Nikon D4s en un mot ? Puissant.
Résumé des épisodes précédents. Lorsque Nikon a lancé D4, au début de l’année 2012, j’avais eu l’occasion de le tester, savourant le privilège de pouvoir l’utiliser dans à peu près toutes les conditions pendant une longue période et je dois admettre que j’avais été séduit, c’est rien de le dire. Ce reflex était très bon, sur tous les terrains, se révélant particulièrement polyvalent, aussi bien en extérieur qu’en conditions délicates de prise de vue, en basses lumières, en photos de spectacles par exemple, voire en studio. D’ailleurs j’avais fait un article dithyrambique sur le sujet ici-même. Mais toutes les choses ayant une fin, surtout les bonnes, j’avais dû rendre le D4 à Nikon, à contrecœur. Quelques mois passèrent et l’occasion se présentait de pouvoir tester à nouveau la bête, ce que je m’empressais d’accepter. On m’envoya donc un autre D4 et là j’eus l’impression d’être passé dans la quatrième dimension. J’avais en mains un reflex bizarrement erratique, qui était à des années lumière du premier exemplaire que j’avais testé. J’ai eu beau plonger dans les entrailles de la bête, tourner les paramétrages dans tous les sens, tenter le 50/50, le coup de fil à un ami de chez Nikon Pro, rien n’y fit. Ce D4 là ne voulait pas de moi, ce fut donc réciproque. Je ne toucherai plus à Nikon D4 et c’est mon dernier mot Jean-Pierre. D’autant, faut-il le rappeler, que j’avais déjà en mains le meilleur reflex jamais produit par Nikon à ce jour, sa Sainteté Nikon D3s et son autofocus fulgurant. En photographie, quand on tient un bon reflex, on le garde. De cette expérience j’ai retenu une leçon. Dans la famille D4, tout le monde ne se vaut pas. On ne tarda pas d’ailleurs à entendre les échos de quelques clients mécontents. C’était pas la majorité, mais il y en avait. Peut-être la firme Nikon avait-elle eu l’impérieuse nécessité de donner un signe objectif de vitalité à ses clients professionnels, après le terrible tsunami intervenu moins d’un an plus tôt, en avril 2011. Le séisme de magnitude 7,1 avait rudement touché les usines de Sendai qui produisent les reflex haut de gamme Nikon. Il fallait rassurer la clientèle pro, montrer que rien ne pouvait ébranler la marque jaune dans sa marche en avant. C’est dans ces conditions difficiles qu’est sorti D4, dix mois seulement après le séisme. C’était trop tôt.
• Nikon D4. Presque parfait.
Nikon D4 n’était sans doute pas un boîtier aussi parfait qu’il le semblait, mais il existait et globalement il était très bon, apportant de notables améliorations. Un peu moins de deux ans plus tard, au tout début du mois de janvier 2014, Nikon prenait tout le monde de court en annonçant dans un communiqué de presse le développement de D4s. Le 25 février la messe était dite, on avait sous les yeux la liste des specs de Nikon D4s et là pour le coup, ça donnait vraiment à réfléchir. À y regarder de près, on réalisait que Nikon corp. avait, sur ce reflex, entièrement revu sa copie, en reprenant l’essentiel, mais en y ajoutant des fonctionnalités pour pousser le niveau des performances dans des domaines où Nikon excellait déjà, comme l’autofocus. D’ailleurs la formule utilisée dans le communiqué de presse laissait clairement entrevoir le postulat du nouveau navire amiral de la flotte : « Nikon redéfinit la puissance. » Le message était aussi habile qu’on ne peut plus limpide. On prend le même reflex et on remonte toutes les specs d’un cran, en introduisant au passage des nouveautés, comme les sous-définitions. Une question demeurait. Comment Nikon pouvait-il améliorer la perfection, notamment en matière d’autofocus ? Perplexe et quelque peu refroidi par mon expérience chaotique avec D4, j’avais décidé de ne pas solliciter de prêt d’un D4s, ni à sa sortie, ni plus tard. Je savais que viendrait le temps des Vieilles Charrues et que dans le lot de matériels prêtés aux photographes officiels par Nikon France (partenaire du festival), il y aurait bien un D4s pour moi. Je pensais naïvement couvrir le festival avec mon D3s et garder le D4s en backup, ce qui s’avérait effectivement incongru. D’ailleurs, dès que j’ai eu Nikon D4s en main, je me suis empressé d’y monter mon 70-200 f/2.8 VRII et d’aller faire des images. C’est là que j’ai su que Nikon avait vraiment monté la barre d’un cran. Non, en réalité la barre était montée de plusieurs crans et il fallait se rendre à l’évidence. Le best reflex ever, désormais c’était bien Nikon D4s.
• D4s. No limit.
Historiquement, Nikon est loin devant sur le sujet autofocus. Loin devant, depuis toujours. Pas d’ambiguïté, avec D4s la marque jaune persiste, signe et enfonce le clou. Si vous faites partie de ces photographes qui cherchent une image ultra-nette, piquée, razor cut comme disent les américains, si vous cherchez un AF hyper réactif dans toutes les conditions de lumière, pas assez ou même trop bonnes comme c’est souvent le cas en live, si vous cherchez un AF capable de répondre en mode AF-C de manière instantanée (en photo de sport, en animalier par exemple), ne cherchez plus, c’est Nikon D4s. Un autofocus ultra performant, là, maintenant, tout de suite, sans avoir à se perdre en conjectures où à se tartiner des paramétrages complexes. Un autofocus qui assure tout le temps, dans toutes les conditions de nuances, de lumières, de mouvements. Dans sa marche en avant, Nikon implémente aussi le mode groupé, où la mise au point ne se fait plus seulement sur le collimateur sélectionné mais sur un groupe de quatre collimateurs et ça, sur un D4s c’est d’une précision absolument re-dou-table. Et ce n’est pas mon ami Pierre HENNEQUIN qui me contredira. Pierre, qui est membre de l’équipe des photographes officiels aux Vieilles Charrues, a pu évaluer ce matériel pendant le festival. Pour l’occasion, nous l’avons équipé de deux Nikon D4s, le premier monté en Nikkor 14-24mm f/2.8, le second en Nikkor 70-200mm f/2.8, une configuration optimum pour s’adapter en temps réel aux conditions de prise de vue. Le résultat est à la hauteur de mes attentes et même un cran au-dessus, avec des clichés dynamiques, cadrés au cordeau comme notre ami Pierre en a le secret. Sur le terrain, dans les fosses des Vieilles Charrues, Pierre me confirmait de jour en jour son étonnement sur la vélocité, la précision extrême de l’autofocus d’une diabolique efficacité, notamment en mode suivi AF-C. J’ai mieux compris son enthousiasme en voyant ses clichés de Skip the Use ou de Shaka Ponk. Le temps suspend son vol, l’image se fige, nette, parfaite, razor cut. La photo musicale dans toute sa splendeur qui nous fait revivre le concert, entendre la musique, ressentir l’émotion du public. Un regard, la parfaite adéquation entre la sensibilité du photographe et son matériel. C’est, selon moi, ce qui caractérise Nikon D4s. Cet indicible sentiment de puissance, dès qu’on l’a entre les mains. Le boîtier est merveilleusement ergonomique, les commandes tombent naturellement sous les doigts et dès le premier contact on sent que la bête en a sous le coude, qu’avec ce reflex on ne va avoir aucune limite. Si je dois résumer D4s en un seul mot c’est bien ça. Puissance. Et cette puissance se vérifie en post-prod. Avec son capteur de 16mp (la taille idéale pour un boîtier pro), D4s produit des images d’une pureté et d’un dynamisme hallucinants. Inutile de préciser que sur ce type de reflex on risquerait l’excommunication à y monter des cailloux de seconde zone.
• Nikkor, sinon rien.
De ce côté-là, comme chaque année, nos amis de Nikon Pro n’ont pas fait dans la dentelle, mettant à notre disposition le menu very best of plus de la gamme Nikkor. C’était Noël avant l’heure, jugez plutôt. En zooms grand angle, nous avons utilisé le dantesque Nikkor 14-24mm f/2.8, probablement le meilleur dans sa catégorie, ainsi que Nikkor 16-35mm f/4 pour lequel j’ai une grande affection. Un range idéal, un traitement nanocristal qui produit une image très lumineuse même à f/4, une excellente réactivité, une grande discrétion (contrairement au globuleux 14-24) et enfin (surtout) un prix très abordable. Bien sûr, nous avons embarqué Nikkor 70-200mm f/2.8 VRII, le summum du zoom trans-standard, ainsi que Nikkor 24/70mm f/2.8. Comme chaque année, nous avons eu le privilège d’emmener Nikkor 300mm f/2.8 VRII, le caillou dantesque par excellence, une pureté et un piqué d’image saisissants. Associé au télé-convertisseur Nikkor TC20-EIII, il se transforme en 600mm f/5.6 tout en conservant ses qualités intrinsèques. J’ai pu le vérifier en réalisant quelques portraits de Alex Turner (Arctic monkeys), dans la fosse à 300mm, puis à cent cinquante mètres mètres de la fosse à 600mm. Nikon D4s doit être associé à une optique de qualité et là on touche la perfection.
• Nikon D4s, en quelques mots.
Autofocus, dynamique, ergonomie, confort, … J’ai eu bien du mal à trouver un seul travers à ce nouveau haut de gamme Nikon, presque parfait à tout point de vue. J’étais juste un peu perturbé par les commandes, comme les modes exposition qui se règlent désormais sur l’écran de contrôle, même le poids ne m’a pas gêné, au contraire. D4s et le 300mm à main levée, ça reste jouable et c’est presque du plaisir d’en avoir autant entre les mains. Le seul travers, l’unique bémol tient dans la montée en iso. Ce reflex est donné pour 400Kiso mais pour ma part je perçois un bruit, léger certes, mais qui existe dès 3200iso. Sur des scènes comme les Vieilles Charrues et leurs plans de feux dantesques, c’est pas vraiment un handicap, dans la mesure où je monte rarement au delà de 800 voire 1600iso. En revanche dans les cas où j’ai dû pousser la molette jusqu’à 3200iso voir un peu plus, j’ai perçu du bruit dans mes images. Je dois à la décharge de D4s de dire deux choses. La première, c’est que j’ai été à bonne école avec D3s qui reste propre à 3200iso, mais D3s c’est un capteur 12mp et la problématique n’est certes pas la même. La seconde c’est que je n’avais probablement pas activé la réduction du bruit dans les paramètres. Bref, c’est une broutille, un détail, tant le reste, tout le reste tient en un seul mot. Parfait.
Nota bene – Nikon D4s a reçu le prix TIPA (Technical Image Press Association) du « meilleur reflex pro » en 2014 et le prix EISA(2014-2015). Je ne vais pas vous dire que ça m’étonne, tant ce reflex éclipse totalement la concurrence en matière de performances.
• J’aime : l’autofocus, la vélocité, l’ergonomie, la facilité de prise en main, le confort de prise de vue, la dynamique des images, l’autonomie.
• J’aime moins : la perception d’un léger bruit à 3200iso.
• merci à Pierre HENNEQUIN.
kagou dit
Mon seul commentaire, qui ne m’a pas quitté à la lecture de ce billet, billet qui donne envie de tester la bête : « Mais que font les autres photographes avec un Canon ?! ».
PS: suis en Canon 5D MarkIII 😉