Vous sentez ? Non ? Vous ne sentez rien, c’est normal. En ce moment, dans le paysage photographique, il ne se passe rien. On sort doucement de la crise du Covid 19 qui a plongé le pays et une bonne partie de la planète dans une quasi léthargie. Dans quelles conditions les Jeux Olympiques de Tokyo vont-ils bien pouvoir se dérouler le mois prochain. Quand on sait que que cet évènement sportif planétaire est l’occasion pour les grandes marques photo – je pense à Canon et Nikon et dans une moindre mesure Sony – de se tirer la bourre sur les pistes d’athlétisme.
Cette année, la fête risque d’être un peu ternie, déjà par l’absence du public dans les gradins. Bref, dans cette ambiance morose, les marques tentent tant bien que mal d’entretenir la flamme et de faire un peu parler d’elles. On zappera rapido sur Nikon, qui a discrètement lancé deux optiques macro (un 50 et un 105) pour sa monture Z et vient d’annoncer deux optiques compactes (28mm f/2,8 et 40mm f/2). Pas vraiment de quoi sauter au plafond. Dans ce climat Waterloo morne plaine, Canon monte au front et tire à boulets rouges, égrainant avec malice quelques specs de son futur flagship, EOS R3…
EOS R3. Oui, mais…
Flagship, d’ailleurs, pas si sûr. On connait bien la marque rouge et on se doute que si ce boîtier porte la marque EOS R3, un autre estampillé R1 est probablement déjà dans les cartons. Mais on ne boude pas son plaisir, d’autant que les visuels de la bête, distillés par Canon France, sont assez éblouissants. EOS R3 est sans aucun doute le mirrorless le plus sexy de sa génération. C’est l’effet wouah ! assuré. Canon propose un boîtier monobloc qui transpire la solidité, la performance et la puissance. Au premier coup d’œil, on sait que c’est du Canon, digne héritier de la grande lignée de la famille EOS 1D.
Un coup d’œil sur la face arrière et pour tout photographe ayant déjà bossé avec EOS, on reconnaît instantanément l’ergonomie Canon, sans aucun doute l’une des meilleures jamais conçues. On n’a même pas besoin d’entendre la litanie des specs, on sait que ça va être furieux. Non, le coup de génie de Canon, dans cette proposition, c’est juste de nous montrer ce mirrorless et de nous inviter à y aller. EOS R3 donne envie. Furieusement envie. La marque rouge annonce la couleur et place la barre très, très haut. Les challengers – je pense surtout à la crèmerie d’en face – sont prévenus. La bagarre s’annonce plus féroce que jamais.
• EOS R3. Des specs affolantes
Chez Canon, on ne restera pas les bras ballants… J’ai encore en mémoire cette phrase prononcée pendant le salon de la photo. On était en 2009 et sur le stand Nikon la fête battait son plein avec le lancement de D3s. Pouvait-on d’ailleurs raisonnablement en douter ? Sûrement pas moi, même si à l’époque je m’apprêtais à lâcher mon EOS 1D Mark IV et faire de toutes ces années passées avec la marque rouge table rase. Non, Canon n’a jamais faibli, tant sur sa gamme reflex numérique, sa palette d’optiques serie L que son approche raisonnée du segment mirrorless, avec la gamme compact M, lancée au tout début des années 2010 (en juillet 2012, précisément).
Sur le segment plein format, il aura fallu attendre 2018 pour voir apparaître EOS R, décliné en deux modèles R5 et R6, et le déploiement d’une gamme optique baptisée RF. On attendait l’annonce d’un plein format monobloc, il est arrivé au printemps – le 14 avril – et son annonce en a séché plus d’un, suivez mon regard. Depuis, Canon distille malicieusement des specs, à l’image d’un petit Poucet balisant son chemin de petits cailloux dans les chaussures de ses concurrents. On va voir ce qu’on va voir.
• EOS 3. Retour vers le futur
Il s’appelle EOS R3, voilà qui rappellera quelques souvenirs aux boomers qui ont utilisé à la fin des années 90 le mythique EOS 3 et son autofocus piloté à l’œil. On se demandait si Canon réintroduirait un jour cette fonctionnalité, c’est fait. Un appareil photo capable de faire la mise au point sur la zone où se fixe votre iris (le fameux eye control), je dois avouer que j’étais plus que septique, mais ça c’était avant. Avant d’avoir un EOS 3 entre les mains. On imagine la pertinence de ce genre de spec sur un mirrorless comme EOS R3, d’autant que plus de vingt ans ont passé et que les ingénieurs de chez Canon ont eu le temps de peaufiner leur copie. L’annonce place la barre au plus haut. Mirrorless professionnel haute performance et haute vitesse. Citius. Altius. Fortius.
EOS R3 se positionne sur le segment performances avec une double promesse. D’abord la capacité de shooter à 30 images par seconde (en format RAW), ensuite de disposer d’un autofocus irréprochable. Un boîtier aussi réactif que fiable, endurant, tropicalisé, capable d’affronter tous les terrains, capable de travailler dans des conditions de lumière très faibles (Canon évoque une luminosité allant jusqu’à -7 IL excusez du peu) voilà autant de promesses qui vont séduire les photographes de terrain, en reportage sportif comme en animalier. Avec EOS R3, Canon introduit aussi une stabilisation capteur travaillant en tandem avec les optiques stabilisées en monture RF. Du côté de la vidéo, inutile de rappeler que la marque rouge connaît et maîtrise le sujet : séquence vidéo 4K ou RAW. Et naturellement Canon EOS R3 embarque le format CFExpress.
• Patatras et c’est le drame !
De vous à moi, quand j’ai vu EOS R3, j’ai frissonné. Est-ce l’ergonomie, la gueule incroyablement sexy de ce boîtier, la nostalgie des souvenirs d’une époque passée avec mon EOS 3, mes optiques serie L, les performances hallucinantes annoncées par Canon ? Je ne sais pas. Ce que je sais, c’est qu’en voyant EOS R3, je me suis dit, l’espace d’un instant, que je partirais bien en balade en sa compagnie.
D’autant que mon regard a été attiré par un caillou blanc ultra compact, un zoom 70-200mm f/2,8 RF. Un 70-200 plus compact que mon 24-70 c’était juste pas possible ! En y regardant de plus près, la déception est à la hauteur. Canon nous a pondu un zoom trans-standard extensible, ce qui explique sa compacité. Et là vous me dites, un extensible, un zoom à pompe comme au bon vieux temps du rock’n roll ? Capable à chaque coup de pompe de ramener un max de poussière sur le capteur ? Un truc comme ça sous la flotte, c’est la mort assurée. On est d’accord. Et c’est pas fini !
Non content de nous pondre un zoom extensible, pour gagner en compacité, Canon nous a pondu une lentille arrière ras du cul, vous me suivez ? En clair, ça signifie que cette optique ne pourra jamais embarquer un téléconvertisseur. Jamais. Ce choix technique est complètement dingue de la part de Canon, surtout quand on sait que le 70-200mm f/2,8 est le trans-standard, l’optique de prédilection des photographes de terrain (en complément du 24-70mm). Ce n’est pas pour rien que de nombreux photographes équipés en EOS R achètent encore du 70-200 de la gamme EF. Pour enfoncer le clou, j’ose à peine vous parler du pare-soleil absolument monstrueux qui équipe ce 70-200. Pour la compacité, c’est foutu.
• En conclusion, EOS R3 ça sera sans moi
Vous vous souvenez de ce concept de base ? C’est par l’optique que passe la lumière. Pour ma part, j’ai toujours privilégié l’optique avant le boîtier. Pour moi, le coup du 70-200 extensible, incapable de bosser avec un TC, c’est définitivement une fin de non recevoir. Je conviens que c’est vraiment dommage, même si EOS R3 présente d’indéniables qualités par ailleurs. Je suis persuadé que nombre de photographes vont tiquer sur cette proposition optique.
Du côté de la maison d’en face, c’est un peu silence radio. On sait que Nikon fourbit ses armes et se prépare au duel prévu en fin d’année, avec l’annonce de son monobloc Nikon Z9. Un flagship dont on ne sait quasiment rien mais dont tous les afficionados de la marque jaune attendent beaucoup. Dans les deux cas, Canon ou Nikon, une chose risque de ne pas décevoir, c’est le tarif. Mais c’est bien connu. Quand on aime, on ne compte pas…
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Romain FLOHIC dit
Ce qui me chagrine depuis les hybrides et surtout l’arrivée des Rx, c’est que Canon délaisse complètement la gamme des EF.
Combien de photographes sont déjà équipés et ne souhaitent pas changer tout, tout de suite.
Pour chaque photographe, son parc d’objectifs se construit petit à petit, au fur et à mesure de ses besoins. J’ai personnellement un 300mm f2.8 qui date de 1999 et qui m’est très utile, je n’ai pas l’intention de le changer car il fonctionne encore à merveille. Sans compter la dizaine de petits copains qu’il a ….
Certes, il existe les bagues d’adaptation, mais c’est ENCORE un truc a acheter. Comme si, pour changer la roue d’une voiture, il fallait un adaptateur parce qu’il n’y a que 4 écrous au lieu de 5 sur le moyeux …
J’ai surtout l’impression que la gamme RF est un forcage de main de la part de Canon. la gamme EF a encore beaucoup d’utilisateurs et si ils ne prennent pas soin de nous, au moment du changement, nous sauront leur faire comprendre.
Arnaud LAURENT dit
Hâte de voir un test sur le terrain de ce boitier.
Hâte surtout que canon nous sorte des objectifs RF manquant au catalogue comme le 35mm f1,4