J’ai testé Nikon Z9 en tandem avec le nouveau zoom Nikkor 100-400mm f/4,5 – 5,6 pendant une journée entière au festival des Vieilles Charrues. Pourtant, je m’étais promis de ne pas y toucher, mais la tentation était trop grande. Bref, vous le savez déjà, si vous avez lu mon compte rendu ici-même, j’en suis sorti ébloui (doux euphémisme). Ébloui par la vélocité, la réactivité et naturellement par la pertinence et la précision dantesques de l’autofocus. J’ai travaillé à 200iso en début de journée pour finir à 1600iso sur le dernier concert (celui d’Orelsan). Avec ce matériel, je le dis en toute honnêteté, j’ai vécu ce que je craignais. Un moment de pure extase, en ayant entre les mains un flagship d’exception.
Je le savais, revenir le lundi à la maison et reprendre ma vie pépère avec mon Z6 serait compliqué. J’ai mis un peu de temps à redescendre et la vie a finalement repris son cours. Deux mois plus tard, je couvrais mon autre festival de prédilection, Atlantique Jazz festival et les images que je ramenais ont réussi à me convaincre qu’au fond, un Z6 c’est bien aussi, pour peu qu’on le maîtrise comme il faut.
LED banding, montée en iso, basses lumières… Le Z9 en question
À la suite de mon article sur Z9, j’ai reçu ici quelques commentaires peu amènes, que je n’ai par ailleurs pas publiés. J’apprécie la contradiction pour peu qu’elle ne soit pas totalement dénuée de fondement et d’élégance voire de politesse. En gros, les principaux reproches faits à Nikon Z9 tiennent dans sa supposée faiblesse en basse lumière, sa difficulté à monter en iso, sa faible autonomie. Et, cerise sur la gâteau, du LED banding à tous les étages. Toutes ces ombres au tableau de Z9, que j’imaginais idyllique, m’ont singulièrement contrarié.
Alors comme ça, le flagship Nikon que j’imaginais parfait ne le serait pas ? On m’aurait menti, je me serais trompé ? Reste ma propre expérience, mon ressenti, une journée entière passée avec Nikon Z9 entre les mains. Restent mes photos, mes six concerts, j’avais vécu un moment parfait. L’enfer serait-il réservé aux autres ? Justement les autres, ceux qui ont franchi le pas en achetant un Z9, je les connais bien. C’est donc naturellement vers eux que je me suis tourné.
La problématique du LED banding
Le LED banding c’est l’apparition de bandes sur l’image. C’est un phénomène qui apparaît à la prise de vue, en particulier dans le cadre de l’utilisation de certains plans de feux à base de LEDs. Certains plans de feux, pas tous. En clair le LED banding est un problème lié à la synchronisation (ou non) entre le temps de pause et la fréquence d’affichage des LEDs. Et tous les LEDs n’ont pas la même fréquence. Certaines fréquences vont donc poser problème, d’autres moins ou pas du tout. Un autre paramétre est à prendre en compte, la vitesse d’obturation. Bref, le LED banding c’est un cauchemar. Est-ce que ça ne concerne que Nikon ? Non. Ça merdoie aussi chez Canon, chez Sony et consorts. Personne n’est épargné.
Ce cauchemar, je l’ai vécu avec mon Z6. La première fois, c’était à l’occasion d’une photo corporate en entreprise. L’éclairage du bureau était entièrement composé de LEDs, une horreur. Je ne m’en suis rendu compte qu’à l’editing. J’avais travaillé en mode silencieux, obturateur électronique. Pour régler le problème, il suffisait d’utiliser l’obturateur mécanique. Seulement voilà. Avec Z9, Nikon a fait le choix audacieux de l’abandon pur et simple de l’obturateur mécanique. Le LED banding allait devenir un caillou dans la chaussure de Nikon Z9.
Ce qui a semble-t-il posé problème, c’est le flou artistique entretenu par Nikon au lancement de Z9. Plusieurs photographes (dont mon interlocuteur, photographe pro) ont clairement posé la question à Nikon, évoquant la problématique de LED banding. « Nikon répondait invariablement que tous les problèmes liés à cette option technologique étaient résolus. Je n’imagine pas que Nikon pouvait ignorer ces problèmes au moment où il nous servait la musique sur l’air tout va bien, Madame la Marquise ! »
La suite est connue et a donné lieu à un fil de discussion assez musclé sur un forum spécialisé : « Nikon s’est bien foutu de notre gueule en soutenant y compris pendant les journées de présentation du Z9 , que l’obturation électronique du Z9 encaissait sans aucun problème toutes les sources de lumières LED comprises. » Bienvenue au fight club.
Depuis cet incident, datant de l’année dernière, les choses se sont un peu tassées, avec les différentes évolutions du firmware. Nikon, comme Canon qui est confronté à la même problématique avec son EOS R3, propose des solutions. Parmi elles, l’utilisation d’un temps de pause adapté (au 1/100è) qui n’est certes pas la panacée ou le flicker reduction (réduction du scintillement) introduit dans le firmware 2.1. Mais là aussi, les résultats divergent selon le temps de pause utilisé.
Montée en ISO, basses lumières, fichiers RAW et jpeg
Certains photographes ont été tentés de comparer les performances de Nikon Z9 avec son prédécesseur au poste de flagship, le reflex Nikon D6. C’est un non sens. D’abord parce qu’on ne peut pas comparer un reflex avec un mirrorless. Il s’agit de deux univers différents, chacun ayant ses forces et ses faiblesses. Nikon D6 embarque un capteur de 20,8mp capable de proposer une plage de sensibilité allant de 50iso à plus de 3 millions d’iso. De son côté Nikon Z9 est doté d’un capteur de 45,7mp et une plage de sensibilité allant de 32 à 25600iso. Pour la montée en iso, la messe est dite. Pour tout le reste, les performances de Z9 parlent d’elles-même.
Il subsiste deux sujets qui fâchent. Le premier concerne une dégradation des performances en basses lumières, le second l’apparition de bruit numérique dans l’image dès 800iso. Concernant ce point précis, quand mon interlocuteur a évoqué du bruit numérique à 800iso, je suis tombé de ma chaise. J’ai scruté attentivement mes clichés réalisés à 1600iso, je n’ai pas l’ombre du début de bruit numérique, mais je n’ai certes pas travaillé à 4000iso ou au delà. Quant à une supposée faiblesse de l’AF en basse lumière, je suis aussi perplexe. Pour ma part, j’ai été bluffé par la puissance de l’autofocus. La plupart des photographes avec qui j’en ai parlé sont unanimes. L’AF de Z9 est une tuerie, le suivi 3D est bluffant ! Reste à savoir aussi quelle optique est utilisée. Et comment le Z9 est paramétré.
En revanche, une faiblesse a été détectée et confirmée, elle concerne la qualité du jpeg produit par Nikon Z9. Lorsque celui-ci produit un fichier jpeg, il propose une interprétation du fichier brut et pour ce faire il ne dispose que d’une fraction de temps. Le boîtier doit proposer en une miliseconde un fichier jpeg cohérent et il semble qu’à ce niveau le bât blesse. Pour ma part, je ne travaille qu’en RAW, tant sur Z6 que durant ma journée avec Z9. Je réalise mon editing sur Capture One Pro. Le fichier RAW produit par Nikon Z9 est considéré par de nombreux photographes comme l’un des meilleurs du marché. Par contre, le fichier jpeg n’est pas du même calibre. C’est un problème semble-t-il référencé sur lequel Nikon serait en train de travailler. On peut espérer qu’un prochain firmware corrige ce défaut.
L’autonomie
Sur ce point précis, l’autonomie, les points de vue des photographes équipés de Z9 divergent radicalement. Certains l’estiment largement suffisante quand d’autres me disent le contraire. L’autonomie d’un boîtier dépend essentiellement de l’usage qui en est fait. Pour ma part – c’est un exemple – je n’utilise jamais l’écran LCD arrière. Pour moi, tout se passe dans le viseur. L’écran de contrôle est également désactivé et quand je n’utilise pas mon boîtier, par exemple entre deux sessions, j’ai pris l’habitude de l’éteindre.
Deux points ont sans doute agacé certains photographes. D’abord le prix de la batterie supplémentaire EN-EL18d affiché en boutique pour la modique somme de… 250€ ! Ensuite le fait que Nikon livre avec Z9 un chargeur simple slot et que le temps de chargement soit relativement long. On peut toujours conseiller à ces photographes d’acheter une batterie compatible, il leur en coûtera moins de 60€. Et un chargeur de batterie double slot (le même que celui utilisé pour D6) se paie également 60€.
La perfection n’est pas de ce monde.
Pour réaliser Nikon Z9, la marque jaune a dû faire des choix. Parmi eux, le choix d’un capteur maousse de 45,7 mégapixels qui induit évidemment une montée en iso singulièrement réduite par rapport à un D6. Je me souviens d’avoir évoqué le sujet avec un photoreporter qui venait de commander un Z9. Il m’avait simplement répondu qu’il ne montait quasiment jamais au delà de 3200iso et c’est aussi mon cas. Alors certes Nikon Z9 a sans doute des failles, mais elles me semblent tellement minimes par rapport à la puissance de tout ce que propose ce boîtier ! Et je ne parle pas seulement de l’autofocus…
En revanche, un point est rarement abordé, c’est l’étendue des possibilités techniques proposées par Z9. Plus que nul autre, c’est un boîtier qui demande une parfaite maîtrise et une compréhension globale. L’autre point qui me semble essentiel, c’est le choix des optiques. Je sais que certains d’entre vous vont bondir à la lecture de ce qui va suivre. Il est certes possible d’utiliser des optiques F via la bague FTZ mais si on souhaite tirer le maximum des possibilités d’un boîtier comme le Z9 je pense que le meilleur choix c’est d’embarquer des optiques de la gamme Nikkor S.
Finalement, le seul défaut de Nikon Z9…
C’est son poids ! m’avait répondu un ami photographe et là, je veux bien le croire. Aux Vieilles Charrues, j’ai trimballé la bête et son 100-400 pendant une journée et j’étais content que ça se termine. Arrivé à un peu plus de deux fois la trentaine, j’apprécie l’aspect compact d’un Z6, même si, parfois, même le combo Z6 et Nikkor 24-70 f/2,8S me pèse. J’envie beaucoup les photographes qui travaillent avec ce boîtier aux fonctionnalités et aux performances dantesques. Je caresse l’espoir que Nikon nous propose bientôt un boîtier compact, embarquant des fonctionnalités proches de Nikon Z9. Ce boîtier là pourrait bien remplacer mon actuel Z6. Stay tuned.
• photos d’illustration titre, crédit photo Nikon corp. Autres clichés crédit photo Hervé LE GALL.
Sylvain Crouzillat dit
Bonjour,
Heureux propriétaire d’un Z9 et de son 24-70 2.8 Z depuis juillet.. Je me permets de commenter.
Déjà l’autonomie est monstrueuse avec une batterie d’origine et une batterie à 80 euros, j’ai pu couvrir la coupe de monde de Vietvodao sur 2 jours avec plus de 6000 photos sans aucun stress sur l’autonomie.
Pour ce qui est du poids il est moins lourd que mon D850 avec le grip donc perso je n’ai pas de problèmes sur ce points.
Par contre il y a 2 points qui me pose problème :
– Le bruit comparé à mon D850 dès que l’on débouche les ombres on y a droit beaucoup plus qu’avec mon reflex, par contre j’ai l’impression que l’on récupère beaucoup plus d’informations dans les hautes lumières, du coup avec les D850 je sous exposait pour déboucher en post prod. j’essaie de perdre cette habitué malgré cela j’ai l’impression d’avoir plus de bruits mais je me dit que le problème vient peut être de lighroom …
– l’autofocus :effectivement dans bien des conditions c’est une tuerie, mais du coup c’est d’autant plus frustrant quand il se met à pédaler dans la semoule.
En basse lumière quand la lumière est bien moindre que lors d’un concert mon D850 reprend le dessus. Avec le Z9 on peine à faire le point et il n’est pas toujours bien fait.
Autre problème de l’autofocus la tendance à passer d’un sujets en première plan à un focus à l’arrière plan est assez agaçante, Les maj de firmware on partielle corriger ce problème mais il reste toujours présent alors que visiblement chez Sony ou chez canon ce phénomène n’existe pas.
Malgré quelques problèmes de jeunesse que les firmwares viennent corriger petit à petit, je kiff ce boîtier et je me demande comment on peut re passer au Z6 après avoir joué avec un tel monstre ;-p peut être en espérant l’arrivée prochaine du Z8.
Hervé LE GALL dit
Merci Sylvain pour ce feedback ! Ce qui m’interpelle évidemment c’est d’abord le bruit. Il se produit à quel niveau d’iso ? Ensuite l’AF et cette tendance à passer front focus/back focus. Il y a peut-être (je dis bien peut-être) un paramétrage à trouver….
Sylvain Crouzillat dit
Vu vos rapports avec nikon je me dit que c’est le bon endroit pour déposer ma Wishliste pour les prochaines évolutions du firmware 4.0 pour le Z9
– pre release capture raw (quitte à avoir moins de photos)
– Raw 30fps en DX ou avec une résolution inférieure au 45mpix.
– Crop 1.3 comme sur D850 permet un recadrage et également d’avoir moins de pixels dans certaines applications.
– Pouvoir sélectionner le type de sujet avec le bouton AF placé à l’avant du boîtier.
– Filtrer par date l’affichage des photos (le filtre existe pour la suppression mais pas pour l’affichage alors que pour l’affichage on peut filtrer par exemple sur le nombre d’étoiles)
– La possibilité d’avoir un rendu des longues expositions durant la prise de vue (comme ce que fait Olympus) cela permet de voir si l’effet que l’on cherche à créer est suffisant où pas.
– Un mode silencieux à plusieurs niveaux. actuellement le mode silencieux désactive beaucoup de choses et pas seulement le son de l’obturateur (flash, stabilisateur…) un mode silencieux sur 3 voir 4 niveau serait idéal 1 : pas de silencieux activé, 2 : desactivation du son obturateur. 3 : desactivation de la stabilisation 4 : desactivation de tout dont le flash. Actuellement il est possible de désactiver le son de l’obturateur par les menus mais pouvoir tout gérer au même endroit dans le menu i serai un plus.
Hervé LE GALL dit
« Vu vos rapports avec nikon je me dit que c’est le bon endroit pour déposer ma Wishliste pour les prochaines évolutions du firmware 4.0 pour le Z9… »
LOL. 🙂