Tout commence avec une histoire de macarons. Pas facile à faire, les macarons, j’en connais plus d’une qui s’y est cassé les dents, à commencer par ma femme. Je ne lui jette pas la pierre puisqu’elle réussit quasiment tout le reste, mais les macarons, elle a laissé tomber, pas le temps et radicalement trop emmerdant. Donc, autant par amusement que par défi, et aussi parce que j’adore les macarons, je me suis mis en tête de les faire moi-même, ces foutus macarons. Pour voir. Première tentative, j’ai fait des petits macarons avec un petit téton, c’était très sexy mais pas vraiment vendeur. Et puis à force de patience, d’application, finalement j’y suis arrivé. Un jour que je cuisais mes macarons, j’ai réalisé que leur temps de cuisson, douze à treize minutes, c’était à peu de choses près le temps de développement d’une pellicule Kodak TriX 400 poussée à 1600iso. C’était amusant, cette analogie, entre pâtisserie et photographie et à y regarder de plus près, j’ai réalisé que c’était loin d’être la seule…
D’abord, basiquement, la pâtisserie et la photographie c’est de la chimie. C’est de part et d’autre un savant dosage de réglages, de conditions de réalisation, d’ambiance. Ici un blanc d’œufs liquéfié à 28° donnera de bons résultats, là un révélateur à 24° s’avère indispensable. La pâtisserie, comme la photographie nécessitent avant toute chose un travail de préparation. On pèse, on évalue au gramme près. Quelques grammes en trop peuvent s’avérer aussi dramatiquement irrémédiables qu’un mauvais couple diaphragme vitesse. En pâtisserie comme en photographie les erreurs se payent cash. Tu chies ton cadrage, tes réglages, tu crames ou tu es sous-ex mais dans tous les cas ta photo sera imbouffable. Non seulement il y a les recettes, les ingrédients à respecter mais il y a aussi (et surtout) le modus operandi, c’est là que le bon matos intervient. Ici les rolls se nomment Kitchen Aid, Riviera et Bar, Lékué, Magimix, Mastrad, … Comme en face on bosse avec du Nikon, du Canon, Blad et autres Leica. Important le matos, certes, mais rien ne remplace le tour de main! L’intégration de la meringue italienne dans la pâte d’amandes c’est au moins aussi flippant que la première fois où tu enfiles ton film dans le noir absolu dans ta spirale Jobo. La pâtisserie comme la photo, c’est des gros moments d’angoisse qui ne se tassent qu’avec le temps et l’expérience.
Et puis vient le moment de la cuisson des macarons. En quelques minutes (généralement quatre à cinq guère plus) tu vas voir, ou pas. Comme une image qui se révèle à tes yeux éblouis dans le bac de révélateur (ou sur l’écran de ton ordinateur), tu vois apparaître cette petite collerette qui fait la personnalité de ce petit prince des biscuits et sans qui le macaron n’est qu’un vulgaire palet aux amandes. Elle apparaît, elle pousse le macaron vers les sommets et ça, franchement, à part la révélation d’un cliché d’exception je ne connais rien de plus excitant, sauf peut-être le regard empli de gourmandise de ma valentine à la perspective d’un thé, accompagné de ces délicieuses merveilles. Un macaron lisse qui ne révèlera son plein arôme qu’au bout de quelques jours. Du temps, une infinie patience, une technique maîtrisée, beaucoup de passion et une petite graine de folie, je persiste et signe. La pâtisserie et la photographie se ressemblent comme deux sœurs. Et puis, lorsque les macarons sont terminés, qu’ils sont beaux et qu’ils donnent envie, il est temps pour moi de m’attaquer à un autre excercice tout aussi casse-gueule : les photographier. Dans ces moments de plénitude, dans la cuisine, mon Nikon D4 en mains, lorsque j’ai troqué mon tablier Minipop contre l’index sur le déclencheur, il me semble parfois percevoir les silhouettes de Gaston Lenôtre et de Henri Cartier-Bresson, où un pâtissier et un photographe de légende se retrouvent réunis par la grâce d’un petit biscuit au cœur tendre.
• bientôt ma recette de Macarons Valentine sur le blog Dans la Cuisine
• merci à Minipop qui me fournit mes jolis tabliers de cuisine !
Gerald Geronimi dit
C’est drôle car je cite souvent en exemple le métier de cuisinier, quand je parle de photographie !
Si on à la recette pour faire des Macarons, ce n’est pas dit que l’on va les réussir !
Si on à la recette pour faire des photos, ce n’est pas dit que l’on va les réussir aussi !
Si on à les meilleurs outils pour faire des Macarons, ce n’est pas dit que l’on va les réussir !
Si on à le meilleur appareil pour faire des photos, ce n’est pas dit que l’on va les réussir aussi !
Etc…
Un grand « Chef », au même titre qu’un photographe, est aussi la pour apporter tout son savoir faire et sa sensibilité, pour faire rêver et éveiller les sens !
Et heureusement, le talent n’est vendu, ni dans la boite avec l’appareil photo, ni dans le paquet de farine :-))
harvey dit
Tout est dit Gégé !
Marco Tchamp dit
Merci beaucoup Hervé pour ton petit billet truffé de délicieux macarons ganachés aux cristaux d’argent et pixels…..
J’ai adoré ton cheminement… si proche du mien ! photographe et macaroneur !
Je t’invite à venir baver sur mon site…
Bien amicalement
harvey dit
Merci Marco ! De bien jolies photos et de très beaux macarons !
Franck dit
Trop fort ton article et le commentaire de Gérald ! Et oui les macarons ce n’est pas facile, j’ai abandonné l’idée d’en faire quand tu vois le temps passé pour les manger en 5 minutes ! Heureusement, il reste la photo 🙂