Au risque de me répéter, chaque fois qu’on me parle de noir et blanc je pense à Sabine Weiss. Je pense aux propos tenus par cette photographe dont le talent n’a d’égal que son sens de l’humour parfaitement affûté. Je repense à son regard plein de malice lorsque je l’avais rencontrée. Elle avait évoqué ses souvenirs, la période faste des années d’après-guerre lorsqu’elle travaillait pour les magazines de mode de l’époque. C’est à cette occasion qu’elle avait eu cette phrase pleine d’ironie et de désinvolture, arguant qu’elle adorait travailler en noir et blanc parce que, disait-elle, c’était plus facile. Plus facile le noir et blanc ? Comme j’aimerais y croire. Non, travailler en noir et blanc n’est pas plus facile que travailler en couleur et pourtant ! Quand je vois passer un nombre impressionnant de photos en noir et blanc, je me dis que les légendes ont la vie dure. Enfin, quand je dis noir et blanc, on se comprend hein ? Virage monochrome dans Photoshop ou Lightroom, un coup de clarté, de contraste, pour avoir des noirs bien noirs et des blancs bien blancs et emballé c’est pesé. Tout ce que déteste, à dire vrai. J’ai écrit et répété, notamment dans un article écrit il y a un bail, qu’il ne faut pas espérer rattraper le coup, simplement en passant une photo couleur en noir et blanc. Une photo médiocre en couleur restera une photo médiocre en noir et blanc, mais rassurez-vous, l’inverse est vrai. Il ya quelques années, j’avais demandé à une jeune photographe de m’expliquer pourquoi elle avait traité sa série de photos en noir et blanc. J’attends toujours la réponse. Finalement, le noir et blanc, c’est pas très compliqué. En revanche, ce qui l’est, c’est tout ce qu’il y a entre le noir et le blanc, entre gris clair et gris foncé. Vous voulez faire du noir et blanc ? Vous voulez exprimer votre rapport à la photographie ? Achetez-vous un reflex argentique et une pellicule Kodak Tri-X 400. Par contre, si votre idée c’est de traiter en noir et blanc ce qui sort de votre reflex numérique, nativement en couleur, c’est une autre paire de manche. C’est là où le bouquin publié par Eyrolles Photo peut vous aider…
Noir et blanc et photo numérique, le guide indispensable
• Bachelier. Paroles d’expert.
Quand j’ai ouvert l’enveloppe et que j’ai découvert le titre du nouveau bouquin publié chez Eyrolles Photo, j’ai d’abord souri. Le guide pratique noir et blanc numérique. Avec un macaron rouge indiquant 160 pages d’aide et de conseils pour tous. Ma première réaction, amusée j’en conviens, a été de me dire que ce livre était une bonne idée. Après tout, si ça peut aider des photographes à comprendre la complexité du problème de la photographie en noir et blanc, pourquoi pas. Il faut admettre, de surcroit, que le livre étant publié chez Eyrolles, dont je ne cesse de vanter ici la qualité des choix éditoriaux, est plutôt bon signe. C’est là que j’ai découvert le nom de l’auteur, Philippe Bachelier et là, on passe tout de suite dans une autre dimension. On doit à Bachelier un travail de référence sur la photographie en noir et blanc, notamment un ouvrage qui est, selon moi, un titre de référence en la matière, publié il y a une dizaine d’années chez Eyrolles et intitulé sobrement Noir et Blanc, de la prise de vue au tirage (en vente sur Amazon). Si vous faites de la photographie en noir et blanc argentique, que vous vous intéressez au développement des pellicules, au tirage papier, c’est LE livre que vous devez absolument avoir dans votre bibliothèque. Bref, quand j’ai vu le nom de l’auteur, j’ai su que je tenais là un bon bouquin. La suite m’a donné raison.
• Pourquoi en noir et blanc ?
Dès l’avant-propos Bachelier donne la mesure et pose cette question que je posais moi-même en préambule. Pourquoi en noir et blanc ? « Les possibilités du numérique donnent souvent le vertige à cause de la foison des menus d’un appareil photo ou d’un logiciel de traitement d’image. L’ambition de ce guide est de baliser la route du photographe qui souhaite explorer l’univers du noir et blanc, de la prise de vue à l’impression. » En une phrase Bachelier pose le problème et avertit le lecteur. Oui, les possibilités sont quasi infinies, comme autant de nuances de gris. Non, la photographie en noir et blanc n’est pas une solution de facilité. Je ne peux que repenser aux propos de Sabine Weiss, grande dame malicieuse, avec un zeste de cynisme. Ce qu’elle oubliait de préciser, c’est que le noir et blanc c’est plus facile quand on est un photographe de son calibre et qu’on a cette capacité à voir l’image en noir et blanc. C’est d’ailleurs sur ce postulat que Bachelier choisit d’ouvrir les hostilités, sur cette capacité à visualiser l’image en noir et blanc. J’en reviens à cette photographe qui n’avait pas su répondre à cette simple question. Pourquoi en noir et blanc ? Dans son cas, c’était sans doute un pis aller, un faute de mieux ou pire. Faire du noir et blanc parce que c’est tendance et que ça fera genre ? C’est très compliqué de visualiser une image en noir et blanc quand nos yeux voient en couleur. C’est pourtant la base de la démarche, c’est aussi une problématique à laquelle Bachelier apporte quelques clés. Pas de solution miracle, si ça existait ça se saurait, mais des clés.
La visualisation, cette capacité à visualiser une image, naturellement en couleur, en noir et blanc et et nuances de gris, ça n’a rien d’aisé. Elle s’acquiert au fil du temps, avec une pratique assidue du noir et blanc ou alors on l’a en soi. Dans ce cas, on s’appelle Ronis, Doisneau, Lartigue, Weiss, Avedon, Arbus, Cartier-Bresson, Salgado, … Le numérique permet aussi de visualiser l’image en temps réel sur l’écran arrière du boîtier en optant pour le mode monochrome, voire en utilisant un filtre physique qui permet d’évaluer la luminosité et les nuances d’une scène. Bachelier conseille aussi d’apprendre de ses erreurs, en passant systématiquement ses photos en monochrome dans son logiciel de traitement comme Lightroom ou Capture One Pro, sans leur appliquer un quelconque traitement. Le chemin est long et complexe et seul l’apprentissage permet d’exercer son regard à la photographie en noir et blanc.
• En conclusion
Avec son guide pratique du noir et blanc numérique, Philippe Bachelier ne prétend pas donner des recettes miracles. D’ailleurs il cite en préambule le photographe anglais Bill Brandt qui disait « la photographie n’est pas un sport, il n’y a pas de règles. » Pas de règles certes, mais l’approche de certaines techniques photographiques peut s’avérer sportive à bien des égards et c’est le cas dès qu’on s’attaque à un sujet aussi ardu que la photographie en noir et blanc. Ces techniques ne s’improvisent pas et c’est justement à ce titre que l’expertise de Philippe Bachelier se révèle aussi intéressante que judicieuse. Ce guide va vous permettre de comprendre, de mettre en œuvre des outils. En utilisant les formats adaptés (comme l’indispensable format RAW), en maîtrisant au mieux les réglages de votre reflex en matière d’exposition (on y revient toujours), de compréhension de la lumière, de composition, de choix du point de vue, des lignes, des motifs, des contrastes. Avec ce guide pratique, Philippe Bachelier démontre qu’en matière de photographie noir et blanc, il connaît et maîtrise parfaitement le sujet, mais ça on le savait déjà. Ce livre est à conseiller à tous les photographes souhaitant aborder la problématique de la photographie en noir et blanc, quelque soit leur niveau d’expérience. Un livre indispensable pour comprendre et progresser dans la maîtrise de cet art délicat qu’est la photographie en noir et blanc.
• acheter le guide pratique de Philippe Bachelier sur Amazon
Parque dit
Commandé ! 🙂