Lorsque j’ai su que François Audrain venait de livrer à nos platines un nouvel album (« Les soirs d’été« ), je me suis empressé d’aller l’écouter sur Spotify et comment dire ? Dès la première écoute j’ai été conquis par l’ensemble de l’abum. Il faut vous dire que je suis client de la petite entreprise de Monsieur Audrain, que j’ai découvert totalement par hasard, par la vertu de la proximité, à la lettre F de mon iPod, de l’excellent Florent Marchet. Ces deux-là font la paire et partagent de nombreux points de vue convergents sur la vie et une certaine forme de cynisme voilé qui n’est pas pour me déplaire. Bref, à la suite de l’écoute sur Spotify, j’ai immédiatement commandé l’album sur internet. Dès les premières mesures, dès le premier titre, « pourquoi toi », je ressens ce qui fait de François Audrain un artiste absolument unique. Une voix veloutée, qui me semble nettement plus affirmée que sur l’album précédent (le néanmoins excellent « Chambres lointaines« ), d’ailleurs ce nouvel album sonne brillamment, le travail et le soin apporté à sa réalisation sont palpables et le résultat est là. Tout est bon, voire très bon et même au-delà dans « les soirs d’été », rien à jeter, rien à délaisser. Chaque chanson est une pépite, un petit trésor, servie par une mélodie ciselée. J’imagine bien François Audrain à l’oeuvre, besogneux, insatiable, gourmand des notes. Et que dire des mots, car Audrain est d’abord et avant tout un songwriter doué, il n’a pas son pareil pour envoyer des textes d’un cynisme désinvolte volontiers mâtiné de désespérance : « si on m’avait dit pourtant, que tu avais tant d’amants, je n’saurais te retenir, les saisons se décomposent, toi tu te métamorphoses, je ne sais plus qui je suis… » Sur des formats courts, François Audrain raconte ses petites histoires d’amour qui finissent mal, ses amours contrariées, ses déconvenues, mais jamais une porte qui claque. Et c’est justement ce qui me bouleverse dans le petit monde de François Audrain, c’est aussi ce qui me touche, tout est dit en nuance, avec un luxe de mots choisis et une connivence avec des mélodies mélancoliques, mais sans tristesse. Le très beau « Rimbaud » (en duo avec Barbara Carlotti) en est la parfaite illustration, on a juste cette envie de se poser, de se laisser bercer par les voix, porter par les petites histoires, se laisser submerger par l’émotion et les larmes, en songeant à ce que François Truffaut faisait dire à l’homme qui aimait les femmes : « pleurer, ça fait un petit plaisir ». Quelque soit le registre, les mots de François Audrain, fine lame dans le registre, font mouche. Il sait être engagé avec « tu ne sauras jamais« , un texte touchant sur les républicains espagnols, ou bien poète et nostalgique (« les retours de l’école« ). Avec ce nouvel album, je réalise à quel point le travail de cet auteur compositeur m’est précieux. Le secret, au fond, c’est que François Audrain, ça donne envie. Ça donne envie de partir ailleurs, avec la femme que j’aime, rouler de nuit sur une highway, quelque part à l’autre bout du monde ou n’importe où, en écoutant « c’est toujours la nuit« . Oui, c’est ça. Audrain, ça donne envie d’ailleurs. On aimerait bien que François Audrain soit notre ami et tout compte fait non, c’est mieux comme ça. On ne sait pas trop qui il est, d’où il vient, où il va. De temps en temps, il nous envoit une lettre, un petit miracle dont il a le secret qu’on savoure avec gourmandise. « Les soirs d’été » est de ces secrets qu’on partage avec les gens qu’on aime et qu’on savoure sans modération. A découvrir. Et le plus vite sera le mieux…
À propos Hervé LE GALL
Hervé "harvey" LE GALL, photographe auteur basé à Brest au début du monde. A trainé ses godasses et ses reflex dans la plupart des coins sombres de la région Bretagne. Photographe-maison du Cabaret Vauban, photographe officiel des Vieilles Charrues (entre autres). Intransigeant, il aime la photo, les lasagnes, le kouign amann et le Breizh Cola. Rédac chef de SHOTS.