ! Non, vous allez loger une de ces pelloches noirs et blancs dont le nom seul fait frémir toute la communauté des leicaïstes, des noms qui résonnent comme des codes réservés à des initiés. Car il faut le dire sans ambage, le client Leica a le sentiment de faire partie de l’élite, de participer à la légende. Soit, ça ne me dérange pas, après tout il faut vivre ses rêves et finalement grâce à cette communauté de passionnés, vous êtes assuré de trouver encore de la pellicule pendant les deux décennies à venir. Allez ! Une fois logée la pellicule dans votre Leica M (vous allez voir, rien que ça, ça va vous plaire), vous allez pouvoir goûter aux joies (oh ! Désespoir !) de la prise de vue. Et puis il faudra faire développer la pellicule, faire tirer vos négatifs sur du papier. Et stocker vos négatifs dans des classeurs. L’acquisition d’un bon scanner s’avèrera rapidement utile pour numériser vos négatifs. C’est là que vous commencerez à vous souvenir que la numérique existe…
3- Parce que vous ne l’utiliserez probablement pas.
Vous n’imaginez pas une seconde le nombre de boîtiers Leica disponibles sur le marché en état neuf. À cela plusieurs raisons. D’abord, la clientèle qui achète ce genre de boîtier veut une part de rêve, d’abord posséder un Leica. C’est assez irrationnel mais c’est comme ça. Une fois que ça c’est fait, un certain nombre d’utilisateurs crament quelques pelloches et le boîtier retourne dormir dans sa boîte. Fermez le ban ! Beaucoup d’utilisateurs sont rapidement découragés par les contraintes inhérentes à l’utilisation d’un boîtier Leica, par la démarche intellectuelle également, à une époque où le numérique a définitivement imposé son diktat de la photo immédiate.
4- Parce que c’est un mode photographique très particulier.
Un jour Cartier-Bresson croise Yann Arthus-Bertrand qui porte à l’épaule son EOS 1 équipé d’un gros zoom et lui dit : « avec ça, vous ne faites pas de la photographie« . Avec tout le respect que je dois à HCB, je comprends parfaitement ce que le vieux maître voulait dire avec cette phrase aussi cinglante que définitive. Leica, c’est un mode opératoire qui privilégie le temps, la patience, une certaine dextérité, une bonne connaissance de l’acte photographique. Ici, sur un Leica M6 par exemple, pas question d’autofocus, de visée reflex, de mode automatique (qui ne vient qu’à partir du M7, dernier modèle argentique de la gamme M). Ici, tout se conçoit à la mano et à l’œil, à travers un viseur où le photographe doit composer son cadrage en fonction de la taille de celui-ci, de la taille de son optique. Nombre de photographes qui utilisent Leica trouvent l’expérience enrichissante, voire amusante. Si vous n’êtes pas de ceux-là, relisez le point numéro 3, puis sortez vos kleenex en relisant les points numéro 1 et numéro 2.
5- Parce qu’on est en 2010.
Songez donc que lorsque Leica proposait son M3 à ses clients, Nixon était encore président des États-Unis. La guerre faisait rage au Vietnam et mon cher Larry Burrows cramait pelloche sur pelloche. Leica appartient au passé, au rendez-vous des souvenirs, au rayon des antiquités. Réveillez-vous on est en 2010. Le numérique a pris le pouvoir !
• voir Summilux, le site de référence Leica et son forum d’utilisateurs passionnés.
David dit
:-)))
Tss tss Hervé… la triX se trouve à 3,20 euros env. quand on cherche un peu, ça se développe à la maison avec peu de moyens et ça se tire at home avec un agrandisseur acheté une bouchée de pain sur ebay :-))))
Bon sinon il y a du vrai dans tout ça (mais en occase tu trouves des M6 a bon prix en cherchant bien. J’en ai vu à partir de 660 euros lorsque j’ai commencé à chercher. Quant au TTL, aucun intérêt à prendre ce modèle à mon sens)
Maintenant, si on calcule la durée de vie d’un M6 et celle d’un Canikon… pas de doute, même avec les pelloches, on s’en sort plutôt bien 😀
En tout cas, je larguerai mon 5D mk2 sans l’ombre d’une larme le jour J.
Pour le Leica (ou même le 1V) c’est une autre histoire 😉
Christophe dit
Salut Hervé,
Super article !!
Je me suis effectivement posé ces mêmes questions avant d’offrir un M7 à ma photographe de femme. J’ai offert ce bijou comme cadeau pour la naissance de ma deuxième fille et en remplacement de son son vieux reflex Rollei qui a malheureusement rendu l’âme récemment…
Effectivement ça coûte un bras, et oui l’argentique est aujourd’hui onéreux… Mais bon, une fois que l’on met un oeil dans ce viseur, que l’on déclenche deux trois fois, et bien on se sent faire de la photo, on sent la « présence » de tous ces grands noms qui ont eu un jour un Leica au bout du bras et on a pas envie de les décevoir. C’est vraiment la première fois que je ressens ça !
Bref l’investissement vaut le coup ( et c’est un gros investissement…). Et je suis persuadé qu’il va faire du bien à nos photos. On pose un peu le reflex numérique, on sort un peu du déclenchement qui ne coûte rien et de cet environnement ultra-technique, on fait une pause, on se ressource…
harvey dit
@david aaaah ! Quand même ! J’attendais avec impatience ta réponse et je me disais qu’elle n’allait pas tarder. Toucher de la Tri X à 3,20€ moi je veux bien mais chez un revendeur de Brest que je ne citerai pas elle est à 6,70€ (gloups !). Sinon, la différence entre ton 5D Mark II et ton Leica, c’est que tu ne largueras JAMAIS ton Leica !
@Christophe offrir un M7 comme on offre un bijou à sa femme pour la naissance de sa deuxième fille, je trouve ça merveilleux ! Faire un cliché avec un Leica M, c’est un autre monde, un autre tempo, l’envie de ne pas décevoir comme tu l’écris. Et puis c’est cadré, c’est 36 poses. On ne peut pas mettre à côté, c’est ce que j’ai désigné par l’école de l’exigence…
David dit
6,70 ??? C’est pour cela qu’il y a la vente par correspondance !
Je rentre d’Irlande et le Leica m’a manqué mais je n’étais pas là bas pour faire de la photo, à part des copains qui m’accompagnait 😉
Dans ces cas là, on prend le 5d (le seul l’unique, the vintage one ahah) un 50mm et ça va très bien pour mitrailler !
A +
David dit
qui m’accompagnaient of course !
harvey dit
@David tu es en train de me dire que tu es allé en Irlande te que tu n’as pas amené ton Leica ???
Shocking ! 😉
David dit
Tiens toi bien, j’ai même failli partir sans appareil photo !
Buffalaurent dit
Partir sans appareil photo en irlande, ça tient limite du sacrilège 😉
Bon, faudrait que j’essaye un jour, juste pour voir, un leica. Depuis le temps que je me demande l’effet que ça peut faire d’en avoir un entre les mains…
harvey dit
@BuffaLaurent >Depuis le temps que je me demande l’effet que ça peut faire d’en avoir un entre les mains…
Euh… Je confirme. Passer d’un 1D Mark IV ou d’un D3s à un Leica M6, ça fait bizarre !
A440 dit
Oui.. oui…je me souviens de quelques clichés Leica avec ce velouté(?) (rien vu chez Canon ou Nikon de tel…) des tons froids (vraiment?) et purs…un je ne sais quoi d’unique et ce ptit truc de haute précision distingué, discret au creux de la main ou de la poche…respectueux!
Et puis on (je) reste Nikon(D3s) ou Canon parce que…
Et puis et puis un jour on se prend à réver d’une optique encore plus nette que nette qui pourrait pour jouer avec les plans, pivoter,se décentrer, se désaxer et tiens il faudrait alors aussi pareille possibilité pour le dos,pour ne rien perdre et sans doute un plus grand format pour le « neg »:la lumière sera plus douce encore, le trait plus tranchant..et puis prendre son temps pour tout vérifier, donc travailler sur pied, mais à sa main( même pas drôle!) en gardant ou non l’idée de sa photo,évoluant avec le temps; mieux: faisant le temps; faisant le temps pour une photo qui l’arrêtera,ou plutôt qui le fera vivre plus longtemps et pour plus.
..Un autre chemin pour d’autres contrées,certains l’ont déjà emprunté(ça vous rappelle quelq’un? pardon…Monsieur Quelqu’un!);non celui-ci c’est peut-être le mien..un jour.
Aujourd’hui c’est Noël,le père noël n’est pas passé pour moi comme pour plein d’autres, mais puissions-nous avoir le courage de réaliser nos rêves!Car ils sont beaux!
harvey dit
@A440 hier soir alors que je rentrais à la maison, je suis passé sur un pont, éclairé par des illuminations de Noël. Dehors ça pincait dur, mais je me suis quand même arrêté, histoire de taper quelques clichés avec D3s qui est vraiment un oiseau de nuit. Le résultat est bluffant, avec cette hallucinante capacité à sublimer les rares parcelles de lumière qu’il capte. Alors Leica, moi je veux bien, mais quand on voit ce qu’on peut faire aujourd’hui avec un reflex comme le D3s, y’a pas… Ça donne envie !
Fabrice Bacchella dit
Sauf qu’un autre vieux con a du sortir la même chose à HCB quand il a vu qu’il se baladait avec de la pellicule 24 x 36 et pas un appareil à plaque. Et il lui a sorti le même laïus sur la lenteur, la précision, la réflexion et que sais-je encore comme avantage de la plaque sur la pellicule 24×36.
Où quand la nostalgie devient de l’obscurantisme.
harvey dit
@Fabrice « Ou quand la nostalgie devient de l’obscurantisme. » Ouaip, bien vu ! J’imagine même pas la scène où HCB se serait fait remonter les bretelles, aïe ! Sacré Henri, héros de mon enfance.
A440 dit
euuuuuuuu,pour moi ce serai plutôt fromage et dessert…(et le c.. de le crémière si elle le veut bien)…siouplé!
A440 dit
et pour ceux qui n’aiment que les fromages ou les desserts (….souvent aussi on pourrait dire par….nécéssité), une ptiote astuce:
http://www.galerie-photo.com/hasselblad-canon.html
de cet article ayant déjà le d3s…LLLLLinhôôôf???
ce sont ainsi deux types d’images(et de plaisirs) différents..
Buzzz dit
Un article au ton plutôt sympa, mais pourquoi toujours les mêmes lieux communs usés jusqu’à la corde sur Leica et ses utilisateurs ? C’est beau les légendes, mais la réalité est différente, et heureusement.
Le télémétrique c’est juste une façon différente de photographier, tout comme utiliser une chambre, un moyen format ou un boîtier panoramique offrent encore d’autres sensations et d’autres résultats. Ce n’est ni archaïque ni snob, c’est simplement un autre outil. Et certains (beaucoup) utilisent même des réflex numérique en parallèle de leur M. Si, si…
Et au passage pas sûr que remplacer son réflex numérique à 1500/2000 euros tous les 3 ans soit plus rentable qu’utiliser un M (ou tout autre boîtier argentique de qualité) et de la pellicule.
harvey dit
@Buzzz ah ok, bon alors euh j’explique, c’était justement le ton du billet, le côté un peu suranné, teinté de gentille ironie. Un peu comme une discussion de café du commerce opposant deux avis qui finalement se rejoignent. Acheter un Leica, c’est une façon différente de photographier, c’est un autre monde. De toutes façons, je ne ferai jamais avec un Leica M les clichés que permet mon D3s avec un 300 f2,8. Et je ne traverserai pas Paris avec la même insouciance, la même désinvolture légère avec mon gros reflex lourd autour du cou qu’avec mon Leica M6 et son Summicron 35 f1,4. Pour ma part, je n’aurai sans doute jamais de Leica. Si j’en avais un, ça serait un M3. Je le poserais sur une étagère et chaque fois que je le verrais, je me souviendrais d’où je viens. Comme un hommage à mes pères, Cartier-Bresson, Lartigue. Et Larry Burrows.
Buzzz dit
Pas de souci… il faudrait arrêter de voir seulement dans le M un accessoire de prestige et destiné seulement au paraître de son propriétaire. Bien sûr il y a les séries limitées, les versions Titane, Platine et autres, plutôt destinées aux collectionneurs (versions qui apparaissent parfois également dans les marques japonaises d’ailleurs). Et il existe bel et bien des snobs qui affichent leur matériel photo comme un trophée, ou comme une sorte de signe d’appartenance. Mais ce phénomène n’est pas (n’est plus ?) réservé à Leica : on voit la même chose aujourd’hui avec des modèles haut de gamme Canon, Nikon… achetés par des personnes incapables de les maîtriser, mais dont le prétendu statut social ne s’accorderait pas avec un « vulgaire » compact (vu de mes yeux dans une Fnac).
Aujourd’hui beaucoup de Leicaïstes sont d’abord des Nikonistes, Canonistes, Pentaxistes… qui ont aussi un M, souvent acheté d’occasion en plus d’un réflex numérique. D’autres préfèrent un moyen format en plus de leur équipement réflex « classique »… Ce n’est qu’une histoire de goûts, et plus vraiment une histoire de sous.
Bon il y a bien le M9, numérique et hors de prix, mais il n’est pas plus inaccessible qu’un Nikon ou un Canon Pro dont il partage le créneau et la clientèle…
Quant au M3, j’en possède un depuis quuelques mois, associé à un vieux 50/2.8, achetés pour pas trop cher (j’ai payé le M3 dans les 400 euros). Ca marche très bien, c’est magnifiquement construit et c’est un matériel vraiment attachant au final. Mais un M3 (ou un Fm2, un Hasselblad etc.) ça sert à faire des photos, pas à prendre la poussière sur une étagère. Une pellicule (si, si, on en trouve encore) et c’est parti ! Une seule sensibilité par film, un diaph, une vitesse, un cadrage et c’est tout… Pas de menus, d’écran, de réglages interminables… juste se concentrer sur la photo, sans se laisser distraire par quoi que ce soit d’autre.
Et la morale de l’histoire, c’est que depuis que je refais un peu d’argentique de temps en temps, j’ai réappris à réfléchir à l’exposition, à penser plus au résultat (l’image) qu’au matériel. Quand je prends mon Nikon numérique, je le laisse moins réfléchir à ma place, j’essaie de ne pas me laisser distraire par toutes ces fonctions et autres automatismes et mes photos n’en sont que meilleures au final.
harvey dit
@Buzzz « il faudrait arrêter de voir seulement dans le M un accessoire de prestige et destiné seulement au paraître de son propriétaire. » On ne peut pas négliger qu’il y ait, dans le fait de « posséder » un Leica, une part sans doute importante de clients pour lesquels ce paramètre soit très important. D’ailleurs finalement la marque Leica en joue assez subtilement, comme toute grande marque de prestige. Il n’est pas de hasard si l’on trouve sur le marché une pléthore de boîtiers Leica argentiques en état neuf, ayant cramé moins de cinq pellicules.
Bon pour conclure, parce que finalement, no offense mais ce débat, s’il m’intéresse, me concerne assez peu. Si j’avais un M3, il serait sur une étagère dans une vitrine, à l’abri de la poussière. C’est bien le moins que je doive à mes illustres aînés. J’ai encore mon F1, avec son 55 f1,2 asph, il y a une TriX dedans depuis des mois, Dieu seul sait quand je la finirai. Mon boîtier principal désormais est un D3s. Avec lui je vais au bout de mes nuits (et il me suit), je peux taper la matin à 200 iso et finir ma nuit à 12800. Les menus, je n’y touche guère, l’écran LCD je ne le regarde que rarement (trop trompeur), les réglages euh… Ça n’a pas changé depuis que je suis photographe. Délicat équilibre entre la lumière et une sensibilité, une focale, un diaphragme, une vitesse et comme disait mon cher Henri, mon index masturbateur. Quand je shoote, je suis le seul maître après Dieu.
J’ai retrouvé des photos de famille récemment, je réalise que sur quasiment toutes les photos j’avais un reflex autour du cou. J’étais pas bien grand mais déjà j’étais fier comme Artaban et je n’ai jamais perdu le goût de ça. L’envie de faire des photos.
DarkSchneider dit
Cher Harvey,
J’ai eu la chance de commencer la photo par un Nikon FE, qui m’est ensuite tombé en rade dans les mains, en plein été indien sur la route napoléon (Rien à f… de Napoléon, mais cette route est sacrément jolie à cette saison), panne d’obturateur.
Ensuite j’ai acheté des nikons D50, D70, D200 ….) et un jour j’ai voulu apprendre la photo argentique … J’avais le choix entre un F100 (une merveille) à 450 € ou … Un M6 à 1300 (avant la chute du mur..euh des prix…) J’ai pris le M6, avec un summicron de 50 rentrant, de 1956.
Je pensais savoir ce qu’était la photographie, et bien non. Sincerement, même si le leica ne peut faire ce que le Nikon, ou n’importe quel reflex fait (un Leica M ne peut pas faire les memes choses qu’un Leica R), c’est un plaisir, un délice, une passion à utiliser. Ce que tu dis avoir retrouver avec le Nikon D3S, je le vis avec le M6. Je n’arrive pas à trouver cette passion avec mon D700, pour moi un peu trop usine à gaz, et, peut etre est ce mon inexperience, mais, je trouve que les automatismes ont tendances à distraire parfois, plus qu’à aider, meme s’il faut bien le reconnaitre, le Leica M6 en photo de concert, faut oublier….. Tandis que le D700, saloperie de merde de boitier, ca marche qd meme du tonnerre de dieu 🙂 Je te jalouse, toi et ton D3s, un jour je l’aurais :p Mais n’empeche ….. Un M6, meme si ca coute un bras, c’est quand un sacré plaisir…. De plus, ca ne t’explose pas l’épaule, ca se cache facilement sous la veste, et le klotok de l’obturateur est qd meme bien plus discret que le tchac tchac du Nikon….. et l’absence de miroir permet de faire des photos à mains levée au 50 au 1/4 de seconde…. Je doute que ca soit faisable avec le D3s. Mais bon, ce sont deux mondes différents, des outils pour des besoins différents. M’enfin, Leica, c’est comme la bonne bouffe. Le jour où on ne pourra plus y gouter, on regrettera d’avoir cracher dans la soupe.
harvey dit
@DarkSchneider un M6 ça ne coûte pas un bras quand même ? Un bras c’est un peu plus de 1000€ non ? Bon j’avoie avoir un peu de mal avec le prix du bras, de l’oeil et de la couille… Bon sinon quand un M6 avec sa TriX poussée à 1600iso tente de faire des photos au 50 à 1/4 de seconde, avec D3s on est à 1/100e f4 et 12800iso, non non, on ne se moque pas. Bref outils différents, mais besoins identiques. Faire des images. Je pense qu’on en a encore pour vingt piges minimum à pouvoir faire de l’argentique. Les labos finiront par disparaître, les uns après les autres. Les produits aussi. Sauf qu’on a un exemple, avec Polaroid. On pensait que c’était mort et puis Impossible project et une communauté de passionnés a relancé le truc. Donc quand les experts nous disent 20 ans d’argentique, je me dis que rien n’est joué. Il y aura peut-être un revival. Si ça se trouve, dans vingt ans, le chic absolu sera de shooter en argentique ?
Buzzz dit
« Bon sinon quand un M6 avec sa TriX poussée à 1600iso tente de faire des photos au 50 à 1/4 de seconde, avec D3s on est à 1/100e f4 et 12800iso, non non, on ne se moque pas. »
Déjà, avec un M on ne « tente » pas de faire une photo au 1/4 de seconde, on y arrive sans problème. Et l’intérêt des vitesses lentes n’est pas de faire des photos à tout prix avec une pelloche poussée à mort. Ca c’est fini depuis longtemps (on est en 2011). L’intérêt des vitesses lentes, c’est qu’on photographie autre chose au 1/4 de s qu’au 1/250 s, et qu’avec un M c’est possible à main levée sans prise de tête. Cela fait partie des choses qu’un télémétrique peut faire et un réflex pas. Et puis tous les utilisateurs de M argentique d’aujourd’hui ou presque ont autre chose dans leur musette pour les situations de prises de vues extrêmes (D3, D700 etc.).
Faire de l’argentique en 2011 n’est pas un acte de résistance ou passéiste, c’est seulement rechercher un autre rendu : par exemple pour un rendu TriX, après moult essais à partir de fichiers de D700 et divers plugins, j’ai fini par revenir à de la vraie TriX + scanner de films, tout simplement parce que c’est meilleur. Ce qui ne m’empêche pas de sortir le D700 + 24-70/2.8 AFS pour le reste.
harvey dit
@Buzzz Non. Au quart, on y arrive pas « sans problème ». Souviens-toi de tes premiers cours de photo où on t’expliquait qu’en dessous de 1/30è on entre dans le domaine de la problématique. Un quart c’est un quart, c’est casse-gueule avec n’importe quel boîtier, même s’il y a écrit Leica dessus. Mais finalement, je te rejoins sur le fait que chacun voit midi à sa porte. L’important c’est d’être heureux dans ce qu’on fait, d’être en adéquation avec son outil et d’aller là où on veut aller.
David dit
Et non Harvey, 1/4 c’est pas 1/4 pour tous les boîtiers.
Le Leica n’a pas de miroir qui fait des flips flops avec un amortissement engendrant des vibrations.
Sur le M6, je suis net dans 90% des cas au 1/8 de seconde et dans 50% des cas au 1/4 de seconde.
Sur un réflex, c’est un autre problème 🙂
Cocagne dit
Pas le feu au lac