Il y a des fois, comme ça, où on a envie de se la prendre et de se la mordre. Des fois où l’on se dit qu’on prendrait bien un billet d’avion business class juste pour le plaisir d’aller claquer la gueule d’un connard, à l’autre bout du monde. Des fois où on déprime, où on se sent étrangement seul. Shit happens. Ouais ça arrive, comme la merde. Je déteste le consensus, qu’il soit mou ou pas, mais je n’ai pas besoin de manger de la merde pour savoir que ça en est. Tenez, au hasard. Izia. Ouais, la fille d’Higelin, vous savez ? Le pur talent, l’héritière de Janis Joplin, en mieux et surtout en plus jolie (sic). Aux Charrues, elle n’avait pas chanté depuis trente secondes, massacré deux riffs en mi mineur sur sa jolie Gibson SG toute neuve (que cette guitare, elle avait dû sûrement suer sang et eau, à travailler comme caissière chez Lidl pendant un bail pour pouvoir se l’offrir) que je savais déjà comment cette fille avait calibré sa carrière, du manager qui va bien au plan média propre comme une culotte neuve signée Petit bateau. Allons ! De vous à moi, Izia je m’en tamponne ! Après tout, si elle trouve du chaland pour alimenter sa petite entreprise, pourquoi pas ? Non, il y a deux trucs qui m’escagassent sévère. D’abord, quand on fouille un peu la scène rock, je veux dire la vraie, la dure, la tatouée, quand on traîne régulièrement ses godasses dans les petits clubs qui sentent la bière et l’animal, des meufs qui chantent du rock avec un vrai gros talent, on en trouve. Plein. Elles n’ahannent pas trois accords sur des grattes payées cash par leur dad, elles chantent juste et elles sont en place. Première chose. Ensuite, et c’est pas le moins important, quand on n’a pas l’once de début d’une culture rock, on ferme sa gueule et on vient pas la ramener à comparer la première venue à Janis Joplin, juste parce qu’on connaît « Cry baby » pour l’avoir vaguement entendu sur une compile « le meilleur de le rock volume 1« . Ou alors on parle des bigorneaux sur la côte, ou du temps qui passe. Mais on ne vient pas s’extasier, crier au génie et s’exercer à des comparaisons pour le moins casse-gueule. Parce que, comme le disait mon Desproges à moi, la culture (rock) c’est comme les parachutes, quand on n’en n’a pas on s’écrase.
C’est encore plus emmerdant quand le consensus semble général. Je me suis retrouvé comme ça, entouré de gens extatiques, étrangement seul, à me demander si j’étais le seul à avoir des oreilles. Ou un feedback musical, voire les deux. Et puis je suis tombé sur une chronique de Johanna Seban publié sur le site des Inrocks, que je ne lis plus par ailleurs depuis un bail. La chronique relate les Victoires de la Musique (que je ne regarde plus par ailleurs depuis la pathétique prestation de Cali). À la lecture de ce billet, j’ai eu l’impression de ne pas être seul au monde. Je cite.
« …Pire que de la panique en revanche, c’est une gigantesque crise d’angoisse, une envie de changer de métier, qu’on aura ressenti devant la prestation d’Izia (victorieuse dans les catégories album rock, et révélation scène). Parce que si son père est tombé du ciel, nous, on est tombés des nues et on s’est fait très mal devant autant de vulgarité rock, de lourdeur et de grosses ficelles- c’est pas parce qu’elle a 19 ans qu’on va trouver ça bien, c’est pas parce qu’elle cartonne qu’on va s’y intéresser… »
Johanna Seban, merci. Vous ne saurez sans doute jamais à quel point votre édito m’a fait du bien, comme une petite voix qui me dit à l’oreille « Alors ? Tu vois, tu n’es pas seul. » Ah ! Johanna ! Je prendrais volontiers un billet de TGV première classe pour aller boire une tasse en votre compagnie à Montparnasse. Car si les mots usent (les notes aussi, surtout quand elles sonnent faux) ils peuvent aussi faire du bien. Je m’en vais de ce pas me réabonner aux Inrocks. Vous pouvez demander un bonus à votre rédac’ chef. Grâce à vous, les Inrockuptibles vont regagner un lecteur.
krikri dit
spécial dédicace :
http://www.le-hiboo.com/22154-izia-espace-sfr-paris-23-03-2010
🙂
harvey dit
Lol.