Ne me demandez pas de vous expliquer les règles du football américain, je n’y comprends rien. Je sais seulement qu’une poignée de gars, arnachés comme des membres de la garde impériale façon Star Wars courent après un ballon ovale pour tenter de l’amener dans la ligne de but adverse. Le match se déroule en quatre quarts temps de quinze minutes, le jeu s’arrête toutes les deux ou trois minutes, avec des phases d’attaque et de défense et les joueurs se foutent sur la gueule, même quand la balle n’est pas dans les parrages. Bref. Un jeu de mecs casqués, aux épaules larges, un truc assez emmerdant à regarder (sauf sans doute pour les initiés) mais parfaitement photogénique. Le cadre idéal pour un premier test terrain du nouveau reflex plein format signé de la marque jaune, Nikon D750. J’ai monté mon Nikkor 70-200mm f/2.8 VRII et me voilà paré.
Nikon D750, à l’épreuve des balles.
• Ergonomie. C’est du Nikon.
Premier constat, que j’avais déjà noté à la sortie du boîtier, la préhension de ce reflex est tout à fait particulière en ce sens où la prise en main est nettement plus profonde qu’à l’accoutumée. On sait que Nikon a intégré du carbone sur la face avant et le traditionnel alliage de magnésium sur la face arrière, mais l’emploi du carbone a impliqué un redessinement du schéma général et un gain en terme d’épaisseur et de poids. Ça se ressent sur la prise en main, quant au poids, c’est une plume si on le compare à D3s ou D4s. Justement, puisqu’on parle de boîtier pro, quand on en vient, comme c’est mon cas et qu’on arrive sur un type de boîtier comme Nikon D750, c’est un peu la pagaille pour retrouver ses repères. Finalement j’ai juste besoin de régler quelques trucs essentiels, comme la sensibilité iso, le mode expo, le mode AF, le diaph, la vitesse. Je suis un peu agacé de ne pas trouver mes réglages, comme sur D3s où tout est parfaitement limpide. Je finis par appuyer sur le bouton Info et là tout s’éclaire. Pour le test, je me la joue mode zen. Je pousse la molette à 1600iso (je déteste le mode iso automatique), priorité vitesse (1/1000e), mode rafale à bloc (soit 6,5fps), AF continu, mode AF groupé. Je vais jouer aussi avec le recadrage DX. Avec un capteur de ce calibre (24mp), on va pas se gêner.
• Autofocus. C’est du Nikon.
Premier contact avec mon œil gauche, le viseur. Rien à dire, en fait je ne vois quasiment pas de différence avec un viseur de D4s, sauf peut-être qu’il y a moins d’information. En haut à droite il me signale que je suis en mode DX mais ça c’est facile à constater avec le cadre apparent. Je suis en mode AF groupé et le premier constat c’est l’extrême vélocité de l’autofocus. Bon, en même temps, la réputation de l’optique que j’ai associée à Nikon D750 n’est plus à faire, l’occasion de répéter qu’il faut toujours associer d’excellentes optiques à de bons reflex, surtout avec du fullframe. Que dire de l’autofocus de D750 ? J’ai en mémoire la réflexion faite par un membre de Nikon Pro, quelques jours avant l’annonce de D750. Il me confiait, en substance, que l’AF de Nikon D750 était peut-être ce qui se faisait de mieux dans la gamme Nikon. Euh… Meilleur que D4s ? « À toi de juger ! » Sur le terrain, j’ai vite oublié la nature du reflex que j’avais entre les mains. Mon index appuie sur le déclencheur et même le son du déclenchement a été optimisé. On est passé du tac-tac sec de D3s à un flap-flap particulièrement doux. Ergonomie soignée, prise en main facile, mais finalement tout ça, c’est du bla-bla. Ce qui rend ce reflex unique, je le répète, c’est la vélocité de son autofocus et il faut se rendre à l’évidence. Nikon signe avec D750 l’aboutissement d’années de recherche en matière de mise au point automatique. Certes, j’ai bien conscience de risquer l’excommunication en écrivant que l’AF de ce modeste reflex vaut celui de Nikon D4s mais c’est un fait. Je ne crains pas de dire qu’il le vaut et même – soyons fou ! – qu’il le surpasse. Car Nikon D750 ne se contente pas de disposer d’un AF performant. Il intègre de surcroît tous les outils qui permettent d’optimiser la prise de vue, prenant le meilleur des deux grands frères, D4s et D810. En plus d’un autofocus premium (c’est un héritage de famille) Nikon D750 embarque aussi le mode AF groupé et le mode de mesure hautes lumières. On notera juste l’absence des sous-définitions RAW, qui demeurent l’apanage de D4s et de D810. Mais sinon, l’essentiel est là.
• Prise de vue. C’est du Nikon.
Si je devais résumer ce petit reflex en un seul mot, ça serait véloce. Par contre, du point de vue de l’ergonomie, je ne suis pas très fan de l’écran orientable, d’abord et surtout parce que je ne bosse jamais en liveview. J’imagine que les adeptes de vidéo vont adorer ça, d’autant que Nikon D750 est particulièrement bien fourni en matières d’options vidéo. Une volonté clairement affichée de la part de Nikon d’aller chatouiller Canon sur le terrain de EOS 5D Mark III. Mais les écrans qui se plient et se déplient, c’est pas mon truc, et puis ça finit toujours par casser et sous la pluie, ça fragilise l’ensemble. Notez aussi la présence d’un flash intégré qui ne sert à rien jusqu’au jour où on en a besoin, ponctuellement. Le boîtier dans son ensemble est confortable, léger, apportant une vraie sensation de confort à la prise de vue.
• Post-prod. C’est du lourd.
Comme chaque fois que je teste un nouveau boîtier, j’ai travaillé en NEF (RAW) plus JPG, en activant le mode 12 bits compression sans perte dans le menu, le mode 14 bits ne m’apportant finalement pas grand chose de plus, à part du poids. Le poids parlons-en. Le NEF pèse jusqu’à 25Mo et le JPG, lui, accuse jusqu’à 15Mo. Faites le calcul, ça nous met le tandem à 40Mo par cliché. Vous tapez 250 clichés (oui, mine de rien à 6,5fps ça monte vite) et vous vous retrouvez avec 10Go de taff à post-proder avec Capture NX-D (version 1.03). On oublie Lightroom et consorts qui n’interprètent pas les fichiers NEF de D750 pour le moment. Avec une config appropriée, CNX-D et mon iMac étalent bien. Nikon D750 produit une image dynamique, propre et piquée, l’occasion de constater que son AF groupé tient toutes ses promesses. Last, but not least, la taille du capteur. Avec un capteur de 24 mégapixels, on peut recadrer dare-dare, s’adonner aux joies du crop sans retenue, tout en conservant une image parfaitement exploitable. D’ailleurs, les images que j’ai réalisées en mode DX parlent d’elles-même : avec une taille de 3956 par 2628 pixels, on garde encore beaucoup de latitude.
• Nikon D750. Bon sang ne saurait mentir.
Sur le terrain de la photo d’action, Nikon D750 passe l’épreuve avec succès. Voilà un reflex qui va déjà séduire les photographes de terrain : animalier, sport, reportage, D750 est capable d’accrocher le focus avec une aisance déroutante. Les pros, déjà équipés en D3s/D4s, vont voir dans ce reflex fullframe 24mp le complément idéal de leur actuel outil, en backup voire en second boîtier, pour profiter des largesses offertes par ce capteur maousse. Finalement le seul détail qui m’agace un peu c’est cet écran amovible mais c’est bien peu de choses quand on regarde la somme d’arguments de ce petit reflex. Il reste maintenant à l’amener sur mon terrain de prédilection, histoire de tester sa montée en iso et son mode hautes lumières qu’il a hérité de D810. En tout cas, ce premier contact confirme mon intuition et tout le bien que j’en avais écrit ici. Ce petit reflex a de nombreux talents et je veux bien croire qu’il va beaucoup faire parler de lui. Dans deux mois c’est Noël. Vous pouvez commencer à rêver de Nikon D750 au pied de votre sapin.
Ligne144 dit
ATTENTION : Le D750 n’éprouve pas la peur !
Ce n’est donc pas l’appréhension, mais la préhension !
harvey dit
Bien vu. Merci.
Cédric dit
Bonjour et merci pour le test grandeur nature heu plutôt sportif « lol »
Venant du D700, j’aurais voulu savoir si tu n’as pas éprouvé le sentiment de « petit ».
Je m’explique: En voyant les photos sur le net, j’ai l’impression et c’est même certains qu’il est plus petit en taille que le D700 et j’aurais voulu savoir si ce n’est pas un handicap quand on a des grosses paluches.
Bon on va me dire que j’ai qu’à aller dans une boutique pour l’essayer, mais dans mon « patelin » je n’ai rien, juste quelques compacts et c’est tout. Bon il y a bien le salon de la photo bientôt, mais monter juste sur la capital pour le voir c’est pas top du top.
Merci d’avance pour vos réponses 😉
Amicalement
Cédric
harvey dit
C’est vrai qu’il est petit, mais la préhension est facilitée par une poignée plus « creusée ». L’idéal c’est d’essayer, de le prendre en mains et encore mieux de faire quelques photos avec et là on sent que c’est un reflex qui en a sous la semelle. C’est un petit nerveux avec un AF gros calibre. Difficile de dire que c’est le successeur de D700, tellement D700 était un reflex à part. Je crois que D750 va taper plus large en matière d’audience, aussi parce que l’époque a changé, c’est ce qui explique aussi que Nikon ait eu cette idée d’écran orientable.
En tout cas une chose est sûre. Ne pas acheter sans l’avoir eu entre les mains d’abord. Le ressenti c’est super important. Ne pas perdre de vue aussi que Nikon a prévu un grip qui améliorera la tenu pour les grosses paluches 🙂
Steinar Knai dit
Merci de ce premier test d’un pro qu’on connais. Le fait qu’il soit petit, me semble plutot un avantage. Par rapport a mon D700 ca fait 25% de moins et pour mes mains vieillisantes et arthritiques ca fait du bien. Pour etre honnete et un peu honteux, j’ai essayé un Olympus OMD EM1 qui fait la moitié du poids, boitier comme objectifs et qui me font des images tout a fait suffisantes pour mes mariages et reportages. Par contre, du sport je ne sais pas encore s’il sait le faire. Je vais donc aussi aller voir si le D750 est pour moi, histoire de ne pas avoir a tout changer, y inclus mes mouvements instinctifs sur un Nikon. Herve me rassure, car l’écran pliable est un atout pour ma pratique _ quand je suis derriere tout le monde et il faut une photo des mariés absolument.
Je vous tiendrai au courant de mes recherches.