On dit de ces trois optiques qu’elles sont le trio indispensable, la sainte trinité. À elles trois, elles couvrent un champ focal qui va du très grand angle au télé-objectif, comprendre de 14 à 200mm. Pour peu que vous ayez dans votre poche un téléconvertisseur doubleur de focale, vous pouvez même monter à 400mm (en perdant deux diaphragmes dans l’histoire, mais c’est relativement anecdotique). Nikkor 14-24mm, Nikkor 24-70mm, Nikkor 70-200mm, ces trois cailloux ouvrant à f/2,8 sont depuis toujours les must have de la gamme Nikon.
En monture F, sur mes appareils reflex, j’ai utilisé ces optiques, en particulier l’inénarrable 70-200mm f/2,8 VRII. Il restera l’une de mes optiques de prédilection, que j’utilise encore aujourd’hui, dix ans après son achat, tant sur mon D500 que sur mon Z6 (via la bague FTZ). En revanche, je n’ai jamais apprécié Nikkor 14-24mm et sa lentille frontale démesurée. Lourde, pas discrète pour un rond, incapable d’embarquer le moindre filtre, c’était à mes yeux une optique exhibitionniste. Je lui préférais Nikkor 16-35mm f/4, au range plus vaste qui n’était pas sans me rappeler quelques merveilleux souvenirs de ma période Canon.
Nikkor 14-24mm f/2,8 S. Première classe
Et puis Nikon Z est arrivé, avec sa monture aux dimensions et aux performances stratosphériques. J’ai immédiatement signé, dès la première annonce, pour Nikkor 24-70mm f/2,8 S, dont je savais qu’elle allait couvrir 95% de mes besoins en reportage. Un choix que je valide aujourd’hui, tant je n’hésite pas à dire que cette optique est l’une des meilleures que j’ai utilisée, toutes marques et tous formats confondus. Je fais peu de paysage mais je cherchais une optique abordable, tant en terme de prix que d’encombrement et de poids. J’ai trouvé mon bonheur avec Nikkor 14-30mm f/4 qui conjugue de nombreuses qualités. Un range large, une excellente qualité optique, un prix raisonnable, un encombrement et un poids réduit. Après une période de sommeil et d’inactivité photographique, dûe à la pandémie, mon tandem Z6 et 24-70 ont repris du service en fin d’année. L’occasion pour moi de redécouvrir les performances exceptionnelles de ce combo et en particulier de cette optique.
Dans le même temps, Nikon a dégainé Nikkor 14-24mm f/2,8 S. J’ai immédiatement réalisé que cette optique allait offrir un service premium, dans tous les sens du terme, de sa liste de specs longues comme le bras, à son prix qui coûte aussi un bras (comptez 2699€ au bas mot). Avec cette annonce, Nikon bouclait la boucle, terminait le cycle du trio infernal. Il restait à voir les images, évaluer les difficultés, déceler une quelconque aberration chromatique ou perte de netteté à pleine ouverture. On allait bien lui trouver le petit défaut qui justifierait qu’on ne l’achète pas, qu’on se contente de Nikkor 14-30mm quitte à bosser à f/4. Seulement voilà. Les images sont là et elles sont stupéfiantes, doux euphémisme. Il se pourrait bien que Nikon ait proposé, avec Nikkor 14-24mm f/2,8 S une optique de très, très gros calibre.
• Nikkor 14-24mm f/2,8 S. Tout pour (me) plaire.
Je sais pourquoi j’aime mon optique Nikkor 24-70mm f/2,8 S. Parce que dans le viseur de mon Nikon Z (et quand je dis viseur, j’entends par là visée réelle), au delà de la pureté d’image, j’apprécie de pouvoir piloter l’ensemble des opérations. Réglages, cadrage, prise de vue, visualisation de l’image en utilisant un bouton de fonction placé sur mon optique. Ça peut semble anecdotique, ce bouton de fonction, mais ça ne l’est pas. Dès que je change de caillou, que je monte par exemple mon 14-30, je sais qu’il va me manquer un truc. Rien que pour ça, Nikkor 14-24mm f/2,8 S trouve grâce à mes yeux. Et là vous me dites ? Mettre 2700 balles pour un bouton de fonction, ça fait cher le bouton. C’est pas faux. Mais il y a le reste, tout le reste, qui vaut lui aussi son pesant de cacahuètes…
On passe vite fait sur la construction optique. La fiche technique est digne d’un restaurant étoilé, je cite. 16 lentilles en 11 groupes (dont 4 lentilles en verre ED, 3 lentilles asphériques, des lentilles avec traitements nanocristal et ARNEO, et une lentille avant traitée au fluor). Une lentille frontale plate de 112mm de diamètre, plate ce qui signifie qu’on peut monter des filtres, ce qui n’était pas possible pour mémoire avec la lentille globuleuse en monture F. Sur la partie arrière on trouve un logement permettant de monter des filtres couleurs en gélatine, ce qui va intéresser naturellement les vidéastes. Car oui, cette optique dont l’autofocus est aussi fluide que silencieux va aussi faire des merveilles en vidéo.
Je passe rapidement sur la construction en alliage d’aluminium, la résistance à la poussière et l’humidité. Un poil plus lourde que le 14-30 (650g contre 485g), ce qui s’explique par une construction optique radicalement différente. Restait à checker les performances optiques. Je voulais voir. J’ai vu.
• Une qualité d’image qui subjugue
Je n’ai pas testé moi-même Nikkor 14-24mm f/2,8 S. J’ai seulement regardé les images fournies par Nikon et je vous invite à en faire autant. On ne va pas se raconter d’histoires, même si les plus septiques d’entre nous diront qu’il s’agit d’images fournies par le constructeur, on a quand même affaire ici à du très haut niveau. Sans l’accès aux données EXIF, impossible de savoir l’APN utilisé (probablement Z7), ni la sensibilité, l’ouverture ou la focale. On peut présumer que les images ont été réalisées à 14mm et à f/2,8 afin d’illustrer l’absence de vignettage à pleine ouverture, d’aberration chromatique ou de lumière parasite. J’ai en mémoire ce que j’ai pu obtenir avec Nikkor 14-30mm f/4 j’imagine aisément le bénéfice de cette optique premium.
Reste maintenant à répondre à la question posée. Faut-il craquer pour Nikkor 14-24mm f/2,8 S ou pas ? Comme toujours, il s’agit d’évaluer votre besoin. Si vous travaillez dans la photo de nature, le paysage, la photo d’architecture, c’est une optique indispensable. Montée sur Nikon Z6 II ou Z7 II, elle va vous permettre de réaliser des images d’une qualité époustouflante. Si vous avez déjà dans votre sac un 24-70mm f/2,8 S, voire un 70-200mm f/2,8 S vous allez sûrement craquer, histoire de compléter votre trio.
• Conclusion. Un grand oui.
Est-ce que cette optique vaut son prix de 2699€ ? Incontestablement, oui. C’est une optique qui va enthousiasmer autant les photographes que les vidéastes. Il faut d’ailleurs noter, à ce sujet, que Nikon s’impose doucement mais sûrement sur le segment de la vidéo et cette proposition d’optique disposant d’un tiroir pour filtre gélatine n’est pas le fruit du hasard. L’autofocus fluide et silencieux, la « quasi absence de focus breathing » pour reprendre les termes prudents de la fiche technique Nikon sont autant de signes envoyés aux vidéastes. Bref, ici on tape dans le très haut de gamme, avec des specs de haut niveau et la promesse de rendu d’image qui va avec, promesse tenue.
Comme toujours, le seul point d’interrogation qui va subsister c’est le budget à consentir dans l’acquisition d’une optique de ce calibre. Évaluer ses besoins, les mettre en adéquation avec son budget. Pour ma part, je vais continuer mon chemin avec mon 14-30mm f/4 qui suffit à mes besoins. D’autant qu’il ne fait pas de doutes que l’année qui s’annonce va être pleine de belles promesses, tant en propositions optiques (Nikkor 85mm f/1,2 ?) que de boîtier monobloc Z8/Z9. De ce point de vue, vous pouvez faire des économies…
• crédit photos : Nikon corp.
• Cet article n’est (malheureusement) pas sponsorisé par Nikon.
julien dit
merci pour cette preview 😉
Pas habitué du tout à une telle focale. Idéalement j’aurais préféré un 15-35 f2.8 qui me semble plus polyvalent, mais tout le monde est très élogieux sur cette optique Nikon S, de même que sur les deux autres zooms f2.8…
Le prix pique un peu c’est sûr mais on est loin des prix Leica et la qualité se paie (hélas).
Au niveau créativité j’avoue que je ne saurait pas trop comment m’y prendre avec ce genre de focale. Je me ferai peut-être plutôt la main sur le 14-30 f4 un de ces jours…
Hervé LE GALL dit
@julien je confirme que Nikkor 14-30mm f/4 est excellent et accessoirement coûte 1000€ de moins tout en ayant un range plus vaste.