Nous sommes le 10 février 2015 et comme chaque année, le 10 février, pour moi, c’est le Larry Burrows day. Ce jour où l’un des meilleurs photographes du vingtième siècle disparut dans le crash de l’hélicoptère qui le transportait, au dessus du Laos, avec trois autres photographes, tous membres de l’élite de la presse ou des agences d’alors. Henri Huet (photographe français, Associated press), Kent Potter (photographe américain, United press), Keisaburo Shimamoto (photographe japonnais, Newsweek). Tous périrent quelque part en survolant la piste Ho Chi Minh. Penser à Larry Burrows, chaque 10 février de chaque année, c’est comme une fidélité au passé. C’est comme un respect, une gratitude, envers celui qui est pour moi une référence définitive, un modèle, un héros. Pour ramener de l’image, avec son Leica M3 ou ses reflex Nikon F, ce photographe anglais était capable de tout, d’aller puiser au bout de son énergie comme de son imagination. Mais surtout, Larry Burrows était un œil, un regard empli de compassion et d’humanité. D’ailleurs, le titre du très beau livre publié par Life en 1972, l’année qui a suivi sa disparition, résume parfaitement l’œuvre. A compassionate photographer.
Hommage à Larry Burrows, photographe
(1926-1971)
Chaque année, le 10 février est comme un rituel. Je regarde les photographies de Larry Burrows avec la même émotion, dans les livres qui sont dédiés à son œuvre. Je feuillette ma collection de magazines Life, comme un voyage dans le passé, avec le mythique numéro du 16 avril 1965 et les photos hallucinantes et désormais cultes de One ride with Yankee Papa 13, pour tout admirateur de Burrows. Témoigner de la guerre, dans toute sa cruauté. Larry Burrows était anglais et avait coutume de dire que cette guerre n’était pas sa guerre. Ses clichés de boys américains, foudroyés dans cette sale guerre, auront sans doute contribué à imposer la paix. La photo du soldat américain en larmes, après la mort de ses frères d’armes fera le tour du monde. Je me suis souvent demandé comment, dans ces moments-là, Larry Burrows trouvait la force de déclencher, d’aller au plus près, de cotoyer la mort à 35mm. Il donnait lui-même un élément de réponse dans une interview à la télévision : « Souvent je me demande si j’ai le droit de photographier la souffrance des autres. Mais si je peux contribuer à faire connaître et comprendre la douleur des autres, alors cela me donne une raison de le faire. » Le photographe ignorait s’il serait toujours en vie le lendemain. Il photographait dans l’urgence, presque instinctivement. « Tu ne peux pas te permettre de réfléchir. » disait-il. Larry Burrows est mort comme il a vécu, sans réfléchir, à l’instinct. Cet instinct de photographe, ce pur et admirable talent. Être photographe pour permettre à l’humanité de ne jamais oublier. Si je ne dois garder qu’une chose de lui, c’est ça. Larry Burrows, photographe, était notre témoin. Le témoin de l’humanité toute entière.
• regarder les clichés du magazine Life « One ride with Yankee Papa 13 »
• Quelques exemplaires de Compassionate Photographer se trouvent encore sur Amazon.
• Vietnam est l’ouvrage de référence des clichés de Larry Burrows sur ses clichés réalisés au Vietnam. Bouleversant et indispensable.
Sophie dit
Je crois aussi que Larry Burrows faisait partie des photographes qui savent observer et réfléchir. « Souvent je me demande si j’ai le droit de photographier la souffrance des autres. », c’est tellement vrai concernant le rapport du photographe à son sujet…