D’abord il y a eu Nikon et son annonce de développement, fin juillet, d’un nouvel APN, accompagné du le teasing qui va bien. Pour piquer la curiosité, donner un signal. Le top départ est intervenu un mois plus tard, fin août, avec l’annonce de la gamme Nikon Z. Du côté de son éternel concurrent et challenger, silence radio. Les plus cyniques (ou les plus ignorants) ont pensé que Canon encaissait le coup. C’est bien mal connaître la marque rouge et la mentalité japonaise, on y reviendra. Au début du mois de septembre, alors que l’effet d’annonce Nikon s’était un peu tassé, on a commencé à entendre parler d’un possible évènement du côté de chez Canon, prévu pour le 5 septembre. Contrairement à Nikon, qui m’avait fait lever aux aurores pour une téléconférence qu’on n’aura jamais pu capter, à la date supposée de l’annonce, le 5 septembre donc, rien. Que dalle. Aucun email, aucun communiqué de presse. Un peu avant dix heures, un email. Canon lance un nouvel appareil photo plein format et une série d’objectifs qui constituent les bases du nouveau système EOS R. J’ai eu beau lire attentivement, je n’ai pas trouvé le mot mirrorless, encore moins le mot hybride. En revanche, dès le premier contact visuel, j’ai immédiatement reconnu le boîtier. C’est un EOS pur jus dont il reprend absolument tous les codes visuels. On pourrait presque croire que l’engin embarque une visée reflex, tellement Canon est dans la droite ligne de son design. En revanche, côté innovation, les ingénieurs ont travaillé pour rendre ce nouvel APN hautement désirable. Aucune doute. Canon est dans la place.
EOS R Canon is in da place !
• EOS R, un projet de longue date
« Les ingénieurs de chez Canon sont partis d’une page presque blanche. Ce projet est dans les cartons depuis de très nombreuses années… » me confiait ce matin un membre de Canon France. Le paramètre de développement dans la durée est à prendre en compte, tant pour Canon que pour ses concurrents. On ne décide pas de lancer un appareil mirrorless de ce calibre du jour au lendemain, parce que c’est dans l’air du temps ou pour faire comme son concurrent. D’ailleurs, il faut totalement méconnaître la mentalité japonaise pour penser qu’on lance un produit pour marcher dans les pas de son concurrent. Si tu marches dans les pas de celui qui te précède, tu n’es pas prêt de le rattraper (proverbe… Japonais). Le japonais est l’essence même de la prudence et il sait se projeter dans le temps. Il n’est pas inutile de rappeler, par ailleurs, que Canon fut la première marque à miser sur la convergence photo vidéo avec EOS 5D. C’était un pari risqué, qui a été critiqué et dont on sait aujourd’hui ce qu’il est advenu. Tous les appareils photo, compact, reflex ou mirrorless embarquent des fonctionnalités vidéo.
• Un AF ultra performant
Lorsque j’ai découvert une à une les specs de EOS R, la première chose qui m’est venue à l’esprit c’est que les ingénieurs de chez Canon ont cherché l’innovation, les détails qui allaient rendre leur proposition plus attractive que celle de ses concurrents. Pour Canon, le défi ne consistait pas à créer une nouvelle taille de monture, la monture EF disposant déjà d’un diamètre quasi équivalent à celui de Nikon Z. Pas plus qu’à survendre son viseur électronique ou ses fonctionnalités vidéo. Ce qui est intéressant avec EOS R, c’est que cet APN propose de nouveaux outils pour une nouvelle approche de la photographie, mais surtout un APN hautement personnalisable. Tout en offrant une palette de fonctionnalités de très haut niveau, à commencer par l’autofocus.
Sans être mauvais esprit, j’ai la nette impression que pendant des années il était aussi désagréable de prononcer le mot autofocus devant un membre de chez Canon que le mot Alésia dans une tribu gauloise. L’autofocus avait fait l’objet de ratages à répétition sur la gamme reflex EOS et la marque rouge a longtemps traîné ce défaut comme un boulet. Pour avoir testé plusieurs reflex Canon, dont l’excellent EOS 80D, je sais que c’est de l’histoire ancienne. N’empêche, sur EOS R on annonce des performances inédites au chapitre autofocus. « C’est vrai ! » me confirme mon interlocuteur. « C’est un AF de dingue, je n’ai jamais vu une acquisition du point de netteté aussi rapide ! Là où la technologie AF est spectaculaire, c’est surtout en basses lumières, jusqu’à -6IL. » La mise au point automatique est un challenge omniprésent, pour tous les photographes et ça, Canon l’a bien compris. L’autre point fascinant passe par la personnalisation du boîtier et de ses optiques.
• L’ultra personnalisation
Programmer les touches de fonctions pour faire d’un boîtier son boîtier, pour le personnaliser et finalement se sentir en phase avec lui, ce n’est pas nouveau. C’est pour cela, entre autres, que mes reflex Nikon ne sont guère utilisables par d’autres photographes que moi-même. Mais à ce chapitre, Canon pousse l’expérience utilisateur à ses extrémités, le touch pad en est un parfait exemple. Inspiré de la technologie développée par Apple sur son ordinateur portable Macbook Pro, il s’agit d’une zone tactile entièrement personnalisable. À partir de cette zone, il est possible de choisir de modifier les paramètres de son choix. La nouvelle gamme optique développée par Canon pour son EOS R intègre une bague qui permet de régler des paramètres comme le diaph, la vitesse, la balance des blancs, … Sans compter que Canon propose naturellement une bague d’adaptation pour monter des optiques EF, une bague déclinée en plusieurs modèles dont l’un permet l’utilisation de filtres (ce qui va beaucoup plaire aux vidéastes). Et la bague d’adaptation dispose aussi des fonctions de personnalisation.
• Des optiques RF de serie L
C’est du côté des optiques que l’offre EOS R s’avère hautement désirable. La réputation des optiques Canon serie L n’est plus à faire, depuis toujours. On s’attendait à une offre sexy pour EOS R et on n’est pas déçu. D’abord avec un zoom RF 28-70mm f/2 L USM qui allie performance, ultra luminosité, supra piqué et range presque idéal (presque parce que ne démarrant pas à 24 mais c’est un détail). Le prix de lancement de 3.249€ est à la hauteur du rêve. En parlant de rêve, un 50mm f/1,2 L USM est disponible à 2.499€ qui est aussi le prix de EOS R. Pour les rêves plus raisonnables, on pourra miser sur un sage 24-105mm f/4 L nano USM (1.199€) ou un 35mm F/1,8 à 549€. La bonne nouvelle c’est que les utilisateurs de reflex Canon vont pouvoir monter leurs optiques EF et EF-S sur EOS R via la bague d’adaptation et profiter de la personnalisation. Et en poussant le rêve un peu plus loin, on va même pouvoir monter des optiques FD sur EOS R. Petite précision, la baïonnette dispose d’une broche à 12 contacts ce qui signifie plus d’énergie et plus de datas, une communication optimisée entre le boîtier et l’optique.
• Une porte ouverte sur le mirrorless
Globalement, je trouve que la proposition de Canon est intéressante à plus d’un titre. Elle va permettre aux utilisateurs de matériels reflex Canon d’ouvrir une porte et d’envisager l’écriture d’un nouveau chapitre sur le segment mirrorless. Avec EOS R, Canon envoie un signal fort à ses utilisateurs qui seraient tentés d’aller voir si l’herbe est plus verte chez Nikon ou chez Sony. Ce boîtier hybride, tropicalisé est clairement positionné sur le segment professionnel. Un capteur 30mp, un prix agressif (2.499€), des fonctionnalités solides et attractives. Du côté des sujets d’actualité, comme l’autonomie, Canon annonce 400 vues par charge, tout en précisant que ce chiffre peut évoluer selon l’usage et l’utilisateur. Dans le même temps, un grip embarquant deux batteries est annoncé. Autre sujet de grande préoccupation chez certains utilisateurs, la carte mémoire. Canon a fait le choix d’un slot SD unique, pour d’évidentes raisons de compacité et de coût. Enfin, Canon n’a pas fait le choix d’une stabilisation capteur, comme l’ont fait des marques comme Nikon ou Sony, un manque qui pourrait être contrebalancé par l’ultra performance de son nouvel AF, voire pallié par la stabilisation via l’optique.
• EOS R, chapitre 1.
En conclusion, je trouve l’offre Canon EOS R globalement attractive. Nouveau boîtier plein format mirrorless, nouvelle monture, nouvelle gamme optique, adaptabilité des optiques EF, EF-S et même des optiques FD vintages. Un EOS R ultra personnalisable, silencieux, des fonctionnalités inédites, comme le touch pad initié par Apple. En parlant d’Apple, il faut noter une interface qui pourrait s’avérer très intéressante avec le développement de DPP Express (traitement des flux et des fichiers RAW) pour la gamme iPad, interfaçable avec EOS R via Canon Camera Connect. Au chapitre vidéo, EOS R filme en 4K et offre des fonctionnalités de recadrage pendant la prise de vue, vidéos sur 10 bits en sortie HDMI. La performance de la mise au point, de l’autofocus en basses lumières, est un argument majeur d’autant qu’on peut accéder à l’AF par toucher-glisser sur la bagatelle de 5655 points AF. C’est pas mal pour un début, non ? Oui pour un début parce qu’on n’imagine pas Canon en restant là. Il y a fort à parier qu’un second modèle est déjà dans les cartons. Mais en attendant, les utilisateurs de reflex Canon et les autres sont prévenus. Avec EOS R, la marque rouge est entrée dans la danse. Désormais, sur le segment de l’hybride mirrorless il faudra aussi compter sur Canon.
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