Vendredi 13 mars. On arrive à Carhaix avec un peu d’avance, ma crève d’enfer et moi. Le temps d’aller faire une petite promenade, comme un pélerin qui revient sur la terre Sainte, avec la dévotion qu’il lui doit. La plaine de Kerampuilh n’a définitivement pas le même visage, quand elle est comme ici, en hiver. On a du mal à imaginer le même endroit en été, foulé des des centaines de milliers de festivaliers. Il fait un peu frais mais le ciel est clément, comme s’il annonçait un printemps qui s’approche. Sur les talus, des primevères, des violettes. Seul l’emplacement de la scène Glenmor a été bitumé, tout le reste est un immense espace vert. En ligne de mire, le manoir de Kerampuihl et là, sous mes yeux, je vois la trace du sillon creusé par la charrue menée par les deux frères Morvan. Drôle d’impression d’être ici, tout seul, dans le silence absolu. Un rouge-gorge sur un arbre et au beau milieu de la plaine une bouteille de kro vide, ah ! Je me disais aussi… Après la promenade, direction la salle. Ce soir trois concerts en vue et on commence par Zaza Fournier. Une fille en rouge, de la gouaille à revendre, un accordéon, un tabouret, cette fille me fait inévitablement penser à Liz Cherhal (Uztaglote). Comme dirait ma tante Joséphine, qui excellait dans le domaine du politiquement correct, c’était gentil. Bon, quand même, la reprise d’Elvis (Heartbreak hotel) en solo et à l’accordéon, ça le faisait bien. Puis vint Guillaume Cantillon qui tourne ici en solo et en acoustique, en dehors de son groupe Kaolin. Deux guitares, une voix, une sensibilité à fleur de peau, une émotion palpable, Guillaume qui se réjouit de pouvoir faire (enfin ?) les choses dans le calme. Le calme ? Pas sûr. Excédé par un petit groupe de fond de bar (à bloc Jean Floch), il finira par s’en agacer en fin de concert, dédiant une chanson au groupe Tupperware sur sa gauche. De l’humour et un vrai putain de talent. Au deuxième rappel, Guillaume Cantillon propose une chanson « que vous connaissez peut-être… » Deux accords, aux premiers mots de Partons vite on reconnaît les afficionados de Kaolin présent dans la salle. Concert classieux. Ce qui a suivi en revanche m’a laissé sur le cul. La chanson du dimanche, deux gars qui ont fait le buzz sur internet et un niveau proche d’un Didier Super en terme de nullitude de référence. Bien sûr, les amateurs du genre vous le diront : c’est du troisième degré. Eh ! Oh ! C’est pas parce que Santa Rosa c’est du 12 degrés qui tâche que j’en bois au petit déjeuner, hein ? Sinon, les deux compères font le show avec des ficelles qui pourraient tenir leur pantalon et y vont de leur « Salut Carhaix ! » ou l’inévitable « Vive la Bretagne ! » C’est cela oui. Musicalement, le prof de maths barbu chevelu (oui, détail vraiment amusant, dans la vie civile il est prof de maths) sert deux accords, le reste est samplé sur un synthé. Bon, ok. Vous y étiez ? Ca vous a plu ? Dont acte. La chanson du dimanche, un remix entre feu Bézu la classe et la bande à Basile, nous sert des jeux de mots d’une finesse démesurée comme ferme ta bouche et casse la baraque à frites Mac Cain. Eh ouais, ça plane pas haut mais le public, lui, il est heureux. Il suffit de le voir s’asseoir pour la standing ovation, de faire la chorégraphie de la danse de l’été, de faire la chenille et d’applaudir à tout rompre sur la reprise de tubes aussi immémoriaux que Nicolas ou Rachida, Super pouvoir d’achat, Bon vivant ou l’inaltérable Bonne humeur reprise en breton. Ou de monter sur scène pour montrer son cul (salut Sammy). Allez, ça c’est fait. J’ai shooté quelques photos que vous verrez bientôt (oui, j’ai le cul de Sammy, aussi). Et si vous avez raté la Chanson du Dimanche, gardez espoir ! En quittant la scène, le gars Alex a donné rendez-vous à son public cet été. Cet été ? Ah non ! Je crains que si. En revenant à Brest, tandis que je grignotais un de ces délicieux cookies dont ma moitié a le secret en écoutant Magic de Bruce Springsteen (en juillet aux Charrues, yeah !), je repensais à ma plaine de Kerampuilh que j’aime tant. Et qui me le rend si bien. Rendez-vous ce soir, à Glenmor pour la seconde partie du festival qui s’annonce ouakenole…
• les photos des concerts de Zaza Fournier, Guillaume Cantillon et La chanson du dimanche sont en ligne sur Cinquième nuit.