J’ai décidé de couvrir les Vieilles Charrues 2019 avec Nikon Z6. « Ah… Mais tu auras quand même ton reflex en backup, hein ? » On m’a regardé avec cet air navré de l’ami qui s’inquiète pour vous. Couvrir intégralement cette édition des Vieilles Charrues avec ce boîtier mirrorless que j’ai finalement assez peu testé, était-ce bien raisonnable ? En fait, ce qui m’a motivé, c’est très exactement ça. Est-ce que Nikon Z est capable de couvrir un festival de ce calibre ? Quid, en résumé, de tout ce qui a été dit, critiqué, décortiqué, analysé, dénoncé par des gens qui n’ont, pour la plupart, pas véritablement travaillé avec Nikon Z ? Vous savez ? La montée en iso, l’autonomie, l’ergonomie et par dessus tout, l’autofocus. Alors oui, j’en conviens. Embarquer Nikon Z6 aux Vieilles Charrues 2019, c’était hautement casse-gueule. Mais finalement, je ne prenais pas un grand risque, à part naturellement celui de me ramasser, de ne ramener aucun cliché valable du festival. De décevoir mes ami·e·s et finir éleveur de chèvres en Afghanistan. J’étais prêt à prendre ce risque. Et puis je savais que je pouvais compter sur la présence bienveillante et Ô combien rassurante du staff de Nikon Pro Services, présent comme chaque année au festival des Vieilles Charrues, épaulant les photographes équipés en Nikon. On n’était plus dans un test terrain, on était dans le concret. Un choix qui m’engagerait pour l’avenir. Qui répondrait à une question.
Vieilles Charrues 2019 et Nikon Z6, de concert
Car en fait, mon idée c’était ça et rien d’autre. Est-ce que moi, le photographe équipé en reflex depuis toujours, j’étais prêt à franchir le rubicon ? À sauter dans le vide, au risque de m’écraser. Je le savais, me connaissant et je l’avais d’ailleurs toujours dit. Le jour où je passerais à l’hybride, il y aurait écrit Nikon dessus et j’arrêterais de travailler en reflex. C’était un postulat, autant qu’un pressentiment. La suite de l’histoire m’a clairement donné raison. Bizarrement, je n’avais aucune appréhension, quelques jours avant ces Vieilles Charrues 2019. J’avais déjà un peu bossé avec Z6 et je connaissais ses capacités. Il restait juste à choisir mon équipement et là ça a été vite fait. Z6 et deux optiques S. Le 24-70mm f/2,8 S, un caillou polyvalent par excellence et le petit 14-30mm f/4 S pour les plans de foule. En complément, le classique (et classieux) Nikkor 70-200mm f/2,8 VRII monté sur adaptateur FTZ. Une carte XQD Lexar 64Go (et une carte Sony 32Go dans la poche) et deux batteries de secours. Autant dire que j’avais décidé de voyager léger. Jeudi 18 juillet, j’arrivais à Kerampuilh, la fleur au fusil.
• Nikkor 24-70mm f/2,8 S. Pure optique.
Dès les premiers concerts, j’ai réalisé plusieurs choses. D’abord, ce que je pressentais sur le 24-70mm f/2,8 S s’est avéré juste. Mazette ! Quelle optique ! Parfaite à tout point de vue, si l’on excepte un détail de poids, si j’ose dire. Plus de 800 grammes à la pesée, quand la version f/4 en accuse 300 de moins. Est-ce que ça m’étonne ? Pas vraiment. Le prix aussi. Il faut compter 1000€ de plus pour la version f/2,8. Plus lourde, plus chère, certes. Mais dans le viseur cette optique ne déçoit pas, surtout dans la visée réelle du Z. Dès les premières images, j’ai compris que j’allais passer l’essentiel de ces Vieilles Charrues 2019 avec cette optique unique. Puissante, parfaite dès f/2,8 sur toutes les focales. Pas de distortion, pas de zones de flou, pas d’aberration chromatique. Mais voilà, 300 grammes et mille balles de plus. Normal. C’est au poids des lentilles (et à leur qualité) que s’évalue le prix d’une optique. Et le 14-30 ? Je ne peux pas vous dire, il est resté dans sa housse accrochée à ma ceinture. Je l’ai d’ailleurs rendu le lendemain à mes camarades du NPS. J’ai donc couvert les Vieilles Charrues 2019 avec deux optiques. Nikkor 24-70mm f/2,8 S pour la plus grande majorité des concerts, en particulier sur les scènes de proximité comme la scène Grall, l’embarquant aussi pour des plans larges sur la grande scène Glenmor ou Kerouac. Et l’incontournable Nikkor 70-200mm f/2,8, probalement une des meilleures optiques estampillées Nikon, un must, une définitive optique de référence.
• Vieilles Charrues 2019. Le monde du silence.
Vous l’avez compris, du point de vue optique, c’était le bonheur. Restait à checker comment le petit Z6 allait se comporter sur le terrain. Je dois à la vérité de dire que ce fut une des plus belles expériences photographiques que j’ai eu à vivre avec un boîtier Nikon, depuis belle lurette. En fait, je n’avais pas vécu une telle fluidité dans le shooting, un tel enthousiasme, un pareil étonnement depuis au moins dix ans, depuis mes premiers tests avec Nikon D3s. Ce moment où on réaise qu’on est en parfaite osmose avec le matos, qu’on se sent bien, à l’aise, confortable. Petit détail, qui peut sembler incongru à première vue. J’ai travaillé en mode silencieux pendant tout le festival. C’est merveilleux de pouvoir travailler en silence, sans que le monde extérieur ne perçoive un quelconque bruit. Seul au monde, l’œil dans le viseur. Quand je photographie, je suis autiste, plus rien n’existe. Nikon Z6 accentue encore ce sentiment : la qualité de la visée réelle, l’erogonomie du boîtier (ah ! Le bouton i permettant l’accès à l’ensemble des paramètres sans quitter l’œil du viseur, quel pied !). Autre détail, je ne travaille qu’au viseur, j’ai désactivé l’écran arrière LCD, résultat des courses une grosse économie de batterie ! À ce propos, j’ai couvert une journée de festival avec une batterie et demi. Donc avec deux batteries en backup j’étais tranquille.
• L’autofocus de Nikon Z est parfait.
Les concerts se sont enchaînés au fil des jours, confirmant tout le bien que je pensais de ce boîtier. Ironie du sort, j’étais entouré de gros reflex (qu’est-ce que c’est bruyant un reflex !), de très grosses optiques (on a vu quelques 180-400 dans la fosse, merci le NPS) mais paradoxalement je ne me suis jamais senti aussi léger, aussi libre que lors de cette édition Vieilles Charrues 2019. D’ailleurs ce cru #charrues19 restera pour moi l’un des meilleurs et pourtant c’était ma seizième édition, mine de rien. Je veux bien croire que mon compagnon de route, Nikon Z6, aura largement contribué au plaisir d’être là. Restent les images et la sensation d’après concert. J’ai travaillé comme à mon habitude, en mode manuel, privilégiant le mode AF-C suivi et autant le dire clairement, l’AF continu s’est avéré parfait, même avec des sujets très mobiles (je pense à Hubert Lenoir, Razorlight ou Christine and the Queens pour ne citer que ces trois-là). Au delà de la performance de capture du mouvement, j’ai apprécié la touche, le feeling très particulier qui se dégage de ce boîtier et des optiques, tant à la prise de vue qu’à la quaité du rendu des images. Et je ne parle même pas du confort de la prise en mains, de l’ergonomie, de la qualité du viseur électronique proposant quelques subtilités comme l’horizon virtuel. Ah ! Une chose encore, spécifique au 24-70, le bouton programmable qui tombe pile poil sous mon pouce gauche et que j’ai affecté à l’aperçu de la dernière image réalisée (c’est hyper pratique). À aucun moment je ne me suis senti contraint en quoique ce soit. Nikon Z6 est un boîtier souple, qui s’adapte parfaitement au terrain, tout en étant ultra réactif à tout point de vue, particulièrement en basses lumières.
• Nikon Z. Symphonie du nouveau monde.
Lundi 22 juillet. Les Vieilles Charrues 2019, c’est fini. Une bien belle édition qui m’a conforté dans mon intuition, celle de travailler désormais avec Nikon Z6. J’ai revendu mon D4s, j’ai commandé et reçu dans la foulée un Z6 et un 24-70mm f/2,8 S, avec un adaptateur FTZ sur lequel je monterai au besoin mon 70-200. J’ai conservé un reflex (l’excellent Nikon D500) qui sera dédié à certaines tâches spécifiques, mais pour l’essentiel de mon travail (concerts, corporate, reportages), ça sera Z6 en tandem avec le 24-70. Et la suite ? J’attends déjà l’annonce du 14-24mm f/2,8 S, prévue pour 2020. Il semble que Nikon ait noté dans sa road map, pour la fin de cette année 2019, le lancement d’un 70-200mm f/2,8 S mais à tout prendre je préfère patienter jusqu’en 2020. Si le 14-24 f/2,8 S est du calibre du 24-70, je sens qu’on va bien s’amuser. S’amuser ? Oui, s’amuser c’est peut-être une des grandes vertus de Nikon Z6, à mes yeux. J’ai retrouvé avec lui des sensations oubliées, l’envie d’explorer, d’aller chercher de l’image. Passer en mode DX, modifier mes paramètres, accéder à mes menus, visualiser mes images, sans quitter l’œil du viseur. Nikon Z6 est un boîtier qui en a sous la semelle, avec cette énorme monture et une conception technique qui lui ouvre tant de possibilités, qui modifie radicalement l’appréhension de l’acte photographique. Je ne sais pas vous, mais moi je trouve ça fascinant. Nikon Z, c’est le nouveau monde qui ne demande qu’à être exploré. C’est l’avenir et l’avenir n’attend pas.
• crédit photos : Hervé « harvey » LE GALL www.cinquiemenuit.com
• merci à Philippe et Ludovic du Nikon Pro Services pour leur soutien aux photographes pendant cette édition des Vieilles Charrues 2019.
• merci au staff et aux bénévoles du festival des Vieilles Charrues.
chiffon dit
Ce qui fait qu’on sent que c’est du matos vraiment bon, c’est la qualité des images prises. On sent que t’as grave apprécié son utilisation. Plus que les reflex deux fois plus chers.
Et quand on voit le prix du Z6… ça fait réfléchir (à un switch, me concernant : je sais que j’irai en mirrorless à terme, et aucun ne m’a autant convaincu en main que les Z).
Manu dit
Merci pour ce retour, les images sont superbes de précision. Ah il fait vraiment envie ce Z6, l’offre NIKON est super qualitative vous le confirmez. Dommage que les tarifs tapent si forts.
Le gain en passant de D4S à Z6 est cela dit plus évident pour vous que pour un amateur qui passerait de D600 ou D750 à Z6, car l’occasion manquée de NIKON est bien là selon moi : les images peuvent être superlatives, l’encombrement/poids n’a pas bougé d’un poil à la différence du tarif. A fortiori si l’on se voit contraint de passer par la bague FTZ le temps de reconstituer cagnotte et parc optique. Laissons murir nos décisions…
smy dit
Hello
J’ai remarqué cette année à Rock en seine un comportement étrange des photographes pros, devant la crash barrière. Ils shootaient, contrôlaient sur l’écran arrière, shootaient, contrôlaient, etc. J’ai sans doute du voir ça lors de tous mes précédents concerts, mais c’est la première fois que cela me surprend à ce point.
En 2019, avec Nikon et Canon qui sortent enfin leurs mirrorless, le reflex semble bien dépassé pour cet usage lors des concerts. La visualisation immédiate de la photo prise, sans quitter le viseur, est tellement agréable…
Mais ok, il faut racheter des boitiers…
Morénas dit
Bonsoir,
Je fréquente votre site depuis maintenant quelque temps. j’aime bien vos articles et évidement vos photos. .
Je pense que vous êtes en partie responsable de mon switch FujiX (XPro1, puis XT1, Puis XPro2 puis XT3) vers Nikon Z6. Apres une semaine avec le 24-70 4 et quelques jours avec le 50 1.8 S : Le bonheur ! Avec la Bague FTZ Sigma ART 35 et 85. Je garde le D850 et le 70-200 2.8 FL pour les grandes occasions … pour le moment 😉 Merci +++
Jean-Christophe
Benjamin dit
Merci pour cet article qui va me décider d’acheter le Z6.
Tout comme toi j’ai (encore) le D3S et le D700 qui du coup commencent à vieillir (quasiment 300 000 pour le D3S).
J’ai lorgné sur le Z6 mais j’hésitais à cause de l’autonomie de la batterie, du seul slot de carte et certainement un AF légèrement moins précis que le Sony A7III.
Du coup en voyant que tu t’en est très bien sorti sur un gros événement comme celui-ci, du coup mes mariages d’une durée de 14h ou mes shootings de 8h pourront se faire à l’aide de 2 batteries en utilisant uniquement l’EDF.
Il n’y a plus qu’à l’essayer … et l’adopter !
Hervé LE GALL dit
@benjamin Je n’utilise quasiment plus de reflex depuis que j’ai Z6 et le 24-70 f/2,8 S (je précise car les qualités de cette optique sont véritablement essentielles). L’autonomie ? J’ai un jeu de trois batteries, une Nikon et deux Weiss achetées sur Amazon (50 balles les deux, c’est parfait). Deux cartes XQD 64Go (Lexar et Sony) plus deux cartes XQD 32Go (Sony). Quant à l’AF, sur le Z6 il est redoutablement efficace (à mon avis largement aussi bon que celui de Sony A7 III). En revanche, il faut bien maîtriser les techniques AF sur le Z. Il n’y a pas un AF sur Z6 mais des AF. Au final, Nikon Z est un boîtier enthousiasmant, qui m’a redonné le plaisir de photographier.