Monsieur Le Régisseur de Dominique A,
Hier soir, Dominique A foulait la scène de l’Espace Vauban (autant dire chez moi, donc), à l’invitation des joyeux Sonics. Pour moi, c’était la seconde fois et j’appréhendais un peu ce concert. Il faut vous dire que la première fois, c’était il y a un peu plus d’un an et j’avais quitté la salle au bout de deux titres. D’ailleurs, ce soir je ne devais pas venir, tiraillé entre la fatigue, une grippe naissante et la lassitude des concerts. Car voyez-vous, Monsieur Le Régisseur, votre artiste n’est pas le premier que je shoote cette année, loin s’en faut. Après avoir savouré l’excellente presta de la première partie – Katel, on en reparlera – et juste avant que le concert ne commence, vous êtes venu nous expliquer que pour les photographes, ça serait trois titres et basta. D’une, régisseur ou pas, le Vauban c’est ma maison et je ne viens pas vous dire, à vous Monsieur Le Régisseur ce que vous avez à faire quand vous êtes chez vous. De deux, je suis un pro. Quand un régisseur, un organisateur de spectacle, un responsable de la sécu me dicte cet ordre, j’exécute. Quand nous sommes cinquante photographes dans une fosse de festival, j’admets volontiers qu’il faille limiter le nombre de titres. Mais ce soir, on n’était pas au Fort Saint Père à la Route du Rock, encore moins dans une fosse de Kerampuilh. On était au Vauban, bordel ! Alors vous vous êtes ravisés, admettant que, tout compte fait, le photographe du Vauban faisait ce qu’il voulait, puisqu’il était chez lui. Trop tard, le ver était dans le fruit. J’ai shooté trois titres et j’ai rangé mon matos, par respect vis à vis des autres photographes. Je suis entré dans ma bulle et j’ai fait des photos sublimes avec mes yeux, des photos que vous ne verrez jamais. Je me demandais, Monsieur Le Régisseur, les raisons qui poussent des gens comme vous à exercer ce pouvoir sur des gens comme nous, les photographes. La réponse est dans la question, justement. Vous exercez votre pouvoir, celui de limiter, d’interdire, sans raison vraiment valable, parce que les touristes japonais, au premier rang, eux se foutent bien de votre interdiction, mitraillant l’artiste à coup de flash dans la tronche de leur téléphone portable et autre compacts. Ce soir, je retournerai au Vauban. Faire des photos, encore. Du jazz. Un milieu dans lequel les photographes de concert font partie du show, depuis toujours. En conséquence, je pense que vous comprendrez, Monsieur le Régisseur, qu’Il n’y aura pas de photos de Dominique A sur Cinquième nuit , comme il n’y eut pas, en leur temps, de photos de Bill Deraime, de Jean-Louis Murat ou de Keren Ann. Ca ne changera rien à votre vie et encore moins à la mienne. Chacun exerce son pouvoir comme il l’entend.
Jean Jean dit
Et bien mon Hervé, t’es remonté… En même temps, je te comprends complètement. Soit on interdit complètement les photos, soit on les autorise complètement. Mais l’autorisation partielle, moi, je n’y ai jamais rien compris. Et puis tu n’es pas un de ces satanés « fouilles merdes », comme certains de ces journaleux qui ne comprennent rien à la musique (cf l’imbécile qui avait chroniqué le concert de Mio pour Emmaüs, sans y avoir assisté…)… non, tu es un putain de photographe! Et sans photographe, pas de photos, sans photos, pas de souvenirs impérissables… sans souvenir, pas de rêve. Et sans rêve, pas de vie.
Tu peux être rassuré, finalement, le plus pénalisé (aux vues des clichés que tu as du prendre et qui n’apparaîtront pas) ce n’est pas toi.