Salon de la photo 2015. Des sourires pour oublier la crise.
Vendredi 6 novembre 2015. J’arrive à la Défense par le RER A, je saute dans le tramway direction Porte de Versailles. Il fait un temps exceptionnellement doux sur Paris, pour un peu on pourrait se croire au printemps. Un agent de la RATP se fend d’un cordial « Bonjour Monsieur, bonne journée ! » Une journée qui s’annonce sous les meilleurs auspices, donc. J’aime bien le tram à Paris, qui voyage en aérien. Station Jacques-Henri Lartigue, je suis presque arrivé. Que le premier héros photographe de mon enfance ait donné son nom à une station de tramway, ça me fait toujours un petit plaisir, chaque fois que j’y passe, une fois par an. Me voici arrivé au salon de la photo 2015. De ma besace Nikon je sors mon D750 sur lequel je monte Nikkor 24-120mm. Ce n’est pas encore la grande affluence à l’entrée, mais on est vendredi. Parmi les visiteurs on compte pas mal de professionnels. Premier arrêt au vestiaire pour y déposer ma veste (2€), une précaution utile tellement il fait chaud. Coup d’œil à 180 degrés, ils sont venus, ils sont tous là. Salon de la photo 2015, c’est parti pour un marathon qui va durer huit heures.
• Nikon, Canon, Fujifilm, Sony, Leica. Et Elliott Erwitt.
Le salon de la photo 2015 c’est le meilleur endroit pour repérer les tendances, découvrir les nouveaux matériels tout en regardant des expos. L’année dernière j’avais zappé Sabine Weiss, cette année je ne raterai pas Elliott Erwitt et ses clichés définitivement remarquables. Premier arrêt pour saluer les membres de l’agora du net, parmi lesquels on compte Nikon Passion et les allumés de Dans ta cuve, amateurs de cristaux d’argent. Sur le stand de l’agora, qui propose des conférences thématiques, je vois Julien « Change face » Gérard qui explique à un public attentif comment réussir une campagne de crowdfunding. Au centre du salon, c’est le face à face des deux géants, Canon et Nikon. La marque rouge a opté pour la rondeur, la marque jaune fait dans le carré. Chez Nikon, une animation assez bluffante propose aux visiteurs de se faire shooter dans une arène entourée d’une batterie de D800, pour une animation de type Matrix du plus bel effet. Le modèle reçoit son panoramique 3D sur son email en temps réel. Les visiteurs se prêtent avec enthousiasme à l’exercice, drivés par un preneur d’image aussi photogénique que sympathique. Sur mon chemin, je croise le stand Leica, tout en sobriété teutonne. Une affiche annonce la couleur : « Leica M240 avec Summilux M1,4/50 Asph. Prix public : 10 010€. Un rêve à portée de main. » Ça doit être de l’humour germanique. Un constat, tout de même. La moyenne d’âge des visiteurs du stand Leica me semble singulièrement plus élevée qu’ailleurs. Sur le stand Fujifilm, j’aperçois un cliché de Gérald Géronimi. Une conférence, animée par le sémillant Fabrice Abuaf, va démarrer. Rapidement un noyau d’amateurs se forme pour assister à une véritable performance. Fabrice évoque la gamme X avec des mots choisis, évoquant sa gamme de « reflex hybrides », déroulant l’argumentaire estampillé Fuji. À l’occasion, il faudra m’expliquer ce qu’est un « reflex hybride ». Le public est attentif, conquis d’avance. Il faut dire que Fujifilm est dans la tendance, récupérant habilement des codes de design qu’ils n’ont pas eu à aller chercher très loin. Dans ma ligne de mire, alors que Monsieur Fuji déroule ses arguments avec un enthousiasme communicatif, j’aperçois le logo Leica. Les conférences, présentations produits se succèdent, sans interruption. Sur le stand Nikon un photographe animalier parle de baleines, pendant que sur le stand Sony un orateur anglais réalise des shootings avec un modèle, devant un parterre de photographes qui mitraille à tout va. Bienvenue au Salon de la photo 2015.
• Lomography, au rendez-vous des souvenirs
Sur le stand Zeiss, un buste de femme trône dans un parterre fleuri. La pauvre semble s’emmerder gravement devant tous ces afficionados qui défilent devant elle pour la shooter. Finalement, je ne regrette pas d’avoir amené Nikon D750, le Salon de la Photo 2015 est une occasion unique de réaliser des photos, de capturer homo photographis dans son milieu naturel. Sur le stand Canon ou Nikon, les visiteurs peuvent rêver d’engins et de cailloux monstrueusement performants et shooter à 11fps des cibles imaginaires. Le salon de la photo 2015, c’est comme à la foire, on peut faire un tour sur un EOS 1Dx ou un Nikon D4s monté comme un mulet, sauf qu’ici c’est gratuit. Bizarrement, sur le stand Sony, ce n’est pas l’affluence des grands jours. il n’y a quasiment personne, à ma grande surprise, pour toucher ou essayer Sony Alpha 7RII. De nombreux stands proposent des tirages print art ou la création de livres-photos, un marché en pleine expansion. Je passe sur le stand Lomography, une marque pour laquelle j’ai une grande affection. Que ce soit sur la gamme Lomo argentique ou Instant, ici tout respire ce petit grain de folie, d’imaginaire et de magie propres à la photographie et à cette marque. C’est l’occasion aussi de découvrir la gamme d’objectifs Petzval, couleur laiton qui ne laisse aucun visiteur indifférent. Des optiques incroyablement sexy qu’il faudra absolument que j’essaye un de ces jours. Hipsters, geeks, photographes passionnés, tous se bousculent poliment pour toucher le cultissime Lomo. Décidément, la nostalgie, ça n’a pas de prix. Je passe jeter un œil aux nouveautés Lowepro, qui est ma marque de sac photo de prédilection depuis un bail. Une nouvelle gamme dédiée aux drones (tendance quand tu nous tiens) ainsi qu’une valise à roulettes particulièrement bien conçue côtoient les classiques fastpacks et slingshots.
• Nikkor 24-70mm f/2,8 VR, nouveau joyau de la couronne
Retour vers le stand Nikon où je découvre les clichés hallucinants de lieux abandonnés. Le nom du photographe* m’échappe mais ses clichés eux ne sont pas prêts d’être oubliés. La Nikon School est présente et propose dans un espace clos des sessions éducatives, l’occasion de découvrir les formations nombreuses et variées de cette vénérable institution. Pause jus d’orange pendant que les visiteurs se prennent pour Nemo de Matrix, l’occasion de découvrir – enfin ! – le nouveau joyau de la couronne, Nikkor 24-70mm f/2.8 VR, séquence émotion. Monté sur D750 (et a fortiori sur D810 ou D4s), voilà un caillou qui promet de somptueuses perspectives. C’est toujours un peu frustrant de monter un matériel de ce calibre sur un salon, mais comme je découvre un bon de prêt à mon nom dans la housse, je sais que l’optique va m’accompagner à mon retour à Brest. Je vais donc avoir l’occasion de tester ce petit bijou dans les grandes largeurs sur mon D4s. La lentille frontale de 82mm de ce nouveau Nikkor 24-70mm f/2,8 VR est déjà une promesse et dans le viseur, à première vue, mazette ! Ça ne déçoit pas. Bizarrement, je ne parle pas des produits à venir avec mes interlocuteurs mais quand même, je ne peux pas m’empêcher d’évoquer Nikon D5 et l’accouchement prochain. Comme toujours, silence radio de rigueur, mais je suis sûr que l’enfant se présente bien…
[*Edit : renseignement pris il s’agit de David de Rueda]
• Canon XC10, la gifle en 4K
Je n’ai que l’allée à traverser pour aller saluer mes amis de Canon France. C’est la fin de la journée et je suis épuisé. On parle de photo chez Canon mais aussi naturellement de la convergence photo-vidéo, un axe dont la marque rouge est l’un des grands initiateurs, l’un des leaders aussi. Sur les écrans je vois défiler des images d’une beauté stupéfiante et alors qu’on parle de vidéo en 4K mon interlocuteur me présente Canon XC10. On dirait un appareil photo mais c’est un camescope professionnel filmant en 4K, équipé d’un capteur CMOS 1, optique fixe avec un range de dingue (24-240mm équivalent 35mm, f/2.8 à 5,6), poignée orientable, viseur adaptable. Cette petite merveille sait (presque) tout faire en vidéo, à commencer par engranger du 4K, sensible de 500 à 20K iso, légère (1 Kg), enregistrement sur carte CF fast ou directement sur enregistreur externe, wifi pour télécommande à distance, capable de gérer l’AF et les paramètres en mode manuel en temps réel, performante sur les hautes lumières, écran orientable et tactile… En revanche, le zoom reste manuel, même si la fonction de motorisation du zoom n’est pas un argument définitif pour de nombreux vidéastes. Reste le prix, 2000€, un budget finalement très attractif pour une caméra capable de cracher du 4K. Et on notera la capacité de Canon XC10 d’extraire des images fixes de 8Mo de son flux vidéo. Bref, pour moi Canon XC10 est la grande révélation vidéo de ce salon de la photo 2015.
• L’heure du bilan. C’est dur aujourd’hui peut-être…
En quittant le salon, j’ai la chanson d’Higelin dans la tête. C’est dur aujourd’hui peut-être, mais demain, ah ! Demain ça s’ra vachement mieux, ce qui n’est, je le crains, pas du tout évident. Car le secteur de l’industrie photo est salement en crise. Les chiffres de ventes sont en net recul, tous segments confondus. La faute aux smartphones et aux tablettes ? Ça ne fait pas l’ombre d’un doute. Un périphérique qu’on a toujours sur soi, capable de faire de bonnes photos ou vidéos sans prise de tête, de les partager en temps réel sur les réseaux sociaux en temps réel sans manipulation supplémentaire ou contraignante, qui vous permet en plus d’écouter de la musique, de surfer sur le net, de gérer votre agenda et accessoirement de téléphoner, difficile de lui résister. Résultat ? Recul des ventes d’appareils photo de 30% de l’année dernière à 2015 et des prévisions pour 2016 qui ne sont guère réjouissantes. Ce qui est nouveau, c’est que le segment des reflex souffre également de la crise. Rythme de renouvellement moins soutenu, conditions économiques difficiles sans parler de la crise qui frappe directement les photographes professionnels. Reste le noyau dur, les photographes passionnés qui continuent de soutenir ce secteur à bout de bras. La nuit est tombée sur Paris, il est temps de quitter la Porte de versailles et le salon de la photo 2015. Dernier coup d’oeil sur le joli visuel de l’affiche. Le rendez-vous est déjà noté pour l’année prochaine. Rendez-vous au salon de la photo 2016.
• un merci particulier à Nikon France, Canon France, Lomography, Fujifilm France pour leur accueil.
Grégory dit
Merci Hervé pour ce retour !
J’étais le même jour que vous au salon, j’ai aussi été surpris par le peu d’attraction généré par le stand Sony en fin de matinée / début d’après-midi… Mais il s’est considérablement remplis par la suite, surtout autour de la famille A7 !
Au plaisir de vous croiser l’année prochaine.