Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai en mémoire une photo de mariage, affichée en vitrine, dans le magasin de photo de Pierre Le Grand, lorsque j’étais enfant, à Concarneau, en face de la Ville Close. Quand j’étais minot, j’étais fasciné par ces jeunes femmes en robe de princesse, qui vivaient là le plus beau jour de leur vie. Et puis j’ai grandi. À l’adolescence, la passion de l’image aidant, mon regard sur la photo de mariage est devenu plus critique, voire plus cynique. Je regardais ces photos d’un œil distrait ou amusé, surtout si j’y reconnaissais un de mes potes habillé comme un pingouin, engoncé dans son costume trois-pièces. Ah ! Les photos posées sur les rochers de granit de la plage Cornouaille, face au bleu de l’océan, c’était presque une figure imposée, pour le photographe de mariage de l’époque. Et sans faire offense à Pierre Le Grand, chez qui j’ai passé beaucoup de temps à contempler la gamme de matériels estampillés Canon, toutes les photos de mariage de l’époque avaient une singulière tendance à se ressembler. Mais ça, comme on dit, c’était avant.
La photo de mariage est un genre à part entière.
• Photographe et père de la mariée. Double bonus.
Le week-end dernier, je me suis retrouvé, une fois n’est pas coutume, dans le double rôle extrêmement casse-gueule de père de la mariée et de photographe de mariage. Avec cette expérience, j’ai eu l’occasion de vivre un exercice inédit pour moi. On a un peu trop tendance à croire que la photo de mariage est un sous-genre, voire un genre facile. Il n’y a rien de plus fondamentalement inexact. La photo de mariage est un genre photographique à part entière qui a ses codes. Est-ce que n’importe quel photographe lambda ferait un bon photographe de mariage, rien n’est moins sûr. Pour ma part, j’ai vécu l’expérience en trois temps. Avant le mariage proprement dit. Là, c’est plus du reportage journalistique que de la photo de mariage, avec le but avoué de couvrir l’évènement d’une vie, de sortir LA photo, de capter LE moment, des regards échangés, des sourires, des larmes. Pour le photographe, c’est le même niveau de difficulté qu’un reportage classique, mais ça n’a rien de facile. Je repensais à ce que me disait Mathieu Ezan, quand il évoquait le fait qu’il ne souhaite pas couvrir un mariage chaque semaine : « Je ne veux surtout pas rentrer dans une routine, je veux essayer de conserver une certaine fraîcheur dans le regard, une motivation aussi… » Quand je regarde les photos de Mathieu, elles transpirent le côté rock’n roll du photographe-vidéaste musical qu’il est. Puis vint la mairie. Là, pour moi, c’était double bonus. Père de la mariée, je l’accompagne, elle est à mon bras, je me fais shooter par un second photographe (familial, lui aussi), puis une fois la tâche accomplie, je redeviens photographe. J’ai en mémoire les propos de Mathieu Ezan : « C’est du one shot. Tu n’as pas le droit de te rater. » Je pense que je serais en train de shooter U2 en live que je serais moins stressé. One shot. Tout va très, très vite, lecture, consentements, signature, en quelques minutes l’affaire est dans le sac. J’ai tombé la veste, sous l’œil goguenard de François Hollande (par Depardon), j’ai l’impression de ressembler à Manuel Valls à un congrès socialiste, ma chemise est trempée. Un sous-genre la photo de mariage ? Laissez-moi rire. Et comme dirait la blonde peroxydée de la pub SFR, c’est pas fini ! Vin d’honneur, petits fours, champagne. Pour moi, ça ne sera aucun des trois, shooter avec un coup dans le museau, moi je ne sais pas faire. L’espace est plus réduit, c’est encore plus compliqué et ça va encore monter d’un cran pour le dîner, avec cette table en enfilade qui me semble tellement immense et si difficile à cadrer. Rude soirée, mais où je vois briller les yeux de ma fille et le reste est finalement très accessoire…
• La photo de mariage. Love, actually.
J’ai beaucoup pensé aux photographes de mariage dont je me sens proche, des gens comme Mathieu Ezan, Cédric Duhez et naturellement Gérald Géronimi. D’ailleurs, en confidence, lorsque j’avais un coup de mou pendant le shooting, j’entendais la voix de mon ami Gégé me murmurer, avé son accent de Marseille « Allez cong ! T’inquiètes pas, ça va aller, c’est bientôt fini ! » Et lorsque je sentais le poids de mon Nikon D4s et de mon 70-200 peser dans mes bras, Gérald me disait en riant « Vé ! Le prochain mariage, tu prendras un Fuji ! » La photo de mariage un sous-genre ? Il ne faut jamais avoir couvert un mariage comme photographe pour oser avancer une ânerie pareille ! Au contraire, pour être un bon photographe de mariage, en 2015, il faut combiner de nombreuses qualités, être réactif, maîtriser la technique, la lumière, le live et l’émotion. C’est là où des photographes comme Géronimi (ou comme Ezan ou comme Duhez) font toute la différence. Il faut aussi aimer les gens, avoir envie de partager ce moment unique de leur vie, un moment fait d’amour et de passion. Une dernière chose. Avant de fixer votre choix sur un photographe de mariage, regardez attentivement son book, son style et surtout, allez à sa rencontre, voyez si le courant passe. C’est essentiel dans la réussite de ce qui sera pour les mariés, le souvenir éternel du premier jour du reste de leur vie.
• merci à mes amis Mathieu Ezan, Cédric Duhez, Gérald Géronimi pour leurs conseils précieux.
• tous mes vœux de bonheur à Pauline et Olivier.
• La photo d’illustration m’a été inspirée par Gérald Géronimi, merci à lui.
Jimmy dit
La photo de mariage est pour moi, la pratique photographique, la plus compliquée qui soit! C’est un vrai métier, contrairement à ce que certains pensent!
Car, tu n’as pas le choix, tu dois absolument ramener des photos et pas seulement de simples photos!
Perso, pour avoir pratiqué il y a longtemps, je n’ai jamais eu autant de stress que sur les mariages. Et encore maintenant, même si cela ne fait pas tout…. il y a le numérique.
Je me rappelle de l’époque où n’existait que l’argentique…. là c’était carrément tu loupes le développement des pelloches ou le labo te perds tes précieuses photos et là tu étais mal, même très mal!
En même temps, j’ai encore entendu récemment, un photographe qui avait perdu toutes ses photos suite à un crash disque…. il n’avait pas de sauvegardes..
Là c’est comme les mecs qui ne travaillent qu’avec un seul boitier….. je ne ferais pas de commentaires sur leur professionnalisme!
Sinon en parlant de « mode », en ce moment la mode des mariages, c’est l’Instax…. en fin de soirée où tous les invités font « Fujiiiiiiiii » devant un fond neutre avec de fausses moustaches ^^ 😉
gaelle dit
Cet article est beau parce qu’il y a l’amour d’un père pour sa fille, d’un photographe pour son métier et tout le respect qu’il a pour ses collègues. Vive l’amour. #Peace
Cédric Duhez dit
Un très bon article, plein de vérités…