Billet du lundi 4 septembre 2017. J’aime pas le lundi. Ce week-end, je n’ai pas fait de photos, par contre j’ai bossé sur mon book en ligne Cinquième nuit tout le week-end. Faire des photos, c’est bien, encore faut-il les vendre. Et pour une fois, je suis assez content, je trouve que mon site a une gueule potable. Bosser sur ses archives, c’est aussi l’occasion de revoir des photos. C’est ça le côté magique de la photo, pouvoir se balader dans le passé. De se dire qu’un reflex comme EOS 20D en 2004, ça sortait déjà du matos pas dégueu. Miossec et Birkin à l’Hôtel Vauban ou Roy Haynes au Cabaret Vauban tapés avec un modeste 20D, c’était pas trop mal pour un capteur APS-C 8mp… De revoir des clichés faits avec EOS 1D Mark IV (Matthew Bellamy de Muse sous des trombes de flotte aux Charrues en juillet 2010), avec une petite nostalgie pour Canon et ses optiques de serie L. D’ailleurs, pourquoi j’ai quitté Canon, finalement ? Sans doute parce que je ne trouvais pas le reflex plein format qui me convenait. EOS 5D Mark II s’était d’ailleurs avéré l’expérience la plus catastrophique de mon parcours de photographe, même si je réalise avec le recul que j’ai sûrement eu tendance à en rajouter, à en faire des tonnes, à noircir le tableau. On ne se refait pas. Quelques mois plus tard, j’achetais Nikon D3s et là, j’avais la révélation. C’était le satori, l’inaccessible étoile. Nikon avait réalisé l’exploit du siècle en fabriquant le reflex avec lequel j’étais en adéquation. Les photos faites aux Charrues de PJ Harvey, mazette ! Quelle gifle ! J’étais sorti de la fosse les larmes aux yeux. Pas tant pour Polly Jean que pour les images qui s’étaient révélées dans le viseur de mon D3s.
Test Nikon D850, ça attendra.
• Un capteur BSI, ça envoie du rêve
Bref. Revenons à 2017. J’ai un peu discuté avec Nikon. En clair on m’a dit que si je veux faire un test Nikon D850, pas de problème, mais les équipiers Nikon ont tellement de demandes et si peu de boîtiers de prêt, que je ne pourrai pas le garder plus d’une semaine. Une semaine. Que voulez-vous que je fasse sur une semaine ? Donc, pour le test Nikon D850 on attendra que ça se calme. Pour patienter, vous pourrez toujours savourer les bancs d’essai de rats de laboratoire qui shootent des mires et des billets de banque et vous expliquent, à grand renfort de formules scientifiques, que la montée en iso de D850 est un poil meilleure que celle de D810. C’est pas grave. Je vous connais bien, vous les lecteurs de SHOTS. Vous savez déjà que les secrets du nouveau reflex estampillé marque jaune sont ailleurs. Son capteur BSI, qui va lui permettre de sublimer la lumière sur chaque pixel, là où justement il n’y a pas de lumière. C’est la première fois qu’un reflex Nikon embarque un capteur de ce type et si Nikon choisit justement D850 pour faire ce choix, ce n’est pas par hasard. J’écrivais la semaine dernière que la montée en iso était le cadet de mes soucis. Avec ce capteur, Nikon enfonce le clou.
• Un capteur modulaire
Non, le must, ce qui fait de ce reflex une pépite, une merveille singulière, c’est bien sa polyvalence liée à l’adaptation et la modularité de la taille de son capteur. Les équipiers du NPS se sont amusés à calculer le nombre de possibilités de formules sur D850, on arrive à plus de 200 possibilités différentes ! On part d’un capteur maousse (46mp) qu’on va pouvoir moduler à loisir selon ses besoins, en mixant sous-définitions et modes crop. Nikon D850 est un couteau suisse et je je pense qu’il va faire un carton auprès de la clientèle professionnelle. Pourquoi ? D’abord c’est un reflex fullframe, pro, qui hérite des specs de D5 tout en ajoutant des fonctionnalités inédites sur D5, qui est capable de s’adapter, de couvrir quasiment tous les besoins. Tout en coûtant quasiment deux fois moins cher qu’un D5. Eh ouais… Il faut voir les chose en face, c’est la crise. Quel photographe pro est capable aujourd’hui de mettre 7000 balles dans un reflex ? Donc le prix de D850 va être un élément déterminant dans la décision d’investissement. Sans compter le prix des optiques qui, lui aussi, a tendance à s’envoler… Regardez le prix du nouveau Nikkor 70-200mm (j’en parlais dans cet article, vous vous souvenez ?) ou du sublime Nikkor 24-70mm f/2.8. Et en face, chez Canon, la serie L vogue allègrement dans les mêmes eaux en matière tarifaire. En revanche, le positionnement global de la gamme reflex joue aujourd’hui nettement et objectivement en faveur de Nikon.
• Un ou deux bémols, quand même
Seul bémol il me semble, à propos de Nikon D850 et de la taille de son capteur, c’est le poids et la taille des images qui vont induire des bécanes singulièrement gonflées pour être en mesure de les traiter dans de bonnes conditions. En clair, disposer d’un capteur de 46mp induit de générer des fichiers NEF qui vont peser sacrément lourd, idem pour les fichiers prodés. Donc, à la base, il va falloir investir dans des cartes XQD et SD de taille conséquente (64Go sera un minimum) et de performances optimum. Ensuite, il va falloir les proder, ces gros fichiers. Si vous bossez sur Mac, bonne nouvelle, Apple a annoncé une gamme iMac Pro, ça ne sera pas de trop pour travailler confortablement (prévoyez quand même 16 à 32Go de RAM et un SSD pour ne pas criser devant votre écran). Du côté de la prode proprement dite, il faudra aussi un software capable d’étaler. Je pense que Capture One Pro 10 ou Adobe Lightroom devraient faire le job, en espérant que les fichiers NEF générés par D850 soient reconnus, en incluant les sous-défintions. Last, but not least, il va falloir disposer de capacités de stockage sévèrement burnées pour abriter vos fichiers NEF ! C’est là où le stockage sur NAS ou le stockage en ligne vont s’avérer pertinents, ainsi que la fibre pour uploader à grande vitesse. Nikon D850 et son capteur de 46mp, c’est bien, mais ça induit des coûts à ne pas négliger.
• En attendant Nikon D850…
Allez, c’est lundi, c’est reparti pour une semaine de labeur. Pas de test Nikon D850 à l’horizon, en revanche pas mal de revues de bouquins sortis chez Eyrolles photo, dont le nouveau bouquin de ce cher Michael Freeman sur l’art du noir et blanc (vaste et passionnant sujet). Je pense que Nikon France va faire la tournée des revendeurs pour présenter son nouveau D850. Si ça passe près de chez vous, allez voir la bête de près, une bonne occasion de le prendre en mains. Bonne semaine et sortez faire des photos !
• cliché d’illustration : Roy Haynes, légendaire batteur de jazz au Cabaret Vauban en 2005. Photographié avec Canon EOS 20D et Canon EF 70-200mm f/2.8L.
Alex dit
Bonjour Hervé,
ce D850 est vraiment une excellente nouvelle de la part de Nikon, qui m’intéresse beaucoup malgré le fait que je suis sur D810 car, contrairement au D800/800E par rapport au D810, les nouveautés du D850 sont vraiment alléchantes.
La problématique du stockage et de la prod sont de « faux » problèmes, rappelez-vous les performances et les possibilités de stockage des ordis et du réseau à l’époque des D3/D700 et des appareils numériques précédents… Avec les performances actuelles, on a tendance à oublier que ce qui nous prend 1 minute avec un D850 nous en prenait au moins autant (même plutôt plus) il y a quelques années avec des boitiers pourtant moins pixelisés 😉 . Les fichiers de ces boitiers moins pixelisés aujourd’hui sont traités quasiment instantanément, ce qui sera le cas des fichiers du D850 dans quelques années également etc… C’est d’autant moins un problème avec toutes les tailles de résolution que permet le D850.
A mon sens, il faut garder en tête que si ce genre de boitier est appelé flagship ce n’est pas par hasard. Pour en revenir au D700 à l’époque, à sa sortie les critiques du genre « il faut des optiques haut de gamme » étaient déjà les mêmes, combien d’objectifs sont considérés maintenant comme « pas assez haut de gamme » pour aller sur ce boitier?
Faublas dit
Intéressant et plein de bon sens, ce qui contraste avec beaucoup d’autres sites, certes bien documentés, mais moins « praticien ».
Le D 850 me plait pour succéder à mes FM2 et FM3 argentiques que je compte garder encore pour des utilisations plus personnelles dans la mesure où je pourrai récupérer mes objectifs.
Bonne remarque quant au traitement des images qui risquent de faire fondre pas mal de cartes mères ou rendre les photographes en addiction au valium.
Hervé LE GALL dit
@faublas juste un bémol à propos des optiques. Je pense que D850 est une diva, comme on dit pour désigner un reflex qui ne se mélange pas avec n’importe quoi 😉 Donc sur un boîtier de ce calibre, on ne va pas pouvoir monter n’importe quelle optique, même si elles sont estampillées Nikkor !
Nicolas Joly dit
Je viens de prendre possession du mien…difficile de faire un bilan complet après 1 jour de shoot, et alors que Lightroom ne lis pas encore les NEF….mais la première conclusion est qu’il tient ses promesses. Les 3 tailles de RAw et le prix sont clairement ce qu’on attendait. Le viseur et la prise en main sont aussi ce qu’on attendait d’un boitier pro, même s’il me semble, que les F5 et Eos1-V avaient, en leur temps, des viseurs encore meilleurs. L’obturateur est particulièrement amorti, et même si le temps de visée n’est pas celui d’un D4 ou D5, le compromis réalisé entre vitesse et amorti confirme la ligne de polyvalence qui a été suivie. enfin un boitier à tout faire.